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Le Devoir
LES ACTUALITÉS, lundi 14 mai 2007, p. a1
L'électrochoc Pauline MaroisLa candidate à la chefferie propose des changements profonds au PQ
Lévesque, Kathleen
Bousculé depuis une semaine, le Parti québécois a
reçu hier un autre électrochoc. Pauline Marois a annoncé sa candidature
à la direction du parti en proposant de procéder à des changements
profonds: mettre en veilleuse la mécanique référendaire, s'adapter aux
aspirations des Québécois et renouer avec le nationalisme identitaire.
Après 18 mois d'absence sur la scène politique,
c'est une Pauline Marois souriante, l'oeil pétillant, qui a prévenu les
militants péquistes que c'est d'un «parti renouvelé» qu'elle veut être
cheffe. «Un parti qui ne répond pas à une nécessité évidente se
condamne à la marginalité et peut même se condamner à la disparition.
Il y a un immense travail d'écoute à faire, et je sais que je peux le
faire», a-t-elle déclaré entourée de quelques dizaines de députés du PQ
et du Bloc québécois.
Le changement d'approche que propose Mme Marois
apparaît comme une condition pour celle qui en est à son troisième
essai pour prendre les rênes du PQ. Il est plus que temps, selon elle,
que le PQ rompe avec les sempiternels débats sur la date d'un
référendum (que ce soit les 1000 jours de Bernard Landry ou la formule
récente d'André Boisclair du plus tôt possible dans un prochain
mandat). C'est un piège, a fait valoir Mme Marois.
«Je propose que nous mettions de côté l'échéancier
référendaire pour travailler sur le projet de pays, l'expliquer, en
discuter et écouter les gens sur la façon dont ils le voient. Si on me
choisit comme chef de ce parti, c'est aussi cette orientation-là que
l'on choisit», a clairement indiqué Mme Marois.
Avant de présenter brièvement son programme, Pauline
Marois a salué le chef du Bloc, Gilles Duceppe, qui la veille a surpris
tout le monde en se retirant de la course moins de vingt-quatre heures
après avoir annoncé son intention de briguer la chefferie péquiste.
«Gilles, cela te grandit. Merci», a affirmé Mme Marois.
Les coups de théâtre se sont multipliés dans les
rangs souverainistes depuis une semaine. André Boisclair a d'abord
déclaré que M. Duceppe travaillait en sous-main pour le remplacer.
Gilles Duceppe s'en est défendu. Puis, mardi dernier, André Boisclair
tire sa révérence. Des candidats sont pressentis pour le remplacer.
Vendredi, Gilles Duceppe prend de vitesse Pauline Marois et annonce sa
candidature. Mais la riposte de Mme Marois arrive quelques minutes plus
tard: elle sera aussi de la course à la direction.
Puis, en fin d'après-midi samedi, M. Duceppe a
diffusé un communiqué de presse annonçant qu'il se ralliait à Mme
Marois, vaincu par «l'importante et rapide récolte d'appuis de Pauline
Marois». Dès lors, M. Duceppe a indiqué vouloir demeurer à la barre du
Bloc, une question soumise dès aujourd'hui au caucus bloquiste.
Retour au discours identitaire
Hier à Longueuil, Pauline Marois a dit avoir pris
acte de la «sévère défaite» infligée à sa formation politique le 26
mars. À ses yeux, le PQ doit saisir l'occasion pour se recentrer, ce
qui, précise-t-elle, ne peut être confondu avec un virage à droite. À
l'inverse, se radicaliser constitue «une recette assurée pour la
marginalisation, pour le suicide», a-t-elle affirmé. Pauline Marois
propose plutôt de tendre vers un État plus efficace.
Le PQ doit mettre le cap sur la prospérité
économique dans une perspective de développement durable, croit-elle.
C'est une «condition essentielle pour faire avancer l'égalité des
chances, pour financer les services publics et bâtir la vraie
solidarité», a soutenu Mme Marois. «Vouloir moderniser l'État n'est pas
anti-social-démocrate et n'est pas en contradiction avec la poursuite
du projet souverainiste», a-t-elle ajouté.
Mme Marois a également teinté son discours de
nationalisme identitaire. Depuis la défaite au référendum de 1995, le
PQ et le Bloc avaient délaissé cette voie pour parler dorénavant de
nationalisme civique. «Les valeurs que nous partageons, toutes origines
confondues, nous les connaissons: nous sommes des francophones avant
tout, solidaires et démocrates, tolérants mais désireux du respect de
notre identité», a déclaré Mme Marois qui a aussi cité la famille comme
le pilier de sa proposition politique.
Cette dernière s'est défendue d'aller sur le terrain
de prédilection de l'Action démocratique du Québec, alors que Mario
Dumont a fait ses choux gras tant du nationalisme découlant des
accommodements raisonnables que des besoins de la famille lors de la
dernière campagne électorale. «Nous ne devenons pas autonomistes à
partir d'aujourd'hui», a précisé Mme Marois.
Les députés Daniel Turp et François Legault se sont
réjouis d'un tel changement de ton. «On s'est éloignés de ce que
veulent les Québécois. Il faut renforcer notre identité», a dit M.
Legault. Ce dernier a dit apprécier la détermination de Pauline Marois
à miser sur une gauche efficace, à l'instar des partis de centre gauche
de l'Occident, qui ne renient pas pour autant leurs valeurs profondes
de justice sociale. «En 2003, on a eu une défaite et on n'a peut-être
pas eu le courage de changer les choses», a-t-il fait remarquer.
Quant à la possibilité que les changements proposés
n'enchantent pas l'aile orthodoxe du PQ, M. Legault a rappelé que
l'objectif n'est pas «de faire l'unanimité, mais le consensus».
L'emballement des partisans présents à ce qui devait
être une conférence de presse et qui s'est transformé en un
rassemblement militant ne trompait personne. Pauline Marois a été
accueillie par quelque 200 personnes qui ont spontanément chanté: «Ma
chère Pauline, c'est à ton tour...»
Puis les nouveaux députés Pierre Curzi et Bernard
Drainville ont fait de courts discours pour présenter la candidature de
Mme Marois. M. Curzi a notamment lu la missive d'appui envoyée par la
présidente du Parti, Monique Richard, ainsi que celle de la députée
Louise Harel.
Le député de Borduas a également souligné qu'il est
maintenant temps que le PQ modifie sa traditionnelle formule de
«sortir, parler et convaincre» pour celle de «sortir, écouter et agir».
De son côté, M. Drainville a affirmé que Mme Marois «va se mettre à
l'écoute des idées nouvelles dont nous avons besoin».
L'époux de Mme Marois, Claude Blanchet, qui a dirigé
la Société générale de financement entre 1997 et 2003, s'est dit très
fier de son retour en politique. «Ça ne prenait qu'une petite
étincelle», a-t-il assuré.
D'ailleurs, Pauline Marois semblait hier portée par
beaucoup de fébrilité. Rien ne semblait l'atteindre. À ceux qui ont
tenté par le passé de réduire ses compétences à animatrice sociale,
elle dont la feuille de route est impressionnante (elle a dirigé
notamment les ministères de l'Éducation, de la Santé, du Trésor et des
Finances), elle a rétorqué avec le sourire que c'est là un rôle
passionnant. Et quand on lui a souligné qu'elle pourrait devenir la
première femme au Québec à être chef de parti, elle a lancé: «C'est un
beau risque.»
Illustration(s) : Les députés péquistes François Legault et Camil
Bouchard ainsi que le député du Bloc québécois Réal Ménard ont
chaudement applaudi à la candidature de Pauline Marois qui a provoqué
hier un véritable engouement. Après une semaine de turbulences au sein
du mouvement souverainiste, l'événement avait des airs de couronnement
avant même que la course à la direction ne débute officiellement.
Catégorie : La Une; Actualités
Sujet(s) uniforme(s) : Partis politiques
Type(s) d'article : Article
Taille : Long, 854 mots
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