VERS LE CREPUSCULE DE LA FRANCAFRIQUE ...
VERS LE CREPUSCULE DE LA FRANCAFRIQUE ...
source:
http://regishounkpe.canalblog.com/archives/2005/03/02/353416.html#comments
Génocide rwandais , Affaire ELF , crise ivoirienne , coup d’état militaro-institutionnel au Togo, etc... : crises comparées de la politique africaine de la France .
Une décennie après le génocide rwandais , des interrogations lancinantes continuent d’émerger au gré des relations diplomatiques entre Kigali et Paris et elles mettent de plus en plus à jour les responsabilités de l’Etat français et les mises en accusation qui vont graduellement incisives contre l’armée française par le régime du président Paul Kagamé . L’effroyable drame du Rwanda qui continue de hanter les consciences et qui a imprimé des marques de culpabilité dans la mémoire éternelle de la communauté internationale n’a pas fini de délivrer sa terrible vérité .
L’actuel pouvoir rwandais , qui continue de panser les béantes plaies du divisionnisme ethnico-tribal qui l’a ravagé , est convaincu de la participation logistique de l’armée française aux côtés des groupes génocidaires issus des rangs des Forces Armées Rwandaises et des milices interahamwé d’obédience Hutu . A sa complainte , il invoque le laxisme et parle même de " complicité " des troupes françaises mandatées par l’ONU qui sous couvert de l’Opération Turquoise à caractère humanitaire pour protéger les Tutsi et Hutu modérés , s’est transformée en véritable armée de soutien et aurait participé à la tuerie en masse .
Comment se fait-il qu’une armée occidentale , celle du pays qui se proclame berceau des droits de l’homme , a participé à cette ignominie d’un autre âge et a contribué à accentuer le pourissement de cette guerre civile qui a éclaté en 1994? Pourquoi la communauté internationale a t-elle brillé par son mutisme et son aveuglement pendant qu’une " révolution des machettes " ( une de plus , pensait-on certainement à l’époque ! ) sévissait en Afrique ?
Autant de questions que se posent les observateurs et qui suscitent sourdement des embarras mal assumés et même des sentiments honteux dans les couloirs feutrés du Quai d’Orsay , de Matignon et de l’Elysée . Si la Belgique a eu le courage et l’humilité de reconnaître son " ignorance coupable " et demander pardon au peuple rwandais , la France continue de sombrer en vaines tergiversations . L’occasion de la commémoration du tristement dixième anniversaire à Kigali en juin 2004 était trop " belle" pour que Paul Kagamé désigne , une fois de plus , la responsabilité et pire la culpabilité de Paris dans le génocide de son pays . Le Secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères , Renaud Muselier , représentant officiel français , s’étrangla de courroux , quitta précipitamment les cérémonies et rejoigna Paris , la tête lourde d’un sentiment d’humiliation internationale pour son " si beau pays " ! Ce ne fut qu’une crise diplomatique de plus , mais celle-ci signera la confontration larvée à travers médias des deux pays .
Le pouvoir du Rwanda est indirectement renforcé et reconforté dans ses accusations par des associations citoyennes , des corps entiers de journalistes et d’historiens , de quelques diplomates occidentaux courageux et analystes géopolitiques qu’on ne peut soupçonner de volonté partisane .
Une plainte vient d’ailleurs d’être déposée contre X auprès du tribunal des armées de Paris pour " complicité de génocide " contre des soldats de la malheureuse Opération Turquoise de 1994 par des avocats français et six plaignants rwandais . Pour le moment et par voie de presse interposée , les officiels rwandais continuent de faire monter la pression et la diplomatie française persiste dans sa dénégation totale des dramatiques évènements qui ont traumatisé tout un peuple et peiné le continent africain . Ce qui est sûr , un bout d’histoire est en train de se réaliser et confirme que la France, déjà totalement discréditée auprès des nouvelles générations africaines même si elle est toujours en état de grâce pour certains dirigeants du continent , perd pied et que son influence ne représente que la portion résiduelle de ceux avec qui elle entretient des rapports particulièrement douteux issus de la Françafrique ...
Cette Françafrique ne génère pas que des " faux-pas " militaires et humains . Elle est à l’origine de l’un des scandales économico-financiers les plus inimaginables et c’est bien l’affaire ELF qui constitue l’un des pans scabreux des réseaux contestables de la politique africaine de France . Cette affaire aux accents mafieux de l’argent pétrolier met aux prises des présidents africains comme Paul Biya du Cameroun , Omar Bongo du Gabon , Denis Sassou N’guesso du Congo Brazzaville et Pascal Lissouba ancien président ( pour ne citer que ceux-là ) avec des grands patrons de la multinationale à savoir Alfred Sirven , Loik Le Floch Prigent , André Tarallo et autres magouilleurs de luxe . L’affaire ELF révélera l’existence de réseaux hauts-placés , passés maîtres dans l’art de l’industrie de la corruption , du clientélisme politique , des compromisions de haute voltige au détriment des pays africains , bénéficiaires légitimes des revenus de la manne pétrolière . Ce fut le régne de la Françafrique dénoncée par François- Xavier Verschave , l’un des illustres pourfendeurs de la politique souterraine de la France en Afrique , qui fait remonter toutes les filières de cette " mafiafrique " ou encore " France à Fric " jusqu’aux plus hautes autorités de l’Etat français de tous bords politiques , de gauche comme de droite .
Alfred Sirven , mort le 18 février dernier , qui menaçait de " faire sauter mille fois la République " n’aura même pas eu l’occasion d’allumer un pétard mouillé , emportant dans sa tombe le secret de ses amitiés douteuses de la mafia politico-économico-africano-française et surtout le mystère de ses milliards volés eextraits de la richesse énergétique . L’affaire ELF démontre une fois de plus le rôle sournois de la France en Afrique avec la complicité des présidents africains , corrompus juqu’à la moelle épinière et prêts à tout pour conserver leur pouvoir illégitime .
Ces dernières dix années , il n’y a pas eu que le génocide rwandais et l’affaire ELF. La gestion discutable de la crise ivoirienne par Paris , les accords de Marcoussis , les manifestations anti-françaises , le bombardement de la flotte aérienne ivoirienne , l’attaque du camp militaire français qui s’est soldée par la mort de neuf soldats de l’Opération Licorne , le rapatriement en urgence des ressortissants français , l’assassinat du journaliste français Jean Hélène par un policier ivoirien , la disparition suspecte du journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer , la méfiance entre les deux éxécutifs et l’état de leurs relations diplomatiques au plus bas ; voilà encore un autre épisode du feuilleton franco-africain qui apporte un éclairage plus évident sur l’avenir politique de l’ex-puissance coloniale avec ses ex-colonies .Si la Françafrique était au début des années 1960 un tissu de haute couture cousu par Foccart , il est aujourd’hui en lambeaux et devra un jour finir dans un dépotoir et laisser la place à un nouveau système de relations souveraines fondées sur le respect , l’égalité et la justice . Les dernières nouvelles venues de Lomè avec l’institution abominable d’une dynastie Eyadéma , secrètement soutenue par Jacques Chirac et sa clientèle dévolue du continent n’inspirent pas à un grand optimisme mais permettent d’envisager avec le temps une nouvelle ère : celle du réalisme démocratique . Quand la génération actuelle, celle qui dirige , détruit et pille l’Afrique depuis les Indépendances avec le soutien et la bénédiction de Paris, aura passé la main d’une manière ou d’une autre , on espère que celle à venir aura conscience des enjeux qui devront présider à toute forme de gouvernance pour le développement du continent . Il faudra indubitablement compter avec la fin du système françafricain et" mafiafricain" , gage d’un renouveau dans les relations entre la France et l’Afrique . Renouveau qui aura sonné la dernière heure de la Françafrique et qui l’aura précipité dans les abîmes crépusculaires de l’infini .
* Cet article fait l’objet d’un essai géopolitique sur les relations franco-africaines qui paraîtra prochainement .
francafrique:POUR EN SAVOIR PLUS
http://www.idcongo.com/pagehtml/francafriquaccueil.htm