La chapelle de Sixte
La chapelle Sixtine, inaugurée le 31 octobre 1512, doit son nom au pape Sixte IV,
né Francesco della Rovere. Celui-ci la fait construire au coeur des
palais du Vatican en 1481-1483. Ses murs sont peints à fresque par
d'illustres artistes tels Botticelli,
Ghirlandaio ou Le Pérugin. Quelques décennies plus tard, les papes
Jules II et Clément VII commandent à Michel-Ange la décoration de la
voûte de la chapelle puis du mur de l'autel.
Michel-Ange, qui s'estime plus sculpteur que peintre, se rebiffe. Il
soupçonne à juste titre l'architecte favori du pape, Bramante, d'être à
l'origine de l'idée, dans le but de le placer en situation d'échec et
de le ridiculiser.En définitive, vaincu par l'obstination du
pape, il passera quatre années extrêmement pénibles sur les
échafaudages et nous laissera 800 m2 de fresques
imposantes, représentant la création du monde, de l'Homme et le Déluge.
Vingt-trois ans plus tard, le pape Clément VII lui demandera une
nouvelle fresque pour le mur de l'autel. Ce sera le grandiose
Jugement dernier.Peu
après le saccage de Rome par les lansquenets allemands de l'empereur
Charles Quint (1527), le pape Paul III demande à l'artiste de
réaménager la place du Capitole, siège du Sénat de la ville.
Michel-Ange dessine le plan actuel, remarquable d'équilibre et
d'harmonie, avec, au centre de la petite place, la statue en bronze de
l'empereur Marc-Aurèle, héritée de l'Antiquité.En 1546, le même pape confie à Michel-Ange, architecte en chef du Vatican, le soin de reprendre la construction de la basilique Saint-Pierre de Rome,
délaissée depuis la mort de Bramante, 32 ans plus tôt. Michel-Ange
remanie les plans de son ancien rival et dessine une majestueuse
coupole (136,50 mètres de hauteur totale). Parmi d'autres constructions
romaines à mettre au crédit du vieil artiste figurent la
Porta Pia et le palais Farnèse, qui abrite aujourd'hui l'ambassade de France.Entre christianisme et paganisme
Sculpteur,
peintre, architecte, ingénieur, poète, Michel-Ange est le plus démesuré
des artistes de la Renaissance. C'est aussi le plus païen des
illustrateurs de la foi catholique. L'énergie et la force vitale qui se
dégagent de son oeuvre évoquent davantage la mythologie d'Hésiode que
la compassion évangélique.
Michel-Ange poète
Ogn'ira, ogni miseria et ogni forza,Chi d'amor s'arma, vince, ogni fortuna.Chaque colère, misère et violence,
Qui d'amour s'arme vainc le sort.Comment
ne pas songer à Zeus devant la scène du Jugement dernier, à la Sixtine
? Et les bustes d'esclaves à demi ébauchés dans le matériau, n'est-ce
pas l'Homme créé à partir de la Terre ? Que dire encore des
David-Apollon, magnifiques représentations du corps humain ? Il n'y a
guère chez Michel-Ange que la
Pietà douloureuse de Saint-Pierre de Rome, réalisée à l'âge de 23 ans, qui échappe au soupçon de paganisme.Commentaire : pourquoi Michel-Ange ?
Depuis
un demi-millénaire, le spectacle de Florence et Rome laisse perplexe
autant qu'admiratif. Par quel miracle autant de beautés ont-elles pu
surgir en l'espace de trois ou quatre générations ?A la cour de
Laurent le Magnifique comme à celle de Jules II, dans des États et des
villes qui ne dépassaient pas quelques centaines de milliers d'âmes, se
retrouvaient une pléthore d'artistes dont un seul ferait la gloire
d'une grande nation d'aujourd'hui. Que l'on pense à Michel-Ange bien
sûr, mais aussi à Léonard de Vinci, Raphaël, Botticelli, Bramante,...Ces
génies auraient-ils été engendrés en cette époque et en ce lieu par une
conjonction singulière des étoiles ? Absurde. Plus sûrement, nous
devons admettre que c'est l'environnement humain et spirituel qui a
permis à ces artistes de s'épanouir pleinement tandis qu'en d'autres
lieux et en d'autres époques, ils auraient vécu médiocrement ou, pire,
auraient sombré dans la maladie ou la démence.Nous pouvons
imaginer, pour faire court, que les chromosomes du génie sont également
répartis dans toutes les populations humaines... Ces chromosomes se
dessèchent ou meurent le plus souvent car ils tombent en mauvaise
terre. Et dans des circonstances rarissimes, ils génèrent à foison des
Michel-Ange et des Raphaël, des Shakespeare et des Cervantès, des
Mozart et des Beethoven.Est-il besoin de le préciser ? La France
de ce début du XXIe siècle est à l'opposé de la Florence du XVIe
siècle. Il n'est que de voir la façon dont a été enterré le projet de
fondation d'art contemporain du mécène François Pinault.
http://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=15640218#Sixte