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Le Devoir
ÉDITORIAL, mardi 17 octobre 2006, p. a6
Oui, mais...
Truffaut, Serge
La résolution adoptée à l'unanimité par les membres du Conseil de sécurité afin d'imposer des sanctions à la Corée du Nord pour son essai nucléaire a déjà accouché d'une scission. En effet, l'encre du document n'était pas encore sèche que les représentants de la Chine et de la Corée du Sud confiaient être réticents à effectuer l'inspection des navires nord-coréens ainsi que le commande le texte de l'ONU.
Cette volte-face est à mettre sur le compte d'une peur. La Chine et la Corée du Sud craignent qu'un examen des marchandises transportées par un cargo nord-coréen en eaux internationales ne soit perçu par les autorités nord-coréennes comme une violation de sa souveraineté. Et qu'elles optent de fait pour une réaction militaire.
Or cela, la Chine et la Corée du Sud veulent l'éviter à tout prix. La première parce qu'en paraphant un traité d'amitié en 1961 elle s'est engagée à se ranger aux côtés de la Corée du Nord en cas de conflit. La deuxième parce que, forte d'un million de soldats, l'armée de Kim Jong-il serait en mesure, même si son arsenal est vieillissant, de faire beaucoup de dégâts à Séoul et dans les environs.
De fait, si Pékin et Séoul vont s'atteler comme les autres pays au respect d'un certain nombre d'articles de la résolution, ils entendent agir de manière à convaincre leur imprévisible voisin de retourner à la table des négociations, soit le groupe des six (les deux Corées, la Chine, la Russie, les États-Unis et le Japon). En clair, la nouvelle résolution ajoutera peu de pressions à celles découlant des résolutions antérieures.
Cela étant, si la Chine a été particulièrement agacée par l'essai nucléaire et par le comportement adopté par son protégé - Kim Jong-il a averti Pékin vingt minutes seulement avant l'explosion -, elle ne veut pas emprunter une route qui déboucherait à court ou à moyen terme sur un changement de régime. Pour l'heure, il semble que les dirigeants chinois préfèrent le maintien du régime tel qu'il est, car il a ceci de commode, à leurs yeux, qu'il limite l'influence qu'ont les États-Unis dans cette région du monde.
Mais en votant cette résolution, la Chine a clairement démontré que le soutien indéfectible à la Corée du Nord qu'elle a témoigné depuis des lunes était chose du passé. De la position affichée par Pékin au Conseil de sécurité, on peut avancer qu'un autre essai ne serait pas toléré. Si Kim Jong-il appuyait une fois encore sur le bouton, il est vraisemblable que Pékin envisagerait un changement de régime.
Catégorie : Éditorial et opinions
Sujet(s) uniforme(s) : Politique extérieure et relations internationales
Type(s) d'article : Article
Taille : Moyen, 304 mots
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Doc. : news·20061017·LE·120600