MONDE-HISTOIRE-CULTURE GÉNÉRALE
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
MONDE-HISTOIRE-CULTURE GÉNÉRALE

Vues Du Monde : ce Forum MONDE-HISTOIRE-CULTURE GÉNÉRALE est lieu d'échange, d'apprentissage et d'ouverture sur le monde.IL EXISTE MILLE MANIÈRES DE MENTIR, MAIS UNE SEULE DE DIRE LA VÉRITÉ.
 
AccueilAccueil  PortailPortail  GalerieGalerie  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  Connexion  
Derniers sujets
Marque-page social
Marque-page social reddit      

Conservez et partagez l'adresse de MONDE-HISTOIRE-CULTURE GÉNÉRALE sur votre site de social bookmarking
QUOI DE NEUF SUR NOTRE PLANETE
LA FRANCE NON RECONNAISSANTE
Ephémerides
-29%
Le deal à ne pas rater :
PC portable – MEDION 15,6″ FHD Intel i7 – 16 Go / 512Go (CDAV : ...
499.99 € 699.99 €
Voir le deal

 

 l’Economie de la traite des esclaves

Aller en bas 
AuteurMessage
mihou
Rang: Administrateur
mihou


Nombre de messages : 8092
Localisation : Washington D.C.
Date d'inscription : 28/05/2005

l’Economie de la traite des esclaves Empty
02062005
Messagel’Economie de la traite des esclaves

l’Economie de la traite des esclaves

Source:grioo.com
Par Fleur du Kasai

Esclaves employés à l’extraction des diamants, Minas Gerais, Brésil, 1812.

Chap. I. "De l’esclavage des Nègres"

Contrairement à ce que l’histoire de la traite et de l’esclavage laisse à penser, le trafic négrier et l’asservissement des peuples noirs ont été des opportunités et des enjeux économiques avant de devenir des systèmes de pensée. Autrement dit, ce n’est pas le racisme qui a provoqué l’esclavage et la traite, mais c’est la mise en place d’un système économique lucratif, qui a entraîné la déshumanisation d’une catégorie d’hommes et leur réduction au rang d’objets. Les Africains sont devenus des " Nègres" parce que les Européens voulaient des esclaves, et ensuite ils sont devenus des esclaves parce qu’ils étaient des " Nègres ". L’exploitation d’hommes par d’autres hommes a nécessité, après coup, la construction d’un système de représentations qui permettait sa justification morale et formelle.

Afin qu’il existe des maîtres et des esclaves, il a fallu démontrer la supériorité et l’infériorité " naturelles " des uns et des autres, en leur conférant un cadre symbolique ( la race) et institutionnel (la traite négrière et l’esclavage) La " race noire " était un prétexte, une invention qui a servi à légitimer la traite, l’esclavage puis le colonialisme. Elle a été façonnée et définie au fil des siècles, à partir de théories et de justifications religieuses, philosophiques, scientistes, sociales, politiques, juridiques et économiques. Elle est devenue à ce point indissociable de la représentation biologique, morale et hiérarchique des individus, qu’elle a survécu aux institutions qui lui ont donné naissance, qu’elle a traversé les siècles et les générations, et reste vive dans notre inconscient collectif. La traite négrière puis l’esclavage, ont permis à la civilisation occidentale, celle de l’Europe et celle des Amériques, d’établir une corrélation, une causalité, mieux, une confusion, entre la couleur des Noirs et la condition servile. Elle a bâti ses intérêts et abrité sa conscience derrière un postulat simple, érigé en "loi naturelle ": Le Nègre ne peut être autre chose qu’un esclave, et un esclave ne peut être autre chose qu’un Nègre.

L’alibi théologique. 1550-1551. La controverse de Valladolid fait rage. Le moine dominicain Bartholomé de Las Casas plaide devant les représentants du Saint-siège la cause des Indiens, et dénonce les atrocités que leur infligent conquistadors et colons espagnols. Pour les gouvernants et les hommes d’église, l’enjeu de ce débat est moins de déterminer si les Indiens ont une âme ou non, mais bien d’assurer aux colons une main-d’œuvre pour leurs plantations et leurs mines.

Africae nova descriptio. - W. & J. Blaeu, ca.1634-1664.

Le moine dominicain propose alors de substituer l’asservissement des Indiens par l’esclavage des Nègres, qu’il juge inférieurs aux autochtones des Amériques, et dont il vante : « l’ incroyable robustesse ». Bartholomé de Las Casas est considéré par la plupart des historiens, comme celui qui a " signé " l’arrêt officiel de déportation massive des Africains vers le Nouveau monde, à une époque où ce phénomène était encore marginal. De fait, pour l’Eglise et la Papauté, la traite et l’esclavage des Nègres n’avaient au départ d’autre motivation que les profits économiques liés à la découverte et à l’exploitation du Nouveau monde.

C’est seulement par la suite que le discours théologique va prendre forme, pour " bénir " et légitimer le commerce et la servitude des Nègres. Il va essentiellement s’appuyer sur le récit biblique de la malédiction de la descendance de Cham, père de Canaan, fils de Noé, qui vit la nudité de son père, et pour ce, fut condamné à être : « pour ses frères, le dernier des esclaves ». Le "noircissement ", au propre comme au figuré, de la descendance de Cham dans le langage ecclésiastique, avait commencé dès l’époque gréco-romaine. Les exégèses bibliques, par une logique " impénétrable ", déplacèrent Canaan de la Palestine pour situer la lignée de Cham au-delà de l’Egypte, dans une région dont la caractère lointain et totalement inconnu, enflammait l’imagination et suscitait terreurs et délires de toutes sortes. Les Européens débarquèrent donc sur les côtes africaines, précédés par ces fantasmes, que l’Eglise romaine apostolique, Anglicane, puis l’ensemble des mouvements protestants, achevèrent d’ériger en vérité. Vérité qu’ils prêchèrent inlassablement, en justifiant l’esclavage par la malédiction, et en accomplissant cette malédiction (c’est-à-dire la volonté de Dieu) par l’esclavage. La malédiction de Cham devint donc l’argument fondamental de tous les esclavagistes.

La désinvolture philosophique. Que penser du silence et de l’insouciance quasi-générale des grands penseurs du " siècle des lumières ", chantres d’un nouvel humanisme "universel ", face à la question et à la pratique de l’esclavage ? Que pour eux aussi, la raison économique primait sur le principe d’humanité, et que surtout, ce principe ne s’appliquait pas aux Nègres. L’ambiguïté du discours des philosophes français pourrait se résumer ainsi: L’esclavage est un mal nécessaire. C’est une institution barbare, mais elle est juste pour certains hommes.

Montesquieu, dans L’esprit des lois, est certainement celui qui illustre le mieux ce double langage. Il décrète que l’esclavage est inadmissible dans les sociétés européennes :« Inutilité de l’esclavage parmi nous » ; mais qu’il est justifié pour d’autres sociétés : « Il faut borner la servitude naturelle à certains pays particuliers de la terre », « Il y a des pays où la chaleur énerve le corps et affaiblit si fort le courage que les hommes ne sont portés à un devoir pénible que par la crainte du châtiment : l’esclavage y choque donc moins la raison ».

Armoiries de la Compagnie des Indes Occidentales, 1664

Le philosophe fonde l’esclavage sur la raison économique : « le sucre coûterait très cher si on ne faisait pas travailler des esclaves dans les plantations ». Et dans le souci de mettre en accord le droit avec la raison économique, il énumère les conditions dans lesquelles il est permis au maître d’ôter la vie à l’esclave. Ultime argument : « ces individus sont noirs, des pieds à la tête, et ils ont le nez tellement écrasé qu’il est presque impossible de les plaindre ».

La preuve scientifique. La science a longtemps hésité avant de retirer les Nègres de la catégorie des bêtes, pour les replacer dans celle des hommes, mais avec toutefois, fort nuances et restrictions. Dès sa genèse, le concept de " races humaines " s’est construit autour de la notion de hiérarchie. Il est apparu à la fin du 17ième siècle, mais c’est au 18ième siècle que le premier grand " classement " et les principaux schémas sur lesquels s’appuieront toutes les théories raciales, seront élaborés par le médecin et botaniste suédois Charles Linné, qui publie en 1735, un Systema Naturae qui aura un immense retentissement. L’humanité y est subdivisée en 4 grands groupes différenciés, appelés " type ", établis selon des critères où se mêlent inextricablement, caractères physiques et moraux, us et coutumes.

L’Africain y est décrit comme : « Noir, indolent, de mœurs dissolues ; cheveux noirs crépues ; peau huileuse ; nez simien ; lèvres grosses ; femmes ont le repli de la pudeur, des mamelles pendantes ; vagabond, paresseux, négligent ; s’enduit de graisse ; est régi par l’arbitraire. » Par contre l’homme de race blanche est : « Blanc, sanguin, ardent, cheveux blonds, abondants ; yeux bleus ; léger, fin, ingénieux ; porte des vêtements étroits ; est régi par les lois. » Ces théories racialistes s’inscrivent dans un contexte d’exploration, de conquête et de colonisation du monde par la civilisation occidentale. Elles ont pour ambitions de trouver une cause " naturelle " à la supériorité des Blancs, donc une cause tout aussi naturelle à l’infériorité des autres peuples. Les traités sur la hiérarchie des races, parmi lesquels se trouve le célèbre Essai sur l’inégalité des races humaines du comte Joseph-Arthur de Gobineau, vont se multiplier comme des petits pains au 18ième et 19ième siècle, apportant de l’eau au moulin intarissable des défenseurs de la traite et de l’esclavage.

Pont arrière du bateau négrier anglais "le wildfire", 1860

La raison politique. La traite et l’esclavage se sont imposés et ont perduré pour des raisons économiques. Ils étaient étroitement liés à la course pour la colonisation du Nouveau monde, que se livraient entre-elles les nations européennes. Le commerce négrier a toujours été réglementé par les gouvernants, car il était un monopole royal. Les gouvernements européens faisaient sous-traiter ce commerce par des entreprises de transport et commerce maritimes, privés pour la plupart, dont la célèbre Compagnie française des Indes occidentales, la Compagnie du Sénégal et la Compagnie de Guinée, qui décrocha pour la France en 1701, l’exclusivité de l’Asiento espagnol. L’Asiento était un " contrat d’utilité publique ", une licence accordée par les Rois d’Espagne, qui fixait la déportation aux Amériques, d’un nombre déterminé de Nègres pendant un certain nombre d’années.

L’Asiento Gaverrod, accordé à un financier flamand, marque le début de la sous-traitance à grande échelle, car le roi Charles Quint passe commande de 4 000 Nègres pour ses colonies. Les contrats et leurs comptabilités portaient sur du bois d’ébène, des pièces d’Inde ou plus ouvertement, des Têtes de nègres. Les gouvernements européens, soucieux de faciliter le troc négrier, consentaient à ces compagnies des abattements allant jusqu’à 50% sur les taxes, si les marchandises avaient pour origine le commerce d’esclaves. Ce qui ne constituait en rien une perte, car le trafic négrier était tellement rentable, à court et à long terme, que tous les protagonistes de ce commerce, dont une majorité d’actionnaires de la noblesse, de la grande et de la petite bourgeoisie européenne, étaient assurés d’avoir leur part du gâteau.

La logique économique à l’œuvre durant près de 4 siècles (le dernier bateau négrier est arrivé à Cuba en 1873), a arraché des dizaines de millions de personnes, dont au moins un quart ont péri au cours de la persécution et la réclusion de la traversée maritime. En réalité nous ne connaîtrons certainement jamais l’étendue du massacre. Mais pour les Africains qui y ont survécu, la traversée de Kalunga ( le grand océan), n’a été que la première étape de leur descente aux enfers.

Gravure publicitaire d’une compagnie de tabac, Virginie, Sud des Etats unis,18ième siècle.
Revenir en haut Aller en bas
https://vuesdumonde.forumactif.com/
Partager cet article sur : reddit

l’Economie de la traite des esclaves :: Commentaires

Aucun commentaire.
 

l’Economie de la traite des esclaves

Revenir en haut 

Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
MONDE-HISTOIRE-CULTURE GÉNÉRALE :: HISTOIRE-HISTORY :: TRAITE NEGRIERE-
Sauter vers: