L'Express du 18/05/2006
Codéveloppementallegre.express@ipgp.jussieu.frPour
éviter l'immigration massive, il faut réduire les déséquilibres économiques
n
Europe comme dans tous les pays développés, l'immigration est un sujet
politique majeur, le terreau sur lequel prospèrent les partis d'extrême droite.
Avec comme argument la peur de l'autre, sentiment hélas solidement implanté
dans l'esprit des hommes depuis les origines.
Les racines de cette
crainte, aujourd'hui, sont multiples. Il y a d'abord la peur de partager les
richesses, dont la plus rare, le travail. Et c'est là que la fameuse équation
de Le Pen «nombre de chômeurs égale nombre d'immigrés» fait peur. Vient ensuite
la peur de perdre son identité, culturelle ou linguistique. Aux Etats-Unis, la
peur du Latino vient de la revendication du bilinguisme; en Europe, la peur des
musulmans, de leur défense du multiculturalisme.
D'un point de vue
biologique et anthropologique, deux réactions doivent être proscrites. En
premier lieu, l'immigration zéro, à la fois impossible et nuisible. Impossible,
parce que l'homme est nomade par essence: les nomades ont façonné l'histoire du
monde depuis leur départ de la vallée de l'Omo, il y a deux millions d'années.
Inutile, parce que l'hybridation conduit à une amélioration biologique. Elle
crée de nouvelles qualités et la sélection naturelle élimine les hybridations
néfastes.
L'immigration sans
contrôle, en second lieu, serait elle aussi néfaste. Elle signifierait la fin
de la diversité. Or, la biodiversité et la diversité culturelle sont
indispensables à l'équilibre de la planète. Il est important de se battre pour
conserver l'une et l'autre.
C'est entre ces deux
bornes que doit se situer la politique d'immigration. Il est indispensable que
les pays riches fassent en sorte que les déséquilibres économiques ne rendent
pas l'immigration massive inévitable. L'Alena fut imaginée par Bill Clinton
pour aider le Mexique à se développer. Les conventions de Lomé sont aussi
sous-tendues par cette idée.
Même si elle est
pratiquée depuis longtemps par les Etats-Unis, l'immigration choisie est, en
revanche, inacceptable. D'une part, elle affaiblirait davantage les pays dits
d'origine; d'autre part, elle exercerait une pression à la baisse sur les
salaires, alors que la France
a besoin de relancer sa consommation. Ces mesures nationales sont, en outre,
absurdes. Comment appliquer des politiques d'immigration différentes dans un
ensemble européen où la mobilité des individus est totale? C'est à l'échelle de
l'Europe qu'il faut envisager une politique de codéveloppement avec l'Afrique.
Voilà un cadre. Mais la solution, elle, ne peut sortir que d'un débat, si l'on
ne veut pas qu'elle soit rejetée de facto par les citoyens.