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 Entretien avec François-Xavier Verschave, écrivain

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mihou
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mihou


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16032006
MessageEntretien avec François-Xavier Verschave, écrivain

Entretien avec François-Xavier Verschave, écrivain
La vérité est-elle si noire ?

Chargé de l’Emploi à la mairie de Saint-Fons, François-Xavier Verschave est
plus connu pour ses livres (Françafrique, Noir silence, Noir Chirac, etc.)
dénonçant les relations néocoloniales entre la France et l’Afrique. Considéré
parfois comme un exalté qui voit des complots partout, le président de
l’association Survie est respecté pour son travail de collecte d’informations et
pour ses engagements humanistes. Il annonce dans cet entretien qu’il portera en
justice la responsabilité de la France dans le génocide tutsi.


“J'ai découvert la Shoa en regardant un documentaire à la télé.
Après la guerre, on n'en parlait pas"
Lyon Capitale : Êtes-vous une grande gueule ?
F.-X. Verschave : Je le suis devenu par la force des choses. Je suis plutôt
timide. L’indignation est un ressort méconnu. Chercher la vérité est une
militance. On ne le fait pas si on n’en a rien à foutre. Je ne supporte pas
l’injustice, c’est une constitution. Je me souviens d’un dessin de Sempé où un
enfant dit : “Je veux un monde plus juste !” Et ses parents s’inquiètent :
“Qu’est-ce qu’on va faire de lui ?” Je suis un peu cet enfant, il faut faire
avec. C’est ça qui me meut.
Vous avez écrit de nombreux livres qui traquent la vérité sur les relations
sulfureuses entre la France et l’Afrique. Pourquoi ?
En 1965, j’ai découvert la Shoah en regardant un documentaire à la télé. Ça fait
un choc. J’avais 20 ans, j’avais fait trois années d’études supérieures, je
lisais Le Monde tous les jours. Mais, après la guerre, on n’en parlait pas.
Bousquet a été condamné pour collaboration, pas pour participation à un
génocide. Je me suis demandé : “Comment ai-je pu arriver à l’âge de 20 ans en
ignorant l’événement le plus important du siècle ?” Et aussi : que ce se
passe-t-il d’essentiel aujourd’hui et dont on ne parle pas ? À l’époque, c’était
la faim dans le monde. Mais ce n’est que dans les années quatre-vingt que j’ai
rejoint l’association Survie, qui venait d’être créée.
En attaquant violemment la politique africaine de tous les présidents français
de la Ve République, ne favorisez-vous pas un “Tous pourris” qui rejoint les
discours du FN ?
C’était le genre d’argument qu’utilisaient les staliniens pour qu’on ne parle
pas des goulags ! De toute façon, le FN est lui aussi totalement complice de la
Françafrique, comme je l’appelle. La DGSE a aidé sa première campagne aux
européennes en 1984, parce que Mitterrand voulait mettre des bâtons dans les
roues de la droite.
Y a-t-il une réelle constance, de De Gaulle à Mitterrand, puis Chirac, sur la
Françafrique ?
Complète. J’ai écrit 20 livres et plus de 15 000 pages dessus. Dans les années
soixante, De Gaulle a été contraint d’accorder l’indépendance aux colonies
africaines. En même temps, il charge Foccart de faire l’inverse, de maintenir la
dépendance de ces pays. Ça ne peut se faire naturellement que de manière
occulte. C’est ce que j’appelle la Françafrique. Pour créer ces néocolonies, la
France assassine tous les vrais indépendantistes, installe des dictateurs qui
ont fricoté avec nos services secrets, utilise une panoplie de moyens
politiques, financiers, militaires et barbousards. L’apogée du cynisme de la
France, c’est le Rwanda. La France n’est pas seulement complice du génocide de
1994, elle est probablement coactrice ! C’est à la fois incroyable et
insupportable.
Ce n’est pas la France qui a fourni les machettes !
Non, elle a fourni la méthode et les armes. En 1993, l’armée rwandaise est en
voie d’effondrement. C’est la France qui la tient, qui la commande. Tous les
massacres commencent par des actions militaires classiques. Les macheteurs
n’arrivent qu’après, encadrés par des soldats munis d’armes à feu. Ce qu’il faut
savoir, c’est que la France est championne du monde de la guerre antisubversive,
révolutionnaire ou psychologique, depuis l’Indochine. Deux colonels, Charles
Lacheroy et Roger Trinquier, ont mis au point une méthode de contrôle de la
population par la terreur. Aussaresses est un de leurs disciples. Cette méthode
a été mise en œuvre en Algérie, avec “succès”. Les Français ont ainsi formé la
CIA pour sa guerre au Vietnam, puis pour son soutien aux dictatures
sud-américaines. En Argentine, les dissidents balancés en hélicoptère dans la
baie, c’est une idée française. Nos militaires ont fait la même chose dans la
baie d’Alger : ça frappe les esprits, ça entretient la terreur.
Cela n’explique pas pourquoi la France aurait “commandé” ce génocide ?
Sur le Rwanda, il y a des choses qu’on soupçonne mais qu’on ne sait pas. On sait
le comment, le pourquoi reste inconnu. Il y a un trou noir historique. Il est
probablement inavouable. Il y a eu sans doute la volonté de perfectionner et
d’expérimenter nos méthodes de contrôle des populations par la terreur. Mais ça
ne suffit pas à tout expliquer. Certains évoquent des expérimentations d’armes
interdites. D’autres avancent que le Rwanda était une plaque tournante des
trafics de drogue au profit de réseaux français. On peut aussi se demander
pourquoi Robert Galley, l’un des pères du nucléaire français, a joué un rôle
aussi important dans les relations franco-rwandaises.
Si on vous suit, qui seraient selon vous les responsables de la complicité de la
France dans le génocide rwandais ?
Ils sont très peu nombreux. Il y a Mitterrand. C’est lui qui commandait
directement les militaires. Peut-être était-il manipulé par l’armée. Mais il
s’est laissé faire. Mitterrand était lucide. Sa jouissance du pouvoir a été plus
forte que sa vigilance. Selon Saint Exupéry *, Mitterrand était même ravi qu’on
lui propose ce joujou africain. Il ne faut pas oublier non plus son rôle dans la
guerre d’Algérie. Maintes fois ministre à l’époque, il sympathisait déjà avec
les thèses des généraux.
Pensez-vous que la France puisse demander pardon ?
Pour l’instant, elle refuse même de reconnaître des erreurs. Et pour cause ! On
va se retrouver comme les Allemands, en 1945, face aux crimes nazis. On sera
devant l’innommable. C’est le plus grand crime de la France au XXe siècle, avec
la déportation des juifs. C’est même pire en termes d’implication et de nombre
de victimes. Mais je suis persuadé que les révélations sur le rôle de la France
vont se multiplier. Les vannes sont ouvertes. Ensuite, ça se traduira sur le
plan judiciaire. Nous nous préparons à porter plainte contre des Français pour
complicité de génocide. On commencera par les exécutants, pour qu’ils disent à
qui ils obéissaient.
La limite de votre thèse, c’est que, depuis dix ans, il n’y a pas eu un homme
politique ou un journaliste pour accuser la France aussi directement de ces
atrocités…
Les appareils des principaux partis politiques sont englués dans cette affaire.
Et les relations franco-africaines sont l’un des rares domaines où la presse
n’est pas libre en France. Ce que je décris est inimaginable parce que l’Europe
a envoyé en Afrique le pire d’elle-même. On apprend à ceux qui y vont qu’ils
peuvent y faire n’importe quoi. En France, ces gens sont des bons pères de
famille qui n’imagineraient pas de commettre ces crimes. Il y a un fond très
fort de mépris et de racisme.
La presse est libre en France ! L’explication de ce silence général est
peut-être que vous avez tort et que vous vous laissez emporter par votre sujet.
Je suis désolé, mais c’est la réalité. Depuis dix ans qu’on travaille sur la
question, la réalité que nous découvrons est trop souvent au-delà de la fiction.
Le niveau du cynisme et des massacres est toujours pire qu’on ne l’imagine. On
apprend les choses au fur et à mesure. On a par exemple commencé à comprendre
que la France était impliquée dans des guerres civiles, en Angola ou au Tchad
par exemple, puis, qu’en fait, elle soutenait les deux camps. Puis, enfin, que
c’était une tactique systématique !
Ressentez-vous une certaine honte d’être Français ?
Aucune. Depuis Dreyfus, il y a toujours eu deux France. Une qui pense que le
meilleur d’elle-même, c’est la Vérité et la Justice. Et une pour qui l’honneur
de l’armée et les intérêts supérieurs de la Nation sont plus importants que
tout. Ça existe toujours.
Quels sont vos références, vos héros ?
Étienne Le Roy, Fernand Braudel, René Girard, Nelson Mandela, c’est banal. Mais
aussi Ruben Um Nyobé ou le journaliste burkinabé assassiné Norbert Zongo.
Que pensez-vous de Lyon 3 qui décerne ces jours-ci le titre de “docteur honoris
causa” au président du Burkina Faso Blaise Campaoré ?
C’est un scandale absolu. Ce type n’est pas seulement un assassin, il a aussi
été le “souteneur” de certains des leaders africains les plus atroces, comme
Charles Taylor ou Foday Sankoh. C’est un criminel contre l’humanité.
Quels sont vos zéros ?
Je n’aime pas les salauds, qui utilisent leur intelligence au profit de leurs
saloperies : Vergès, l’avocat des dictateurs, c’est le summum de la perversion
de l’intelligence.
Quelle est votre devise ?
Primum non nocere : “D’abord ne pas nuire”. C’est le début du serment
d’Hippocrate. Il s’oppose à la mentalité occidentale : “D’abord agir”.

Propos recueillis par Philippe Chaslot et Raphaël Ruffier
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