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 Jésus : la bataille de l'ADN

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mihou
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mihou


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06052006
MessageJésus : la bataille de l'ADN

Jésus : la bataille de l'ADN

Scientifiques, mouvements religieux, sectes, ils cherchent tous de l'ADN sur des reliques ayant prétendument appartenu au Christ.

Christophe Labbé et Olivia Recasens

Cinq microgrammes d'ADN prélevés sur un tricot de peau, censé être le vêtement sans couture porté par Jésus pour monter au Calvaire. C'est le trésor de Gérard Lucotte. Le scientifique, la soixantaine tirée à quatre épingles, qui aime à se présenter comme « le père de l'anthropologie moléculaire du chromosome Y », s'enthousiasme : « J'ai retrouvé l'ADN du Christ. »

Depuis vingt ans que ce généticien français étudie la tunique d'Argenteuil, il a fini par s'en persuader : ce puzzle de laine qui n'est montré au public que tous les cinquante ans appartient à Jésus- Christ. Même s'il se revendique d'un fantomatique « Centre de neurogénétique moléculaire » domicilié à son adresse personnelle, Lucotte aligne 200 articles scientifiques, où l'on trouve pêle-mêle des publications sur l'origine génétique des Basques, les vertus du blanc d'oeuf de la caille japonaise contre l'asthme, la fièvre méditerranéenne familiale, le gène de l'albumine, ou encore la mutation Delta 32 du corécepteur du virus du sida. « Les études scientifiques réalisées par le laboratoire des Monuments historiques sur la composition, la trame et la coloration du tissu plaident en faveur de l'authenticité de la tunique d'Argenteuil, explique-t-il, tout en précisant : la teinture rouge violacée et le tissage correspondent à des techniques utilisées en Egypte, en Syrie et en Palestine entre le Ier et le VIe siècle. Les minéraux retrouvés sur la tunique proviennent d'un milieu désertique, tout comme les pollens, qui appartiennent à des espèces végétales endémiques en Palestine. »

Et la mauvaise nouvelle qui tombe le 26 mai 2004 n'a pas ébranlé les certitudes de Gérard Lucotte. Ce jour-là, à Saclay, au Laboratoire des mesures du carbone 14, qui dépend du Commissariat à l'énergie atomique, le spectromètre de masse rend son verdict : la tunique d'Argenteuil remonte au VIe ou au VIIe siècle. Précisément entre 530 et 650 après J.-C., avec une probabilité de 95,4 %. « Tout le monde m'a dit : consolez-vous, c'est déjà très ancien. Mais je ne m'en suis pas satisfait. » Lucotte s'entête. Il émet les plus grands doutes sur la fiabilité du test au carbone 14. « Il y a eu contamination de la laine par du carbonate de calcium déposé par l'eau de pluie. Or le carbonate de calcium est l'ennemi numéro 1 des chercheurs parce qu'il rajeunit les datations. » Gérard Lucotte est resté traumatisé par la mésaventure arrivée au saint suaire de Turin. « Je me souviens qu'on a soudain décrété qu'il était faux à cause de la datation au carbone 14. Je ne veux pas que l'histoire se répète avec la sainte tunique. »

Pour Gérard Lucotte, « faire parler » la relique d'Argenteuil, classée monument historique en 1979, est une obsession. Pour avoir accès à la fameuse tunique, en 1986, il a réussi à convaincre le prêtre qui veille sur l'étoffe à la basilique d'Argenteuil, puis le ministère de la Culture. Enfin, Gérard Lucotte met la main sur un échantillon de laine tant convoité, et le place sous son microscope électronique : « Il y avait des microgouttes de sang partout. Des millions de globules rouges ! » s'enthousiasme-t-il.

Opiomane et porteur de morpions. C'est dans ces globules rouges qu'il croit voir les traces de la souffrance endurée par le Christ. « Les hématies, ces cellules qui transportent l'oxygène dans le sang, sont déformées comme si elles avaient subi un traumatisme extrême. » Et de préciser, pour convaincre son interlocuteur incrédule : « Sur la tunique, les traces de sang sont concentrées sur les deux épaules comme si elles avaient été provoquées par le transport d'un poids très lourd qui aurait arraché la peau. » A partir de l'ADN, Gérard Lucotte s'est carrément mis en tête de dresser le portrait-robot du propriétaire de la tunique. « Il s'agit d'un homme à cause de la présence du chromosome Y. L'étude approfondie des gènes permet d'établir qu'il avait la peau blanche, des yeux de couleur marron ou noire et probablement une chevelure brune. Ce qui correspond à la présentation habituelle du Christ après le IVe siècle. » En décortiquant le chromosome Y prélevé sur la tunique, Lucotte pense aussi avoir trouvé une origine moyen-orientale. Au passage, le généticien aurait repéré sous la lentille de son microscope quelques informations croustillantes sur la manière dont vivait le fils de Dieu. Le Vatican sera heureux d'apprendre qu'il se rasait une fois par semaine, était opiomane et qu'il avait des morpions...

Une recherche qui ne va pas améliorer l'image de Gérard Lucotte auprès de ses pairs. Le généticien est en effet tenu en quarantaine par la communauté scientifique, notamment parce qu'il croit à l'origine génétique des races. Gérard Lucotte était d'ailleurs l'orateur vedette, en décembre 1996, du Club de l'Horloge, un cercle de réflexion où se retrouvent représentants de la droite et de l'extrême droite, lors d'un colloque intitulé « De l'existence des races humaines et de leur base héréditaire ». Ce samedi 12 novembre, c'est grâce cette fois à ses travaux sur la relique d'Argenteuil que Lucotte se retrouve en étrange compagnie. Il est l'un des douze invités d'un colloque intitulé « La sainte tunique face à la science », au cours duquel il racontera tout ce qu'il a trouvé dans les cellules sanguines du Christ. Sur le papier cette réunion scientifique est organisée par le Centre oecuménique de la sainte tunique d'Argenteuil. En fait, une filiale de l'Union des nations de l'Europe chrétienne. Une association intégriste qui a pour membre d'honneur la vice-présidente du Front national, Martine Lehideux, et qui s'est distinguée en réalisant un pèlerinage à Auschwitz dans le but d'établir un parallèle entre la Shoah et le « génocide de l'avortement » (1)...

Un même groupe AB +. Pourquoi Gérard Lucotte intéresse-t-il les intégristes ? Partout sur la planète, des biologistes encouragés par des mouvements chrétiens traditionalistes se sont lancés dans une course à l'ADN du Christ. Dans quel but ? Lorsque, en 2004, Didier van Cauwelaert publie « L'Evangile de Jimmy », un roman dont le héros a été fabriqué par une organisation politico-scientifique à partir de l'ADN prélevé sur le linceul de Turin, Lucotte va frapper à sa porte. Le scientifique explique au prix Goncourt 1994 que ce qu'il a écrit n'est pas un roman mais un livre d'anticipation : des scientifiques se battent pour récupérer de l'ADN sur les reliques du Christ et cloner un nouveau Messie. Une histoire tellement abracadabrante que van Cauwelaert veut en savoir plus. Dans son livre « Cloner le Christ », qui sort chez Albin Michel à la fin du mois, doublé d'un documentaire sur Canal + (2), l'écrivain raconte que ces projets existent bien. Mieux, il affirme carrément que le saint suaire de Turin n'est pas un faux du Moyen Age, comme le montre la datation au carbone 14, et que le Vatican cache la vérité. « J'ai fourni à Didier van Cauwelaert toutes les informations sur la tunique d'Argenteuil pour son livre », s'empresse de préciser Gérard Lucotte. L'écrivain a même fait partie, avant d'en claquer la porte, de l'Institut d'anthropologie génétique moléculaire, créé par Lucotte. Cette association loi de 1901 a pour unique but d'étudier les traces d'ADN sur les reliques du Christ.

Gérard Lucotte voudrait s'attaquer au linceul de Turin, et au suaire d'Oviedo, vénéré comme le linge ayant servi à envelopper le visage du Christ. « On sait déjà que tous les trois ont été mouillés par le même sang du même groupe AB +, partagé par seulement 5 % de la population mondiale. » Et le généticien de rêver à haute voix de trouver sur les trois reliques un ADN identique. « Cela signifierait qu'on a affaire au même homme. » Mais rien ne prouvera que ce même homme est Jésus de Nazareth.

Selon la légende, la tunique d'Argenteuil aurait été offerte au VIIIe siècle par l'impératrice de Constantinople à Charlemagne, grand collectionneur de reliques. Il faut attendre trois cents ans de plus pour en trouver la première trace écrite. Dans une bulle papale de 1156, Hugues d'Amiens, archevêque de Rouen et légat du pape, en fait une relique « officielle ». Une bonne affaire pour le monastère d'Argenteuil, qui voit affluer les pèlerins jusqu'à la Révolution.

Les moines de l'abbaye d'Argenteuil racontent que c'est en faisant des travaux qu'ils ont retrouvé la tunique, cachée derrière un mur depuis Charlemagne pour l'abriter des raids des Vikings. Comme par hasard, c'est au XIIe siècle qu'apparaissent dans toute l'Europe des milliers de reliques. Une « génération spontanée » qui permet de remplir les caisses. « Le pouvoir miraculeux prêté aux reliques attire les dons et gonfle le prestige du seigneur local, explique Edina Bozoky, maître de conférences en histoire médiévale à l'université de Poitiers. Chaque monastère veut sa relique, certains n'hésitant pas à en voler chez le voisin. » C'est ce qui arrive aux restes de saint Vincent subtilisés à l'église d'Orbigny, en Indre-et-Loire, pour atterrir à Bourges, dans le Cher. Parfois, on se dispute la relique d'un saint avant même qu'il soit mort. On gage son futur squelette. Moribond, saint Jacques est ramené à Antioche pour que l'on soit sûr de récupérer ses reliques. Certains vont jusqu'à exposer la dent de lait et le prépuce de Jésus, la cervelle de saint Pierre ou le « lait » de Marie.

Un suaire qui résiste au lavage... La frénésie pour les reliques est telle que les prix s'envolent. Louis IX dépense plus d'argent pour récupérer la couronne d'épines et des bouts de la Croix que pour construire la Sainte-Chapelle. Les faussaires, eux, s'en donnent à coeur joie. En juin, le docteur Jacques Di Constanzo, du CHU de Marseille, n'a-t-il pas montré qu'on pouvait reproduire le saint suaire en utilisant les techniques du Moyen Age ? « J'ai appliqué un drap de lin mouillé sur un bas-relief représentant le visage d'un homme puis j'ai coloré le tissu par tamponnage avec de l'oxyde de fer », explique le scientifique. Pour aboutir à une image très proche de celle du suaire et quasi inaltérable, puisqu'elle résiste au lavage et au chauffage à 250 °C. Reste que la fabrication d'un faux suppose de solides connaissances anatomiques permettant de reproduire dans le moindre détail les conséquences d'une crucifixion. « On retrouve sur le suaire un écoulement de sang caractéristique d'un coup de lance porté à droite, au cinquième espace intercostal, ce qui correspond exactement à la technique de mise à mort des légionnaires romains. »

Un faussaire de génie aurait-il fabriqué le saint suaire puis badigeonné du même sang le linceul d'Oviedo et la tunique d'Argenteuil avant d'écouler le lot ? Gérard Lucotte n'ose pas y penser, lui qui envisage déjà de trouver le code génétique du Christ. « Ce sera mon Saint Graal », précise-t-il. Sauf que l'on n'a aucun moyen aujourd'hui de dater le sang, et que l'on ne saura donc toujours pas si ces reliques en tissu ont été portées par Jésus de Nazareth
UNE RELIQUE QUI RÉVÈLE SES SECRETS

Cellules sanguines Grossissement 400 x

Des cellules sanguines conservées dans les fibres de laine de la tunique d'Argenteuil.

GLOBULES ROUGES

Grossissement 750 x

Cinq globules rouges accrochés à la surface d'une fibre de laine.

HÉMATIES

Grossissement 6 000 x

Deux hématies, ces cellules qui renferment l'hémoglobine, responsables du transport de l'oxygène dans le sang.

HÉMATIES

Grossissement 6 000 x

Une hématie vidée de son hémoglobine, ce qui peut signifier, selon Gérard Lucotte, que le porteur de la tunique a subi une souffrance physique intense.
1. Golias, n° 41. 2. « Vont-ils cloner le Christ ? », dans « Lundi Investigation », le 12 décembre 2005. A lire : « Miracle ou imposture, l'histoire interdite du "suaire" de Turin », de Paul-Eric Blanrue, Editions Golias.

© le point 10/11/05 - N°1730 - Page 83 - 1784 mots
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