Manger local pour mieux manger!

Bordeleau, Benoit
Collaboration spéciale

À mille lieux de la production de la vanille, des épices et du café de notre panier d'épicerie, nous connaissons souvent mal ce qui amène nos aliments à entreprendre de si longs périples. Les auteurs du collectif Manger local, membres de l'International Society for Ecology and Culture (ISEC), lèvent le voile sur la vorace industrie agroalimentaire mondialisée...

Par le contrôle de la production des intrants agricoles (pesticides, herbicides), de la transformation, de la distribution sur les marchés internationaux et de la vente au détail, les multinationales ont réussi, au fil des décennies, à s'accaparer pratiquement toute la chaîne alimentaire.

La production agroalimentaire s'est donc inexorablement centralisée. En développant et renforçant leurs marchés, les magnats agroalimentaires se sont ainsi assurés la dépendance des producteurs.

Et pour maximiser sa productivité et sa rentabilité, l'industrie a aussi imposé une homogénéisation des pratiques: uniformisation des champs, utilisation croissante des OGM, d'engrais, d'herbicides et de pesticides, mise en place de monocultures industrielles et fixation des prix du marché. Face à ces exigences, les producteurs sont forcés de s'endetter ou voués à disparaître.

Le nombre d'agriculteurs a donc considérablement chuté, la pollution a crû, la qualité des aliments et la biodiversité agricole se sont dégradées. Par exemple, davantage de pesticides et d'insecticides sont nécessaires pour prévenir les risques d'épidémies attribuables aux monocultures.

La dégradation de l'environnement s'est également aggravée par la surconsommation énergétique, résultant de la transformation, de l'emballage, de la conservation, de la réfrigération et des transports de longue distance.

Parallèlement, ce gaspillage d'énergies a donné lieu à un problème d'ordre économique. Car même si nous croyons que les prix des aliments produits en grande quantité sont moins chers, nous les payons en réalité trois fois. D'abord à la caisse; ensuite, nous finançons les infrastructures nécessaires aux multinationales (transport, communications et énergie) par l'entremise de nos impôts; et enfin, nous " réparons " les dégâts causés à l'environnement! Alors, en tant que consommateurs, comment pouvons-nous à la fois participer à la réduction des coûts écologiques et économiques, et nous assurer de la qualité des aliments? Selon les auteurs, en privilégiant l'agriculture de proximité.

Manger local, c'est non seulement encourager l'économie locale, mais c'est aussi nous assurer la fraîcheur des aliments, repenser le tissu social et communautaire et nous rapprocher du lieu de production. En plus d'éliminer les " inutiles " et coûteux intermédiaires, le polluant circuit commercial et l'importation d'aliments déjà produits par les petits agriculteurs locaux, manger local favorise une production agricole plus proche des besoins écologiques.

Porteur de solutions savoureuses et pratiques, cet essai suggère aux consommateurs de se tourner notamment vers les marchés publics, les coopératives d'alimentation, l'agriculture soutenue par la communauté, etc.

Avant tout un choix écologique et économique, manger local pourrait nous permettre de mieux faire face à la hausse du prix de l'essence qui viendra bientôt saler notre facture à l'épicerie...

L'auteur est chroniqueur pour la librairie Coop HEC Montréal