Nathalie AHANDA présente Le Guide des Prénoms Africains
On en rêvait, Nathalie l’a fait : le Guide des prénoms Africains. A travers 360 pages, elle nous emmène à la découverte de 4 000 noms et prénoms issus de toute l’Afrique. Un voyage premier du genre, étonnant et enivrant qui célèbre le diversité culturelle du continent africain à travers son antroponymie, et qui ne manquera pas de séduire le plus grand nombre. Alors exit Brenda, Brandon et Dylan, place à Iféhiwa, Amalaïka ou Zinga.
Bonjour Nathalie. Comment te décris-tu en général ?
Nathalie : Alors, je m’appelle Nathalie Ahanda j’ai 30 ans et je viens du Cameroun. Je suis passionnée par l’histoire et la culture africaine et je travaille avec des demandeurs d’asile. J’ai découvert Afrique Tandem il y a quelques années et j’ai un peu participé à sa première édition du Guide de l’Etudiant Africain.
En parlant de Guide, tu es l’auteur du premier Guide des prénoms africains. Pourquoi avoir décidé de réaliser un tel ouvrage ?
Nathalie : En fait, je n’ai jamais réellement décidé d’écrire un livre surtout que pour moi ce n’est pas de l’écriture au sens pur. Mais l’idée est née d’une discussion avec des amis qui prétendaient d’une part qu’il y avait peu de prénoms africains et d’autre part que choisir un tel prénom était une sorte de suicide professionnel et social surtout si on envisageait de vivre en France. J’ai donc commencé à chercher autour de moi, juste pour me faire plaisir et au bout d’un moment je me suis retrouvée avec plus d’une centaine de pages.
Après j’ai juste voulu me faire plaisir ainsi qu'à mes amis en leur offrant quelque chose qu’ils puissent garder. J’ai donc choisi l’auto-édition avec un petit tirage pensant que peu de personnes seraient intéressées par ce sujet. Mais l’accueil est très différent de ce que j'avais imaginé : une municipalité à même déjà passé commande pour sa bibliothèque.
« Le Guide des prénoms africains » ça sonne à la fois comme une revanche, une revendication et une envie de retours aux sources, aux origines. Tu voulais prouver quelque chose en le réalisant ?
Nathalie : Une revanche non ! Une revendication peut-être. Par contre une réelle envie d’un retour aux sources sans pour autant m’engluer là dedans. C’est assez surprenant que personne n’ait jamais trouvé d’intérêt particulier pour ce sujet, dans le monde dit francophone. Même en ouvrant un livre de prénoms du monde entier, il est difficile d'y trouver des prénoms d’Afrique subsaharienne.
Tandémienne on t’a connu très engagée socialement. Tu défendais fermement les droits des femmes. Ce guide s’inscrit dans ce sens ?
Nathalie : Certains le voient encore comme cela… La lutte a de multiples facettes et la mondialisation telle qu’elle est envisagée aujourd’hui écrase toutes les cultures non occidentales. Aussi, il faut résister dans tous les domaines (culturels, économiques…). Ce guide n’est pas une arme mais un outil de partage, il ouvre les africains aux autres en revendiquant ce qu’ils sont, leurs différences qui enrichissent aussi les autres. Je ne suis pas opposée au fait qu’un enfant noir ait un prénom occidental, ou asiatique mais je regrette que beaucoup d’africains aient encore honte de leurs noms qu’ils ne trouvent pas assez sexy aux yeux des autres ! Au contraire une petite fille blanche qui se prénommerait Tiyi ou Isola (le nom d’une fleur au Congo) je trouve cela génial. C’est vraiment cela le dialogue des cultures et la globalisation. Qui a envie que pour les années à venir les prénoms de petits garçons soient limités à Michael et Kevin ?
Aujourd’hui, les parents sont de plus en plus complexés par le fait de donner un prénom africain à leur enfant : chez les musulmans par exemple, il y a de moins en moins de Fatima au profit d’Inès car ce dernier tout en restant traditionnel est présumé plus doux et plus passe-partout. Ils jouent avec l’orthographe : ainsi Nadia devient Nadiya ou Nadhia et on oublie les prénoms se terminant par « ed » comme Mohamed ou Ahmed. Cela vaut aussi en Afrique sub-saharienne où le prénom traditionnel est relégué à la deuxième ou troisième place dans l’ordre des prénoms d’un enfant.
Moi j’aime la différence et là à travers l’anthroponymie africaine on découvre une autre façon de voir le monde.
Le Guide comporte 4 000 prénoms, c’est énorme ! Comment t’es tu prises pour les réunir ?
Nathalie : Par la lecture de nombreux ouvrages d’histoire, des guides de prénoms et notamment des guides de prénoms africains-américains, par la participation à des forums de discussions sur Internet et en demandant à toutes mes connaissances de chercher autour d’elles. En plus, dans mon travail je rencontrais souvent des réfugiés africains et lorqu'un un nom m’interpellait je demandais qu'elle était son origine, sa signification. Les gens étaient toujours très surpris et ravis de voir qu’un autre africain ayant probablement passé toute sa vie en Europe s’intéressait à leurs noms surtout quand ils entendaient le mien.
J’ai eu des listes incroyables mais très souvent sans aucune signification alors j’ai fait le tri. Il a fallu croiser les sources et ne retenir que les prénoms pour lesquels la majorité des sources concordaient dans le même sens. D’ailleurs à ce propos je voudrais encore remercier mon amie Fifonsi pour son aide.
Cela a nécessité plusieurs années non ?
Nathalie : Oui, surtout que j'ai perdu par deux fois mon travail faute de l’avoir sauvegardé.
Par contre avec la diffusion j’espère découvrir beaucoup d’autres prénoms. En effet, malgré les 4 000 prénoms du Guide je suis certaine qu’il y a encore un vivier énorme à déterrer notamment en Afrique centrale, dans les îles de l’océan indien et dans les régions islamisées.
Sur les 4 000 prénoms, certains sont-ils issus de ton imagination ?
Nathalie : Jamais ! Ceci étant, les lecteurs ont maintenant une base et avec celle-ci ils feront ce qu’ils voudront. Le nom d’une personne c’est une grande partie de son identité et c’est sans doute pour cela qu’en Afrique on pouvait changer de nom à tout moment et que l’on attendait un certain nombre de jours avant de nommé un enfant de manière à ce que les autres puissent d’abord l'observer. J’imagine un peu mal un petit Chaka, chétif et peureux pas vous ? (rires)
Le guide ne contient qu’une liste de prénoms ou alors on peut y trouver des informations supplémentaires telles que l’origine de chaque prénom ?
Nathalie : Dans ce guide qui compte plus de 4000 noms et prénoms africains j’ai essayé pour tous les prénoms d’indiquer au moins l’origine et la signification et en plus essayé de trouver des personnalités portant ce prénom, les circonstances dans lesquelles on l’attribut. Dans les dernières pages du guide, il y a un petit récapitulatif des prénoms donnés en fonction du jour de naissance, de la place de l’enfant dans la fratrie ou ceux destinés aux prénoms.
Trouver un éditeur pour ce type d’ouvrage a-t-il été facile ?
Nathalie : C’est de l’auto-édition, même si j’ai rencontré des éditeurs intéressés. Le guide serait sans doute différent si j’avais choisi cette option. J’ai déjà des propositions de réédition, mais on verra. Supporter les risques c’est comme un accouchement c’est toujours plus difficile pour le premier.
Pour finir, Interview « prénoms» :
Si tu avais pu choisir ton prénom ce serait lequel ?
Nathalie : Kandaka ou Isola .
Quel est selon toi, le prénom africain synonyme de beauté et de sensualité ?
Nathalie : Alors là j’en ai aucune idée. J’ai découvert tant de beaux prénoms en écrivant ce guide que c’est assez difficile de se prononcer. S’il fallait tout de même faire un choix peut-être que ce serait Seshat, la déesse des étoiles. J'adore l’Egypte !!! Sinon, la culture yourouba me parle beaucoup alors peut-être que j'opterais pour Ola « Précieuse » ou Sade « Dignité » et en plus cela me fait penser à la chanteuse Sade qui est très belle et dont les chansons sont d’une beauté et d’une sensualité…
Tu donnerais quel prénom à l’Afrique et pourquoi ?
Nathalie : Dunia ou Dounia qui en kiswahili signifie « le monde ». C’est beau non ? Afrique berceau de l’humanité, terre nourricière de tous les hommes de cette planète c’est d’une logique inébranlable pour moi. Et là je ne parle même pas d'un point de vue philosophique…
Le prénom de la femme africaine que tu admires le plus ?
Nathalie : Moi, c’est la Reine Tiyi plus connue comme l’épouse d’Aménophis III ou la mère d’Akhenaton. Mais pour être plus contemporaine, je dirais sans doute Wangari comme Wangari Muta Maathai (Prix Nobel de la Paix 2004) et Madikisela comme Zaniewe Winnifred Madikisela Mandela plus connue sous le nom de Winnie Mandela se ne sont pas forcément les femmes que j’admire le plus mais je reconnais leur force de caractère.
Le prénom le plus drôle que tu ais entendu ?
Nathalie : Je trouve très beau et très étrange tous les noms donnés aux enfants après plusieurs tentatives infructueuses de leurs parents pour les protéger des mauvais esprits comme Juji chez les haoussas, Niaman chez les bambaras, Mosele en Afrique du sud ou encore Wonye en Sierra Leone.
Le Guide des Prénoms Africains est disponible à la Librairie - Galerie ANIBWE
52, rue Greneta 75002 Paris
M° Etienne Marcel - Ligne 4 ou M° Chatelet, sortie Rambuteau (longer la Rue Montorgueil)
Tél. /Fax : 01 45 08 48 33
E-mail : k2inter@voila.fr
Prix : 23 euros T.T.C. Source : http://www.afriquetandem.com/