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MENARGUES INTERDIT DE REUNION PAR LE MONDE DIPLOMATIQUE
Akain Ménargues, ancien rédacteur en chef de RFI, licencié de cette radio pour
avoir qualifié publiquement l’Etat d’Israël d’Etat raciste, et auteur du livre
"Le Mur De Sharon", vient d’être interdit de réunion à Rennes par la direction
du Monde Diplomatique, qui se range à son tour du côté des maître-chanteurs de
l’antisémitisme. L’AFPS et les Amis du Monde Diplomatique de Rennes,
organisateurs de la réunion prévue hier, ont cédé à ces pressions édifiantes.
Nous publions la lettre qu’a adressée Alain Ménargues au Monde Diplomatique.
Lettre ouverte au Directeur du Monde Diplomatique, au rédacteur en chef et à son
adjoint.
Invité à une conférence à Rennes par les Amis du Monde Diplomatique et la
section rennoise de l’AFPS, j’en ai été exclu au prétexte que je suis antisémite
! En fait, mon livre "le mur de Sharon" dérange et déstabilise. Des
organisations d’extrême droite spécialisées dans la défense d’Israël ont fait
pression sur la rédaction du Monde Diplo qui, elle à son tour s’est retournée
contre l’AFPS et a lancé un oukase. par Alain Ménargues
Exclu. Vous m’avez exclu pour avoir émis des idées sur le conflit
Israélo-palestinien éloignées de la ligne de certains responsables de la
rédaction du Monde Diplomatique.
Interdit. Vous m’avez interdit de débats parce qu’il ne peut y avoir, dans votre
conception, de débats sans consensus absolu avec vous. Dans le plus pur style
démocratique, les « autorités » supérieures du Monde Diplomatique ont imposé à
M. Didier Gondret, correspondant des « Amis du Monde Diplomatique » à Rennes et
à M. Moulay Hamid, responsable de l’Association France-Palestine Solidarité dans
la même ville, de m’interdire de participer à la conférence-débat du 29 juin à
laquelle ils m’avaient pourtant invité, il y a deux mois.
Pourquoi ? Simplement parce qu’un périodique s’affichant comme « le mensuel du
judaïsme français » (qui compte entre autres signatures Alain Finkielkraut,
Alexandre Adler, Pierre-André Taguieff, Jacques Tarnero, Gilles-William
Goldnadel) avait dénoncé cette invitation adressée, selon eux, à un « auteur
antisémite ».
Le grand mot. Tous ceux qui dénoncent les agissements d’Israël, et notamment
ceux qui ont les références et la notoriété pour le faire pertinemment [1],
subissent les foudres de ces grenadiers voltigeurs de l’extrême droite
israélienne brandissant l’arme de l’antisémitisme [2] pour tenter de redresser
l’image des gouvernements de Tel-Aviv tombant totalement en décrépitude depuis
les massacres de Sabra et Chatilla en 1982. L’essentiel des foudres et des
attaques de ces militants d’extrême droite pro israélien est constituée par la
seule contestation.
Le harcèlement sur les mots. L’exégèses hallucinées et le discours
d’imprécation. Cette politique organisée, menée avec pugnacité et sans relâche,
vise moins à acquérir une quelconque crédibilité qu’à salir et exercer sur le
journaliste une pression de tous les instants, à le placer en perpétuelle
position d’accusé devant se justifier, à le déstabiliser en insinuant qu’il est
partisan voire malhonnête.
Peu importe que l’accusation soit absurde et journalistiquement
antiprofessionnelle, elle fait son œuvre. Dans le sillage de cette
désinformation, les rédactions reçoivent en cascade des « témoignages » de
lecteurs qui ont « ont honte pour la France » . [3]
Faut-il préciser que ni moi, ni mon livre n’avons été poursuivis en justice,
(voir texte l’affaire Ménargues. Bilger) ni donc condamnés pour cette ignominie
et, ce, malgré des recherches approfondies et vaines d’éléments probants
effectuées par deux cabinets d’avocats parisiens à la demande d’organisations de
défenses d’Israël qui n’hésitent pourtant pas à ester en justice - voir affaire
Morin, Sami Naïr et Danièle Sallenave.
Les « autorités supérieures » de la rédaction du Monde Diplomatique - qui ont
déjà subit des pressions de ce « mensuel du judaïsme français »- ont cédé cette
fois-ci. L’oukase est tombé : Ménargues interdit de conférence. Le mensuel en
question s’en félicite d’ailleurs sur son site internet « Il semble que la
réunion publique avec Alain Ménargues, programmée pour le 29 juin, ait été
annulée. Nous ne pouvons que nous réjouir d’une prise de conscience dans
laquelle nous croyons savoir que nos articles ont joué un certain rôle. »
En d’autres termes, rien sur ce conflit ne peut être dit ou publié sans leur
aval. En ce qui me concerne, je n’ai jamais admis la censure ! Pas plus celle là
qu’une autre. Un journaliste censuré par des journalistes. Carton rouge,
Messieurs.
Il y a d’ailleurs fort à parier que « les autorités » du Monde Diplomatique vont
s’empresser de publier dans les colonnes de leur prochaine livraison un article
pour se justifier. Et du même coup d’ailleurs, pourquoi pas, retirer d’autorité
« Le mur de Sharon » de la sélection 2005 pour le prix des Amis du Monde
diplomatique. Après avoir interdit aux Amis certains conférenciers non
politiquement corrects, il est logique de leur interdire des livres qui ne sont
pas « dans la ligne ».
Me voici donc, avec mon livre-grand reportage « Le mur de Sharon », condamné à
l’autodafé en Place de Grève par de Grands Inquisiteurs.
Mon crime d’hérésie ? Mon fait de sorcellerie ?
Pour les conter, les Grands Inquisiteurs du Monde Diplomatique ont repris,
quasiment mot pour mot, mes « fantasmes » tels que décris par le « mensuel du
Judaïsme français » : Je suis condamné pour avoir tenté d’expliquer les
multiples motifs de la construction d’un mur dit de sécurité qui balafre une
terre trois fois sainte, en évoquant l’environnement culturel de ces motifs. Et
ô déraison, j’ai porté, un instant, attention au rôle et à l’importance de la
religion juive dans les décisions de Tel-Aviv. Le ciel m’est tombé aussitôt sur
la tête. 10 pages de constatations sur 295, dix pages de trop, ou, plus
exactement, deux paragraphes prétextes dans ces dix pages, qui, selon la bonne
vieille méthode de la désinformation, ont été sortis de leur contexte pour
occulter tout le reste (voir dans les dossiers attachés « extraits du mur de
Sharon »)
Pour les Grands Inquisiteurs, peu importe si, aujourd’hui encore, ce rôle et
cette importance sont évoqués dans tous les journaux français [4], étrangers et
israéliens [5]. Tous racontent le poids politique des mouvements et des partis
religieux ultra orthodoxes dans les choix et les décisions politiques du
gouvernement ainsi que dans l’occupation de la Cisjordanie et de Gaza.
Peu importe si, après l’horrible et inqualifiable attentat dans une discothèque
de Tel-Aviv, le premier ministre Ariel Sharon envoie ses bombardiers tirer à la
roquettes sur Gaza « pour venger le sang juif » alors que dans le même temps,
des rabbins interdisent l’inhumation de certaines victimes au motif que «
russes, il n’(était) pas sûr qu’elles soient juives » (Ha’aretz et voir liste
des attentats anti-israéliens en fin du livre « le Mur de Sharon »)
Peu importe si le rabbin Meir Kahana fondateur du mouvement ultra orthodoxe
Kach, se soit écrié, lorsque celui-ci fut interdit, « les impurs ont disqualifié
les purs » avant de relancer son mouvement sous une autre appellation. Et si le
même Meir Kahana, élu député à la Knesset, déposa des projets de lois visant à
chasser les non-juifs de Jérusalem et à emprisonner ceux qui avaient des
relations sexuelles « interethniques ».
Peu importe les milliers d’éléments de ce genre, à commencer par ceux détaillés
par Israël Shahak, professeur de droit à l’université Hébraïque de Jérusalem et
Président de la Ligue des droits de l’Homme, dans son livre « Le racisme de
l’Etat d’Israël » (voir extraits Shahak et liaisons dangereuses joints)
Peu importe s’il est historiquement vrai que les juifs chassés d’Espagne puis du
Portugal, entre les années 1492 et 1496 se sont réfugiés à Venise et se sont
installés dans le seul endroit disponible (ce que l’on appellerait aujourd’hui
la zone industrielle) où se trouvaient des fonderies, « ghetto » en vénitien.
C’était 550 ans avant que le drame de Varsovie ne charge émotionnellement le mot
de « ghetto ». Contester que les juifs se sont regroupés là comme ils l’ont
fait, ailleurs, dans des schtettls, des mellahs ou des judérias est un non sens.
Les quartiers juifs, comme les quartiers maltais, chrétiens, orthodoxes,
arméniens existaient - et existent toujours - dans bon nombre de cas, dans
presque toutes les villes du pourtour de la Méditerranée.
« En introduisant dans votre livre l’idée que la construction du mur aurait des
origines et un fondement ethnico-religieux, vous franchissez une frontière que
nous nous refusons fermement pour notre part à traverser » m’écrit le secrétaire
général des Amis du Monde diplomatique pour « motiver » l’annulation de la
conférence à Rennes du 29 juin ». Mais nulle part, il est dit dans mon ouvrage
que ce mur a des origines et des « fondements ethnico-religieux ». Ce n’est ni
dans le texte, ni dans l’esprit. (voir les 11 éléments d’analyses cités dans la
table des matières du livre à la fin de l’extrait joint en pièce attachée).
Il s’agit là, à mes yeux, d’une de ces présentations fallacieuses et
tendancieuses des plus discutables qui encore une fois est totalement comparable
aux méthodes utilisées notamment pour le procès d’intention fait à Edgar Morin.
Serait-il interdit pour des « gentils » [6] journalistes d’évoquer le poids et
l’influence de la Thora (et de ses interprétations) dans la politique
israélienne de la gauche à l’extrême droite, comme peuvent le faire -en des
termes d’ailleurs souvent plus durs- leurs confrères israéliens ? Israël est-il
un pays différent des autres pour lesquels l’influence du Coran ou de la Bible
(et de leur interprétation) sont largement évoqués ? Etes-vous de ceux qui
pensent qu’Israël doit être traité « autrement » ? Peut-on s’abstenir de
souligner l’importance du judaïsme dans les discours politiques et les décisions
de la droite et de l’extrême droite israélienne quand le Premier ministre
israélien évoque le rôle néfaste de l’Islam chez les Palestiniens et le
terrorisme islamique (Ariel Sharon devant la Knesset en novembre 2004.
Suis-je à ce point contagieux sur ce sujet pour m’interdire tout contact avec
les Amis du Monde Diplomatique et les adhérents de France Palestine Solidarité ?
Alors que, notons-le au passage avec un sourire moqueur, Alain Gresh, le
rédacteur en chef du Monde Diplomatique, cite, dans la livraison de juin, un de
mes livres en référence dans son article sur le Liban (par ailleurs contenant de
nombreuses erreurs.)
Je pense, messieurs les Grand Inquisiteurs que vous méritez tout simplement un
second carton rouge pour censure militante cette fois-ci !
L’attitude des « hautes autorités » du Monde diplomatique est indigne des Amis
de ce journal. L’association des Amis du Monde diplomatique se veut être un lieu
de débat d’idées, figure essentielle de la démocratie et du rejet de
l’intolérance intellectuelle. Pour se forger une opinion éclairée ne faut-il pas
pouvoir choisir en toute connaissance des termes du débat, et donc écouter les
positions divergentes. Tel n’est donc pas l’avis des chefs de la rédaction du
Monde diplomatique !
Je conçois, parfaitement, que vous ne soyez pas de mon avis, de celui d’Israël
Shamir ou d’autres. Vous ne partagez pas nos analyses de la situation, soit.
Mais pourquoi les dénigrer ? Pourquoi salir les personnes et non pas argumenter
contre leurs idées ? Au nom de quelle légitimité, de quelle autorité pouvez-vous
juger et exclure ? Vous vous appropriez l’exclusivité d’un combat qui est loin
de n’être que le vôtre et vous rejetez ceux qui le mènent différemment. Prenez
garde que votre intolérance intellectuelle ne se transforme en terrorisme
intellectuel. Je considère que vous en êtes à la limite.
Pour ma part, très voltairien, je me battrais pour que vous puissiez exposer
votre opinion, à mes yeux aussi importante que la mienne. Paraphrasant Michel
Habib-Deloncle, j’ajouterais que la liberté de penser et d’exprimer sa pensée,
dans le respect de la Loi, est la conquête majeure de la démocratie. Ce sont les
tribunaux qui en sont les gardiens, non « le mensuel du judaïsme français » ou,
n’en déplaise, les dirigeants du « Monde diplomatique ». Je vous reconnais
volontiers le droit de défendre des politiques que je n’approuve pas et je
revendique la réciprocité. Je ne juge pas les hommes ou les Etats pour ce qu’ils
sont, mais pour ce qu’ils font.
Débattons-en au lieu d’exclure. Pourquoi ne pas défendre votre point de vue lors
d’une conférence-débat comme celle qui était prévue à Rennes le 29 juin ? Qui
relève la proposition ? Alain Gresh ? Dominique Vidal ? Ignacio Ramonet ? Les
trois ?
En ce qui me concerne, j’enverrai sans hésiter Le mur de Sharon à tout
correspondant des « Amis du Monde Diplomatique » ou de l’ « Association France
Palestine Solidarité » qui souhaiterait prendre connaissance par lui-même des
analyses développées dans mon livre et je répondrai favorablement à toute
demande de débat.
Alain Ménargues
Journaliste