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 COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)

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mihou
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mihou


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19062007
MessageCOURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)

COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)

Lundi 18/06/07
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______________________________

Dans ce numéro :

1.- LE G8 EST ILLEGITIME ET IRRESPONSABLE
par Attac France

2. – LE CONTRE SOMMET AFRICAIN DU G8 :
DECLARATION FINALE DU FORUM DE
SIKASSO 2007

3.- L’USINE A GAZ SARKOZY
par Michel Husson, Conseil scientifique d’Attac
France.
Article paru dans l’Ecole Emancipée

4.- ET SI ON PARLAIT DU MINISTERE DU
CO-DEVELOPPEMENT ?
Par Lucile Daumas, Attac Maroc

5.- LE MOUVEMENT SOCIAL EN RUSSIE
par Denis Paillard, Commission International
d’Attac France, Messager
syndical - Russie

6.- REVEIL SYNDICAL EN RUSSIE
par Carine Clément, Commission International
d’Attac France, sociologue,
directeur de l’Institut de l’Action Collective
(http://www.ikd.ru)
membre du Comité de travail du réseau Union des
Conseils de Coordination
de Russie - SKS)

7.- MALGRE LES MOUCHARDS ET LES GENDARMES... LA
COMMUNE D’OAXACA N’EST
PAS MORTE !
par Nadine Floury, membre d’Attac France
______________________________

1.- LE G8 EST ILLÉGITIME ET IRRESPONSABLE
______________________________

Le G8 s’est tenu cette année à Heiligendamm, en
Allemagne. La déclaration
officielle se concentre sur la stabilité du
marché mondial, le
développement de l’Afrique, la lutte contre le
réchauffement climatique.
Une fois encore, la déclaration de Heiligendamm
est un nouveau et
lancinant plaidoyer irresponsable en faveur de
l’économie néolibérale
financiarisée, comme seule solution possible à
tous nos maux. Durant le
sommet, nous étions des dizaines de milliers sur
place, à faire
connaître pacifiquement leur illégitimité aux
huit « maîtres du monde ».

G8 2007,
toujours les mêmes mensonges

Les fonds spéculatifs encensés
Les pays du G8, par leur soutien constant depuis
les années 80 à
l’émergence d’un capitalisme financier sans
frontière et à un commerce
mondial sans autre règle que celle de la
concurrence, par leur laxisme
face aux paradis fiscaux, sont les premiers
responsables de
l’instabilité chronique du système économique
mondial actuel et des
crises financières toujours plus graves que nous
connaissons. Malgré ce
bilan désastreux, les huit pays les plus
puissants du monde se sont
félicités de l’état de l’économie mondiale, et
notamment du rôle positif
des fonds spéculatifs pour la croissance des
marchés mondiaux !
Attac s’est engagée depuis sa naissance dans la
lutte contre
l’irrationalité et la brutalité des marchés
financiers internationaux.
Nous demandons la suppression des paradis
fiscaux, la mise en place de
taxes globales sur les profits des
multinationales et sur les
transactions financières.

Afrique : toujours des promesses sans lendemain

Le G8 se fend une fois de plus d’une promesse
pour l’Afrique qui ne coûte
pas grand-chose. Le doublement de l’aide au
développement d’ici 2010,
promis à Gleneagles en 2005, a été répété, mais
les derniers chiffres
publiés sont catastrophiques : selon l’OCDE et la
Banque mondiale,
l’aide à l’Afrique hors remises de dettes a
baissé en 2006. D’autre
part, les 60 milliards de dollars promis à terme,
sans échéancier
précis, afin de lutter contre le sida, la
tuberculose et la malaria, ont
pour partie déjà été annoncés au cours des
derniers mois, il n’y a donc
là pas grand-chose de nouveau. Surtout, tout en
reformulant ces mêmes
promesses jamais tenues sur des fonds de luttes
contre les grandes
pandémies, les dirigeants du G8 se prononçaient
pour une plus grande
protection de la propriété intellectuelle ! De
telles exigences
augmenteront la protection des brevets des
médicaments, et réduiront la
capacité des pays émergents à se fournir en
traitements à tarifs
abordables. Les pays du Sud doivent avoir la
liberté de choisir leur
propre mode de développement ; le néocolonialisme
qui sert encore
aujourd’hui le développement des pays riches doit
cesser.
Attac demande :

- l’annulation globale de la dette des pays du
Sud;
- la restitution des fonds détournés par les
régimes corrompus et les
multinationales occidentales;
- l’abandon des plans d’ajustement structurel qui
sont un instrument de
pillage des pays du Sud;
- la suppression des subventions occidentales aux
exportations vers ces
pays;
- la création d’un programme mondial pour lutter
contre la pandémie du
sida et les maladies tropicales ; ce programme,
géré par l’Organisation
mondiale de la santé (OMS), doit être financé par
une taxe spécifique
sur les industries pharmaceutiques.

Réchauffement climatique : le déni de la gravité
de la crise
Sur le réchauffement climatique, le G8 a tenté de
sauver la face avec un
accord a minima qui est très loin du compte. Les
pays du G8 se sont
engagés à réduire leurs émissions des gaz à effet
de serre d’ici 2050 et
à envisager que, peut-être, elles soient un jour
divisées par deux.
C’est un engagement qui précisément n’engage à
rien ! Par ailleurs, la
référence à une division par deux des émissions
est irresponsable et
symbolique d’un déni du réel. Tous les experts
internationaux pointent
la nécessité pour les pays riches d’une division
par quatre de leurs
émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. La
lutte contre le
réchauffement climatique et la crise écologique
que nous traversons
impliquent une réelle mise en cause du mode de
vie occidental car il est
impossible de faire adopter celui-ci à l’ensemble
de la planète. Attac
demande la mise en place immédiate de taxes
écologiques globales sur les
émissions polluantes, y compris sur les
transports. Attac demande une
initiative internationale pour diviser par quatre
d’ici 2050 la
consommation d’énergies fossiles dans les pays
développés.

Cette déclaration du G8, comme les précédentes,
montre l’irresponsabilité
de ses membres, et plus que jamais leur
illégitimité à diriger les
affaires du monde.
Sommaire Ce G8 doit être le dernier !

Attac demande la suppression du G8. Attac prône
une réforme radicale de
la régulation internationale autour de l’ONU et
des textes fondamentaux
dont elle est garante (Déclaration universelle
des droits de l’homme,
Charte des Nations unies, conventions de
l’Organisation internationale
du travail... ).

par Attac France

______________________________

2. – LE CONTRE SOMMET AFRICAIN DU G8 :
DECLARATION FINALE DU FORUM DE
SIKASSO 2007
______________________________

La 6ème édition du Forum des peuples s’est réunie
cette année à Sikasso,
au Mali. Le Forum des peuples se tient en
contrepoint du G8, chaque
année depuis 2002. Partie prenante du Forum
social mondial, il réunit
des acteurs altermondialistes, associatifs et
syndicaux, africains et
d’autres continents. Plus d’informations sur :
http://www.forumdespeuples.org/

Nous, représentants des différentes composantes
de la société civile et
des mouvements sociaux des pays d’Afrique (Bénin,
Burkina,
Côte-d’Ivoire, Mali), d’Europe (Belgique, France,
Royaume-Uni, Italie),
d’Amérique (Canada) réunis à Sikasso du 04 au 07
juin 2007 à la 6ème
édition du Forum des Peuples, avons procédé à de
larges débats
démocratiques sur les questions fondamentales qui
préoccupent l’ensemble
des Peuples du monde (Dette, Accords de
Partenariat Economique UE-ACP,
Souveraineté alimentaire, Pauvreté, Accès à
l’eau, Réchauffement
climatique...) A l’issue des débats, le constat
général est scandaleux :

Le G8, ce directoire mondial illégitime a
démontré à la face du monde son
incapacité notoire à tenir ses promesses d’aide
aux pays les plus
pauvres et à résoudre cette crise structurelle de
l’endettement dont il
est le principal responsable. En 2005 son
engagement en faveur des pays
pauvres avait permis l’annulation d’un montant
dérisoire de 39 milliards
de dollars Us de dette pour les Pays d’Afrique et
d’Amérique Latine.
Aujourd’hui les dettes que ces mêmes pays doivent
rembourser s’élèvent
pour l’Afrique à 215 Milliards de dollars Us et
pour l’Amérique Latine à
723,6 milliards de dollars Us . Selon Oxfam
Grande-Bretagne, les pays
les plus pauvres du monde doivent continuer à
payer 100 millions de
dollars Us chaque jour !

C’est dans ce contexte que s’est ouvert à
Heiligendamm (Allemagne) le
sommet du G8. L’agenda officiel porte sur la
stabilité du marché
mondial, le développement de l’Afrique, la lutte
contre le réchauffement
climatique et l’approvisionnement énergétique.
Malheureusement, les
réponses apportées à ces questions par les
dirigeants des pays riches
ressemblent à un aveu d’échec, d’hypocrisie et
d’irresponsabilité Les
mesures prises ces dernières années n’ont été que
des opérations d’effet
d’annonce doublé de mépris profond pour les
souffrances de nos peuples.

De l’initiative renforcée en faveur des pays
pauvres très endettés de
Cologne (Allemagne) en 1999, aux engagements
multilatéraux de Gleneagle
(Royaume Uni) en 2005, la situation n’a pas
évolué. Pour preuve : en
2005 les transferts nets de capitaux du Sud vers
le Nord étaient de 354
milliards de dollars Us et parallèlement, l’aide
au développement des
pays du G8 est en baisse depuis 2006, pendant que
le montant de la dette
culmine à un niveau hallucinant de 2 800
milliards de dollars Us !

Sous le couvert de la lutte contre le
réchauffement climatique, les
puissances du G8 étalent leur nature prédatrice,
inhumaine,
irresponsable et hégémonique, se livrant à une
compétition effrénée pour
le contrôle des matières premières et des
ressources en hydrocarbure à
l’exemple de la guerre en Irak, du chantage au
gaz de la Russie...

Le Forum des Peuples réaffirme l’illégitimité du
G8 et condamne fermement
la répression des militants altermondialistes par
les forces de l’ordre
allemandes.

Au Mali, cette sixième édition du Forum des
Peuples intervient dans un
contexte de crise généralisée marquée par le
recul du service public
avec la liquidation complète des derniers
secteurs stratégiques (CMDT,
HUICOMA et le chemin de fer).

Les conséquences de ces privatisations se font
durement sentir à travers
les licenciements massifs des travailleurs,
l’exacerbation de la
pauvreté et de la misère. A cela il faut ajouter
l’absence d’un contrôle
démocratique et transparent sur les ressources
stratégiques du Mali
notamment l’or, l’introduction forcée des OGM
dans l’agriculture,
l’application programmée des Accords de
Partenariat Economique entre
l’Union Européenne et les Pays ACP,
l’introduction de nouveaux accords
sur l’immigration. Ces nouveaux accords sur
l’immigration transforment
le Mali comme ceux des autres pays voisins et du
pourtour méditerranéen
en simple gendarme chargé d’appliquer avec zèle
des mesures d’expulsion
arbitraires et illégales des pays de l’Union
Européenne en violation
flagrante de toutes les conventions
internationales relatives aux droits
humains et à la libre circulation des personnes
et des biens.

Les participants au Forum des Peuples exigent une
fois de plus :

- L’annulation totale et inconditionnelle de la
dette extérieure des Pays
du Tiers-monde qui s’élève selon le rapport 2007
de la Banque Mondiale à
2800 milliards de dollar.

- La suppression du Fond Monétaire international
et de la Banque Mondiale
instruments de promotion et de renforcement de
l’idéologie néolibérale
et leur remplacement par la Banque du Sud qui
regroupera tous les pays
en voie de développement et les pays émergents
afin de poser les bases
d’un développement durable fondé sur des
relations économiques
complémentaires et justes entre les Etats.

- La transparence et le contrôle des flux
financiers par des taxes
globales et la restitution des fonds détournés
par les multinationales
occidentales et les régimes corrompus.

- La suppression des subventions agricoles aux
exportations vers les pays
du sud et la reconnaissance du droit de ces pays
à l’autosuffisance et à
la sécurité alimentaire.

- La suppression des visas de court séjour, de
toutes les entraves posées
à la sortie d’un territoire, et la justification
détaillée et contrôlée
de refus de visas d’établissement avec une
stricte symétrie des
conditions africaines et européennes de
délivrance de ce type de visas.

- La fermeture de tous les lieux d’enfermement et
autres dispositifs de
blocage des personnes aux frontières.

- L’abolition de toutes les mesures faisant
obstacle au regroupement
familial

- La régularisation totale et inconditionnelle de
tous les sans-papiers
en France et dans les autres pays de l’espace
Schengen.

Les participants au Forum des peuples
recommandent :

- La création d’une banque agricole autogérée par
les paysans

- La diversification du matériel agricole selon
les zones agro écologiques

- Une réforme des titres de propriété foncière

- L’encouragement de l’utilisation de l’engrais
organique abandonné au
profit des engrais chimiques.

- L’encouragement de la consommation des produits
locaux

- La protection de nos produits agricoles contre
la concurrence
internationale

- Le rejet systématique des APE et des OGM

- L’ouverture d’un débât national sur la loi
d’orientation agricole en
dehors des structures institutionnelles avec
l’implication du Conseil
supérieur de l’agriculture.

Fait à Sikasso le 07 juin 2007

Les Participants du Forum
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COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571) :: Commentaires

mihou
Re: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)
Message Mar 19 Juin - 12:30 par mihou
______________________________

3.- L’USINE À GAZ SARKOZY
______________________________



La victoire de Nicolas Sarkozy marque le passage
d’une stratégie par
étapes à une stratégie frontale qui s’organise
autour de deux
orientations majeures : flexibilisation intégrale
du marché du travail
et amaigrissement de l’Etat. Tous les aspects du
modèle social sont
concernés par cette thérapie de choc : durée du
travail, fiscalité,
école et universités, retraites, financement de
la Sécurité sociale,
non-remplacement des fonctionnaires, budget,
services publics. Cette
stratégie de rupture pose deux questions. La
première, à laquelle notre
nouveau Président semble très attentif, est celle
de l’habillage
politique. La seconde, à laquelle il attache
apparemment moins
d’importance, est celle de l’efficacité
économique. C’est dans
l’articulation de ces deux questions que se
jouera la trajectoire du
nouveau pouvoir.

Trois axes tactiques

Si la stratégie est bien celle de l’affrontement
direct et global, elle
implique néanmoins un certain nombre de choix
tactiques : dans quel
ordre prendre les choses, et à quel rythme ? De
ce point de vue, on peut
d’ores et déjà discerner trois parcours fléchés.
Le premier axe conduit
des heures supplémentaires au nouveau contrat de
travail. Sur la base
des premières mesures, on établit un rapport de
forces social et
idéologique en imposant l’idée que pour gagner
plus, il faut travailler
plus. L’aspect idéologique est décisif, puisqu’il
s’agit d’installer à
une échelle de masse la conviction que les
obstacles à l’emploi
proviennent des réglementations trop rigides :
les 35 heures dans le cas
du salaire, les protections liées aux contrats de
travail actuels en ce
qui concerne l’emploi. Il s’agit d’effacer la
défaite du CPE et de
profiter de la période de grâce, durant laquelle
les acteurs sociaux et
les citoyens en général vont demeurer dans une
attitude d’expectative
tétanisée.

Le second axe passe par une défaite infligée sur
la question du service
minimum, et c’est pourquoi ce dossier est l’un
des premiers à être
ouvert. Son champ d’application recouvre en effet
celui des régimes
spéciaux de retraites. Une fois le droit de grève
limité dans ces
secteurs, il sera possible de pousser l’avantage
et de faire sauter ce
verrou. Le terrain sera alors déblayé pour le
rendez-vous prévu en 2008
par la loi Fillon qui permettra, dans la foulée,
de reculer à nouveau
l’âge de la retraite et de transformer
profondément le financement de la
protection sociale en instaurant une TVA sociale.

Le troisième axe concerne le budget de l’Etat. La
première étape a
consisté en un paquet fiscal essentiellement
destiné aux riches. Il
représente environ 9 milliards d’euros (15 avec
les heures
supplémentaires) et va donc creuser le déficit,
comme s’en inquiètent
déjà les orthodoxes de Bruxelles. Mais il ne
s’agit évidemment pas d’une
conversion à une politique de relance. Le
gouvernement met ici en oeuvre
une tactique de déséquilibre fiscal dont les
libéraux sont coutumiers ;
elle consiste à engendrer un déficit pour mieux
justifier ensuite des
mesures d’ajustement. Celles-ci pourraient
prendre une double forme : de
nouvelles économies budgétaires, avec notamment
le demi-remplacement des
départs à la retraite dans la Fonction publique,
et le recours à la TVA,
« sociale » ou non.

Une légitimité transitoire

Ce projet, qui implique une régression sociale
pour la majorité de la
population, n’a pu devenir majoritaire qu’en
raison de l’inanité des
alternatives à gauche. Du côté du PS et/ou de
Ségolène Royal, les
propositions avancées n’ont jamais tranché de
manière suffisamment nette
avec celles de Sarkozy, parce qu’elles
acceptaient les mêmes
considérants, par exemple le besoin de
compétitivité et d’aides aux
entreprises, sans parler de « l’ordre juste ». Du
côté de la gauche dite
anti-libérale, une cohérence alternative existait
sur le papier, mais
qui n’a pas accédé à une consistance politique,
faute d’expression
unitaire.

Dès lors que la contradiction sociale principale,
entre capital et
travail, était évacuée du débat, la droite a
cherché, et réussi en
grande partie, à activer les contradictions
secondaires, « au sein du
peuple » comme aurait dit Mao : ceux qui se
lèvent tôt contre les
assistés, Français de souche contre immigrés
dépourvus d’identité
nationale, salariés du privé contre
fonctionnaires.

Cette substitution des rivalités catégorielles
aux oppositions sociales
est le ressort essentiel sur lequel le
gouvernement compte pour faire
passer son amère pilule. En même temps, il
n’oublie pas - selon un autre
dispositif libéral classique - de ménager des «
filets de sécurité »
pour les plus défavorisés, afin de masquer
l’ampleur de la régression.
Le revenu de solidarité active confié à Martin
Hirsch devrait constituer
le volet social du programme, et on comprend
mieux de ce point de vue la
fonction de l’« ouverture ». Dans le même ordre
d’idée, le programme de
Sarkozy prévoit d’augmenter le minimum vieillesse
en finançant cette
augmentation par une partie des économies
réalisées sur les régimes
spéciaux. On retrouve ici la démarche consistant
à construire le rapport
de forces sur la fragmentation du camp des
salariés, de manière à
retarder la prise de conscience du caractère
global de l’offensive et
éloigner la menace d’un nouveau « tous ensemble
».

Mais cela suppose que des améliorations soient
perçues en matière de
pouvoir d’achat et d’emploi. Pendant quelques
mois, le gouvernement peut
compter sur une conjoncture plus favorable et sur
le coup de pouce au
pouvoir d’achat des 15 % de salariés qui
effectuent des heures
supplémentaires. Si l’emploi repart, le
gouvernement s’efforcera de
montrer que c’est grâce à ses premières mesures,
justifiant ainsi celles
qui suivent. Mais tout est ici une affaire de
timing : il faut qu’une
amélioration plus durable prenne la suite des
expédients conjoncturels.

De ce point de vue, le programme de Sarkozy ne
tient pas la route. Les
baisses d’impôts sont ciblées sur les couches
sociales les plus
favorisées, et risquent donc de nourrir leur
épargne plutôt que leur
consommation. Les heures supplémentaires seront
mieux payées mais les
employeurs embaucheront moins et freineront la
progression des salaires
en reprenant à leur compte le slogan connu : si
vous voulez gagner plus,
vous n’avez qu’à faire des heures
supplémentaires. La progression de la
masse salariale globale ne pourra donc soutenir
la croissance que de
manière transitoire. Sur la question pourtant
centrale de l’emploi, l’un
des tours de passe-passe les plus réussis de la
part de Sarkozy est
d’avoir annoncé un objectif de 5 % de chômage
(baptisé plein-emploi)
sans dire quelles mesures pourraient y conduire.
De la même manière, il
n’y a rien sur la question de la compétitivité,
non pas celle qui est
fondée sur la « modération » des coûts salariaux
mais celle qui s’appuie
sur la recherche, l’innovation et une meilleure
spécialisation. Dans ces
conditions, les grands groupes basés en France
continueront à investir
principalement à l’étranger, tout en engrangeant
des bénéfices encore
accrus.

Les contradictions du projet

En réalité, et même d’un point de vue libéral, le
projet sarkozyste est
sur le plan économique une gigantesque usine à
gaz qui repose sur une
équation impossible : comment financer ce
programme sans faire exploser
le déficit ? On se rappelle la promesse de
Sarkozy de baisser de 4
points de PIB le taux de prélèvements
obligatoires (impôts et
cotisations), ce qui représentait un manque à
gagner d’environ 65
milliards d’euros. Cette annonce a été mise sous
le boisseau après les
protestations de caciques de l’UMP, mais elle est
symbolique du
dogmatisme libéral qui s’appuie sur une vision
fantasmatique de
l’économie. Sarkozy s’est convaincu lui-même que
ses mesures vont
libérer par magie des forces vives jusque là
contenues par les rigidités
et les réglementations. Il n’est pas anodin que
cette confiance aveugle
ait été critiquée par des économistes comme
Olivier Blanchard, qui avait
pourtant ouvertement soutenu la candidature de
Sarkozy, ou par un
journaliste bien libéral comme Eric Le Boucher
qui va jusqu’à écrire
dans Le Monde du 3 juin dernier que les promesses
« non tenables » de
Sarkozy sont « populistes, ouvriéristes,
faussement volontaristes et
infinançables ».

C’est sans doute autour de la question de la TVA
que les illusions vont
s’effriter, sans doute plus tôt que prévu. Il
s’agit en effet d’une
mesure qui touche tout le monde, et qui ne peut
donc jouer sur les
différenciations catégorielles. L’instauration
d’une TVA sociale
montrerait de manière très claire l’essence du
projet : faire payer par
tous les cadeaux faits à un petit nombre. L’autre
point de bascule
pourrait être la question salariale. Les salariés
qui font des heures
supplémentaires gagneront plus. Mais elles ne
représentent qu’environ 3
% du volume total d’heures travaillées. Quid des
salariés qui n’y ont
pas accès ? Quid des heures supplémentaires non
déclarées ? L’avantage
de la mesure est d’individualiser encore un peu
plus les salaires, mais
elle risque de produire le résultat inverse et de
faire renaître un
besoin de cadre salarial collectif.
On aurait donc tort de surestimer la cohérence
durable du programme de
Sarkozy. Sur le plan économique, il peut booster
un peu la croissance
dans un premier temps mais viendra vite buter sur
cette contradiction :
ou bien laisser filer le budget, ou bien le
rééquilibrer en freinant
trop brutalement l’activité. Sur le plan social,
il équivaut à un énorme
transfert de richesses des salariés vers les
possédants, que l’on ne
pourra déguiser durablement en jouant sur le
fractionnement du salariat.
Tôt ou tard, les salariés prendront conscience
que leur pouvoir d’achat
est gelé, que leur santé coûte plus cher, que
leurs retraites vont être
à nouveau rognées, et que les garanties apportées
par leur contrat de
travail sont profondément écornées. Sur le plan
tactique, il arrivera
assez vite un moment où il faudra faire passer en
même temps des mesures
étroitement imbriquées (par exemple heures
supplémentaires et TVA
sociale) et rendre perceptible la logique
d’ensemble du projet. Certes,
on peut imaginer un scénario où le passage en
force réussirait,
débouchant sur un paysage social durablement
dégradé. Mais un scénario
de crise, mêlant résistance sociale et débâcle
économique, est également
plausible. En tout état de cause, la tâche
prioritaire du syndicalisme
est aujourd’hui de décortiquer minutieusement les
projets
gouvernementaux pour en montrer les effets
sociaux désastreux. C’est la
condition pour construire les nécessaires
mobilisations et (à terme)
refonder une alternative cohérente au dogme
néo-libéral.

par Michel Husson, Conseil scientifique d’Attac
France.
Article paru dans l’Ecole Emancipée
mihou
Re: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)
Message Mar 19 Juin - 12:31 par mihou
______________________________

4.- ET SI ON PARLAIT DU MINISTERE DU
CO-DEVELOPPEMENT ?
______________________________


La création du Ministère « de l’immigration, de
l’intégration, de
l’identité nationale et du co-développement » a
déjà fait couler
beaucoup d’encre et suscité la réprobation de
tous ceux qui, à juste
titre, sont inquiets de l’amalgame qui s’opère
par l’association des
termes « immigration », « intégration » et «
identité nationale »,
suggérant que la dite identité et au-delà l’idée
même de nation pourrait
être mise en danger par l’immigration.
En revanche, la notion de co-développement, qui
apparaît de prime abord
comme bien plus généreuse, n’a suscité jusqu’à
aujourd’hui que fort peu
de commentaires. Il y a pourtant fort à dire sur
cette notion, car
derrière un vocable qui renvoie à l’idée de
développement commun, voire
harmonieux, se cache, dans les projets
gouvernementaux, des projets et
une réalité bien moins altruiste et beaucoup plus
sordide de main-mise
sur les économies des travailleurs migrants.

Des transferts de fonds des migrants…
220 milliards de dollars US : tel est, selon la
Banque Mondiale, le
montant des transferts de fonds des migrants vers
leurs pays d’origine
en 2006 [1]. Voilà une masse financière (plus de
deux fois le montant de
l’Aide publique au développement- APD) d’autant
plus intéressante
qu’elle est stable et peu sensible à la
conjoncture. Mais d’une part
elle emprunte souvent des canaux informels et
échappe de ce fait aux
règles et profits générés par les transactions
financières
internationales, d’autre part elle constitue une
source de revenus pour
les catégories les plus pauvres des pays pauvres,
leur parvenant
pratiquement sans intermédiaires et sont affectée
le plus souvent à la
consommation courante.
Les banques nationales ont depuis plusieurs
décennies compris quel
gisement de profit il y avait là et proposé
–parfois en toute illégalité
[2] - toute une gamme de produits et de services
afin de capter les
transferts des migrants. Les grands argentiers de
la Finance mondiale
ont réagi un peu plus tard. C’est en 2003
seulement que la Banque
Mondiale et DFID (Department for International
Development – GB) ont
crée une agence internationale des transferts des
migrants, chargée
d’assurer les statistiques et évaluation,
d’étudier les impacts et de
coordonner des programmes intégrant cette
question. Mise à l’ordre du
jour du G8 de Sea Island en 2004, la question des
transferts de fonds
des migrants a donné lieu à la mise en place d’un
groupe de travail
(IWGIRS) comprenant le FMI, la Banque Mondiale,
l’OCDE et la BCE.

… au co-développement
C’est dans ce contexte que la notion –plus
ancienne- de co-développement
a été mise en avant. Pour ceux qui mettraient
sous ce terme l’idée d’une
distribution équitable des richesses entre Nord
et Sud, d’un
développement non agressif de chacune des
régions, respectueux du
développement de l’autre, qu’ils se détrompent.
Voici deux définitions proposées parle Ministère
français des Affaires
étrangères :
On entend par « co-développement » toute action
de développement dans
laquelle s’implique un migrant, quelque soit la
nature et les modalités
de cette implication.
Ou encore Action favorisant la contribution des
migrants dans le
développement de leur pays d’origine . [3]
Il s’agit donc de faire financer par les migrants
eux-mêmes le
développement de leur pays d’origine. Ainsi non
seulement les pays
industrialisés et dominants exploitent dans des
conditions de précarité
et de discriminations évidentes la main d’œuvre
immigrée, non seulement
elle rejette tous les travailleurs potentiels qui
ne lui sont
immédiatement utiles, mais voilà que ce sont ces
mêmes migrants, exclus,
rejetés, exploités, précarisés et renvoyés dès la
fin de leurs contrats
de travail, qui devraient dégager une épargne
suffisante pour investir
dans leur pays, financer les infrastructures,
créer de l’emploi au
village (ce village qu’ils ont quitté faute de
travail) afin de freiner
l’arrivée de nouveaux migrants.
Que l’on en juge :
Les projets portés par les migrants dans le cadre
du co-développement
s’orientent aujourd’hui principalement vers trois
axes :

- la promotion de l’investissement productif

- l’aide aux initiatives visant au développement
local

- la mobilisation des compétences des diasporas.
La promotion de l’investissement productif
recouvre également les moyens
de sécuriser les dispositifs de transferts de
l’épargne et la recherche
d’outils permettant un accès plus aisé au crédit
pour les micro-sociétés
issues du secteur informel. [4]
Capter les flux financiers
Le premier objectif est donc de capter ce flux
financier au profit des
établissements financiers (organismes de
transferts de fonds, banques,
bourses). C’est ainsi que des organismes tels que
Western Union ou
Moneygram, en échange d’une réelle rapidité des
transferts (un jeu
d’enfant à l’ère des ordinateurs et d’Internet,
on ne comprend pas
pourquoi les Postes ne sauraient en faire autant
!), pratiquant des taux
d’usure dignes d’un Shylock, se sont installés
non seulement dans toutes
les grandes villes occidentales, mais aussi,
profitant le plus souvent
de réseaux publics préexistant tels que ceux de
la Poste ou des
téléphones, dans les villages les plus reculés de
tous les pays du
tiers-monde, et jusque sur les routes des
migrations clandestines. De
même, l’on peut voir sur les grandes avenues
menant aux portes de Paris
vers les banlieues à forte population immigrée,
les vitrines des banques
de leurs pays d’origine proposant toutes sortes
de produits bancaires,
prêts et produits d’épargne. C’est ainsi
qu’aujourd’hui en Espagne la
Banque populaire marocaine en association avec la
Caixa (Catalogne) sont
parvenues à drainer près de 70% des transferts
des immigrés marocains
résidant sur le territoire espagnol.

2- Orienter leur utilisation
Une fois opéré ce détournement des économies des
migrants à leur profit,
les banques vont avoir la possibilité d’orienter
l’utilisation de ces
fonds. D’une utilisation traditionnellement
tournée vers la consommation
de produits essentiellement locaux, les banques
vont jouer un rôle actif
pour convaincre les migrants que leur argent peut
être plus utile dans
d’autres projets, en particulier tous ceux qui
concernent l’équipement
collectif de proximité et certains secteurs de
service. Et elles vont
alors proposer des conseillers en matière
d’investissement (on peut se
demander ce qu’ils connaissent de
l’investissement dans les douars
reculés du Haut-Atlas par exemple) et des
mécanismes d’accès au crédit.
Les pouvoirs publics appuient ces processus et
multiplient les sommets,
rencontres, conférences et séminaires qui sont
autant d’occasions de
vanter le co-développement.
Ainsi, les recommandations qui ont émané de la
Conférence sur les
financements innovants du développement qui s’est
tenue à Paris du 28
février au 1er mars 2006 [5], concernent la mise
en place de mécanismes
facilitant l’accès au crédit, de co-financement
et d’aides logistiques
ou techniques, ainsi que l’aide au retour
- véritable obsession de nos dirigeants depuis
des décennies - et
l’association des organismes de micro-crédits à
la mise en place de ces
micro-projets. ONG et associations sont
sollicitées pour canaliser ces
transferts, orienter les projets et légitimer ce
processus proprement
scandaleux qui consiste à financer l’aide au
développement par l’épargne
des migrants tout en contrôlant les flux et les
attributions.

Quel modèle de développement ?
Les pouvoirs publics récupèrent ainsi
l’expérience de quelques migrants,
qui, de manière individuelle ou au sein
d’associations, ont choisi en
toute liberté d’utiliser leur argent pour
permettre à leur village
d’origine d’accéder à certains équipements de
base qui auraient
normalement dû être financés par ces mêmes
pouvoirs publics (routes,
accès à l’eau potable ou à l’électricité par
exemple). Ce faisant, ils
continuent de se désengager de leur
responsabilité d’Etat qui consiste à
assurer, en échange de l’impôt, l’accès des
citoyens aux services
publics. De cette façon, l’Etat n’est plus
redevable de rien, puisque ce
sont alors les villageois eux-mêmes qui vont,
avec l’aide de leurs
enfants partis travailler à l’étranger, trouver
les solutions et les
palliatifs à l’incurie de l’Etat. Cela a
plusieurs avantages :

- cela permet de continuer à compresser les
finances publiques, déjà
fortement réduites par des années d’ajustement
structurel et de
consignes d’austérité budgétaire de la Banque
mondiale et du FMI.

- cela permet de privatiser une partie de la
dette, puisque ce sont ces
mêmes migrants qui vont s’endetter pour garantir
à leurs familles les
services normalement dus par les Etats

- cela permet de ne pas avoir à remettre en cause
les choix économiques
qui ont abouti à l’incapacité des Etats de
satisfaire les besoins de
base de leurs citoyens.

Au lieu de faire le bilan du processus
d’ouverture d’économies fragiles à
une concurrence déséquilibrée, impitoyable et
déloyale dans le cadre du
« libre-échange », au lieu de mettre en cause les
conditions
inadmissibles dans lesquelles s’est opéré le
surendettement des Etats du
Sud, au lieu d’évaluer les résultats de la
politique du tout pour
l’exportation et de la privatisation des secteurs
et services publics,
on prétend que le développement peut se faire à
coup de micro-projets,
financés par des micro-crédits. Comme l’écrit
Denis Comanne « miser à
fond sur la carte du micro-crédit empêche une
véritable remise en cause
des plans d’ajustement structurel : à quoi
sert-il de chercher des
solutions collectives quand il est prouvé que des
individus (combien ?)
peuvent s’en sortir. » [6].

On voit là comment le co-développement, présenté
comme « solution
innovante » ne constitue en fait qu’un moyen de
perpétuer et d’aggraver
le fossé existant entre pays développés et pays
en voie de
non-développement. Aux pays riches les grands
projets, les travaux
d’infrastructure, les multinationales, le rachat
des entreprises
publiques du tiers-monde et de leurs « droits »
de pollution. Pour les
pays pauvres, « mini-moche et lilliput » [7],
comme dirait Jacques
Dutronc. Ils sont renvoyés à leur pauvreté et
condamnés à la
micro-entreprise et au micro-projet… Même plus
besoin de politique
globale, ce sont les individus eux-mêmes qui
seront les acteurs de leur
micro/mini/nano développement. Mais même pour
cela, ils devront payer
leur dîme au système bancaire qui se pose en
intermédiaire indispensable
et prendre l’avis des experts (en bricolage et
système D ?!) qui
dicteront à ces braves gens ce qui est bien pour
eux !

Quelle figure de l’immigré ?

On voit là combien l’immigré se trouve pris dans
un faisceau
d’injonctions et de tensions incompatibles duquel
il aurait bien de la
chance de sortir indemne.
L’immigré aujourd’hui, c’est d’abord celui dont
on ne veut pas, devant
lequel on dresse des murs, des barrières, des
barbelés afin qu’il ne
pénètre pas dans l’espace « civilisé ». C’est
celui qui meurt dans les
eaux du détroit de Gibraltar, au large des
Canaries ou sur les grillages
entourant Ceuta et Melilla. C’est celui contre
lequel on dresse les
politiques de lutte contre l’immigration.
L’immigré, c’est aussi celui qui est déjà là,
dont on n’a pas su se
protéger, qui a même fait venir sa famille. Mis à
l’écart dans des
quartiers-ghettos, pointé du doigt et contrôlé
plus souvent qu’à son
tour dans les couloirs de métro, il reste immigré
de génération en
génération, toujours renvoyé à ses origines, mais
malgré tout sommé de
s’intégrer. Cette injonction d’intégration [8],
ressassée jusqu’à la
nausée dans les discours officiels et officieux,
somme l’immigré de
devenir français (mais ça se mérite ), de laisser
au vestiaire sa
culture, ses coutumes, sa religion et d’aimer le
pays qui l’exploite,
l’exclut, le discrimine.
La version Sarkozy de l’injonction à
l’intégration s’accompagne, ne
l’oublions pas, d’une deuxième proposition : «
Intègre-toi ou tire-toi ».
Mais dans le même temps, l’immigré est
irrémédiablement ramené vers ses
origines. Et il le sera de plus en plus en plus,
puisque la nouvelle
politique migratoire (on voudrait bien ne pas en
faire venir, mais c’est
hélas indispensable pour l’économie), c’est
l’immigration tournante, à
durée déterminée : on te presse, on t’exploite et
puis hop dehors,
laisse la place au suivant.
Cette impossibilité de l’intégration est valable
jusque dans les plus
hautes sphères, du moins lorsque l’immigré vient
de l’extérieur du monde
judéo-chrétien : même le mieux acculturé, le
mieux assimilé, reste
toujours « le bougnoule » de service, fut-il
nommé Secrétaire d’Etat ou
Préfet.
Dans le cas du co-développement, l’immigré, sommé
de s’intégrer est
également renvoyé vers ses racines, tenu pour
responsable de sa famille,
de son douar, de son village, de son quartier et
du développement de son
pays, développement par ailleurs entravé par les
politiques imposées par
le pays qui l’accueille aux citoyens de son pays
d’origine, avec la
complicité de ses dirigeants.
« Le co-développement ne concerne pas seulement
les migrants qui
souhaitent rentrer au pays pour y réaliser un
projet de réinsertion,
mais autant et même bien davantage, ceux qui,
durablement établis en
Europe, souhaitent néanmoins faire bénéficier
leur pays d’origine de
leurs compétences et savoir-faire, ainsi que de
leurs capacités
d’investissement. » dit le texte du rapport d’un
atelier organisé par le
Conseil de l’Europe [9]. Et si on en faisait
bénéficier la Hongrie ?

Par Lucile Daumas, Attac Maroc
Mai 2007
mihou
Re: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)
Message Mar 19 Juin - 12:32 par mihou
Notes :
[1] Ces montants sont en croissance rapide,
puisqu’en 2002, ils étaient
de 80 milliards de dollars et en 2004 de 126
milliards.
[2] Ainsi la Banque Populaire Marocaine non
reconnue en France a utilisé,
selon l’hebdomadaire marocain Le Journal, dans
son numéro du mois
d’avril 2007, les canaux de l’Ambassade du Maroc
à Paris, pour capter
les transferts des migrants marocains installés
en France.
[3] http://www.diplomatie.gouv.fr/frIMG/pdf/
[4] Ibid
[5] C’est Jacques Chirac qui en a prononcé le
discours d’ouverture, dans
les salons de l’Elysée.
[6] Denise Comanne, Quelle vision du
développement pour les féministes,
Les autres voix de la planète, 3° trim. 2005
[7] Dans Mini, mini, mini, Jacques Dutronc, 1966.
« … Mini-moche et
lilliput,. Il est minuit docteur Schweitzer… »
[8] Décrite avec justesse par Abdellali Hajjat,
Immigration postcoloniale
et mémoire ; L’harmattan, 2005
[9] Réunion d’expert sur Migration et
co-développement, Atelier «
Migrants : acteurs et partenaires du
développement ici et là-bas »
organisé par la Direction des Affaires sociales
(DGOOO) et le Centre
Nord Sud du Conseil de l’Europe, Lisbonne , 23-24
avril 2004.

______________________________

5.- LE MOUVEMENT SOCIAL EN RUSSIE
______________________________

En Russie, depuis deux ans, on assiste sur
l’ensemble du territoire de la
Fédération de Russie, à la naissance d’un
mouvement social multiforme,
mouvement de résistance des « gens d’en bas »
face à la poursuite des
réformes libérales menées par Vladimir Poutine :
droit au logement,
dénonciation du nationalisme grand russe, lent
renouveau syndical. Ce
mouvement, soumis à une répression dure par le
régime, est ignoré par la
presse occidentale, mais aussi, ce qui est plus
grave, par le mouvement
altermondialiste. Un exemple récent : en juillet
2006, lors du contre-G8
organisé à l’appel du Forum social Russe, seuls
quelques rares militants
de l’Ouest sont venus à Saint-Pétersbourg
manifester leur solidarité
avec les activistes russes. Les articles de C.
Clément (sociologue,
directeur de l’Institut de l’Action Collective
(http://www.ikd.ru)
membre du Comité de travail du réseau Union des
Conseils de Coordination
de Russie - SKS) et de D. Paillard (Messager
syndical - Russie)
fournissent une première série d’informations sur
ce mouvement.

Le mouvement social en Russie témoigne d’une
étonnante vitalité en ce
printemps 2007, tant par la multiplication des
initiatives - le site de
l’Institut « Action collective » ne recense pas
moins d’une centaine
d’actions pour la seule semaine du 18 au 25 mars,
que par sa capacité
développer des formes d’action privilégiant les
initiatives d’en bas.
Cette richesse et cette inventivité sont d’autant
plus remarquables que,
depuis plusieurs années, le régime de Poutine
déploie des efforts
considérables pour bloquer toute possibilité de
manifestation autonome
de la part de la société : répression multiforme,
limitations
draconiennes du droit de manifestation, mise en
place d’une société
civile officielle dont les représentants sont
désignés par le pouvoir,
verrouillage de l’espace politique institutionnel
- la dernière
invention du pouvoir sur ce point a été la
création, peu avant les
dernières élections dans les régions, d’un parti
« présidentiel
d’opposition », censé permettre au Kremlin
d’occuper tout l’espace
politique au détriment de l’Autre Russie,
regroupement libéral mené par
Gary Kasparov, et du PC de la Fédération de
Russie.

La première manifestation publique de ce
mouvement à l’échelle de la
Fédération de Russie remonte à l’hiver 2005, avec
la vague de
protestations déclenchées par la « monétarisation
» des avantages
sociaux de certaines catégories de la population
: les retraités et les
invalides, qui jusqu’ici bénéficiaient de la
gratuité des médicaments et
des transports, ont vu ces avantages en nature
remplacés par une somme
dérisoire, laissée de plus à la charge des
pouvoirs régionaux souvent
incapables d’en assurer le versement. Certes, dès
l’adoption de la loi
en mai 2004, un Conseil de la solidarité sociale
(S.O.S) avait vu le
jour à l‘initiative de différentes organisations,
des associations de
retraités et d’invalides à la Fédération des
syndicats de Russie
(nouvelle confédération de syndicats
alternatifs). Durant tout l’été et
l’automne 2004, cette coalition avait lancé une
campagne massive contre
la loi qui devait entrer en application le 1er
janvier 2005. Dès les
premiers jours de janvier des manifestations
spontanées, avec barrages
de rues et occupation des bâtiments publics
éclatent à travers tout le
pays. En deux mois, ce sont plus de 500 000
manifestants qui descendent
dans la rue non pas pour demander/supplier mais
exiger leurs droits, un
événement unique depuis la disparition de l’Union
Soviétique.

Ces actions ont très vite eu un effet contagieux,
les manifestants,
soutenus par les militants de S.O.S. sont
rejoints par d’autres
catégories de la population comprenant qu’une
action collective peut
faire bouger les choses. Dans toute une série de
villes, grandes et
petites, de Vladivostok à Kaliningrad, se créent,
sur la lancée, des
Comités de coordination des luttes rassemblant un
très grand nombre
d’associations, mouvements et même partis
politiques présents sur la
ville qui agissaient jusqu’alors en ordre
dispersé et qui prennent
conscience que agir/résister/manifester ensemble
ouvre d’autres
perspectives pour faire avancer ses
revendications et défendre ses
droits. En retour, la construction d’un « espace
partagé » a un effet
sur les participants qui comprennent qu’action et
solidarité ne sont pas
des slogans vides, et entraîne une politisation
dans l’action, avec
l’émergence de nouveaux leaders venus à la
politique à travers ce
mouvement.

Le premier Forum social russe en avril 2005 est
l’occasion de généraliser
à l’échelle du pays l’expérience des Conseils de
coordination des luttes
apparus dans les régions : c’est ainsi qu’est
créé sous la forme d’un
réseau l’Union des Conseils de coordination des
luttes (SKS).Regroupant
au départ six collectifs régionaux, le SKS réunit
aujourd’hui plus de 25
comités régionaux. Il publie un journal
(électronique) et son activité
est systématiquement relayée sur site Internet de
l’Institut « Action
collective » [1].
Durant ses deux années d’existence, le SKS a
réussi, certes avec de
grandes difficultés, non seulement à se maintenir
mais à être toujours
plus présent dans les luttes, en prenant toute
une série d’initiatives
pour créer au niveau de la Russie des synergies
autour des actions
menées à l’échelon local, sur des thèmes
spécifiques.

La campagne pour le droit au logement a été la
principale campagne au
cours des dix huit derniers mois [2] :

- mouvement multiforme le mouvement pour le droit
au logement s’est
construit à travers une série de réseaux
regroupant, sur des thèmes
spécifiques, les activistes de différentes
régions (on peut citer, par
exemple, le réseau des résidents des foyers [3])
;

- indépendamment des initiatives prises tout au
long de l’année dans
telle ou telle localité, au moins deux fois par
an est organisée une
semaine d’action à l’échelle de la Fédération de
Russie ; la dernière en
date a eu lieu début décembre 2006, avec des
dizaines de milliers de
personnes dans la rue ;

- toute une série de documents ont été élaborés
et sont disponibles sur
le site de l’Institut « Action collective ».

- en mai de cette année se tiendra une conférence
nationale des militants
du droit au logement, nouvelle étape dans
l’affirmation du mouvement.

Parmi les autres campagnes en cours, on peut
citer : les campagnes pour
les droits sociaux dans les entreprises [4],
l’écologie, l’antifascisme
et la dénonciation du nationalisme grand russe,
contre la privatisation
de l’éducation et du système de santé. Et chaque
campagne se met en
place sous la forme de réseaux permettant de
coordonner et de dynamiser
les actions à l’échelon local.

Sur le plan organisationnel, le SKS a une
structure souple, peu
centralisée, avec la tenue tous les six mois
d’une Conférence réunissant
les représentants des régions pour décider des
actions à mener.
Jusqu’ici ces Conférences ont eu lieu
systématiquement dans des villes
de province : Ijevsk, Toliatti, Kirov, la
prochaine se tiendra à
Novossibirsk. Cela reflète la réalité du
mouvement beaucoup plus fort
dans les régions qu’à Moscou même. La réunion du
SKS dans telle ou telle
ville est aussi conçue comme l’occasion
d’apporter un soutien concret
aux luttes en cours dans la ville : dimanche 25
mars, à Kirov, où se
tenait la VIème conférence du SKS, une
manifestation de soutien aux
résidents d’un foyer menacé d’expulsion a eu lieu
l’après -midi.

Cette souplesse et ce souci permanent d’ancrer
les initiatives dans les
structures de base est indissociable d’un combat
permanent contre les
OPA menées par différentes organisations
politiques tant localement qu’à
l’échelon national, qu’ils s’agissent de certains
partis issus du PCUS,
comme le RKRP, qui, avant-garde autoproclamée, a
tendance à considérer
le mouvement social comme un simple vivier où
recruter, ou encore
d’organisations d’orientation libérale comme
l’Autre Russie de Gary
Kasparov surtout soucieuses de renforcer sa
crédibilité dans la période
électorale qui s’ouvre (les élections à la Douma
auront lieu en décembre
2007).

Cette priorité donnée aux actions à la base
autour d’objectifs précis et
mobilisateurs ne signifie pas que le mouvement
ait cherché à éviter la
question politique. Mais la politisation du
mouvement est directement
fondée sur l’expérience des luttes communes et
marquée par la fermeture
du système politique institutionnel. Pour ce qui
est de sa plateforme
politique, le SKS a pris le temps de la réflexion
; elle a été adoptée
lors de la dernière coordination fin mars. Elle
ne se présente pas comme
un programme achevé, mais comme l’affirmation
forte de certains
principes d’action dont les principaux sont
l’auto-activité et
l’auto-organisation. Comme une ouverture vers une
autre façon de faire
de la politique, une autre radicalité, source
inévitable de conflit avec
les avant-gardes autoproclamées. A Kirov, lors du
débat sur les
perspectives du mouvement pour le droit au
logement, face aux militants
du RKRP affirmant qu’il fallait centrer la
campagne sur deux slogans « A
bas le nouveau code du logement » et « boycott de
la réforme » la
majorité des délégué ont nettement réaffirmé que
la lutte ne se
réduisait pas à ces slogans aussi radicaux que
désincarnés, mais passait
par un patient travail d’activation des
structures de base,
l’implication du plus grand nombre dans des
avancées concrètes étant la
seule garantie d’une véritable prise de
conscience à la fois
individuelle et collective. Et comme le disait un
délégué à Kirov, «
c’est parce que nous serons solides et déterminés
dans nos luttes que
nous pourrons frapper fort tous ensemble le jour
venu ». Cette volonté
de ne pas réduire le politique à la question du
pouvoir s’est manifestée
également dans le débat sur l’échéance
électorale. La position
finalement adoptée (laisser aux coordinations
régionales le soin de
décider le mode d’investissement dans la campagne
électorale) traduit
avant tout le refus d’engager vainement des
forces dans ce type de
campagne où il est quasiment impossible de peser
mais aussi une réelle
défiance à l’égard du regroupement l’Autre
Russie, dominé par les
libéraux.
Paradoxalement, ce qui fait la force du mouvement
aujourd’hui en Russie
en fait aussi d’une certaine façon la faiblesse :
il est loin d’être un
mouvement social avec une claire identité de soi,
et il reste largement
morcelé et éclaté, morcellement encore renforcé
par l’immensité du pays.
En même temps, malgré cette fragilité, par sa
démarche, son inscription
dans la durée, il se présente comme le premier
mouvement depuis la fin
de l’Union Soviétique qui, à travers des luttes,
pose concrètement,
entre conscience d’une dignité retrouvée et
solidarité dans l’action
collective, la question d’une autre politique et
d’un autre avenir.

par Denis Paillard, Commission International
d’Attac France, Messager
syndical - Russie
mihou
Re: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)
Message Mar 19 Juin - 12:33 par mihou
Notes :
[1] Ce site (en russe) fournit au quotidien un
grand nombre
d’informations sur les différents mouvements et
initiatives :
(http://www.ikd.ru)
[2] Cf. ci-dessous l’article de Carine Clément
faisant un bilan de cette
campagne pour 2006
[3] Aujourd’hui encore plusieurs millions de
personnes vivent dans ces
foyers, hérités de la période soviétique.
[4] Le 18 mars, à l’appel de deux leaders
syndicaux (Ford et Surgutneft),
a été une journée de défense des syndicats
alternatifs, avec des
initiatives dans une cinquantaine de villes.
C’est la première
mobilisation importante à l’échelle du pays
depuis les manifestations
contre la réforme du Code du travail il y a cinq
ans.


______________________________

6.- REVEIL SYNDICAL EN RUSSIE
______________________________

Grève des salariés de Ford début février, journée
nationale de solidarité
avec les syndicats alternatifs le 18 mars, grève
des camionneurs de la
Poste de Saint-Pétersbourg le 3 avril. Ce ne sont
que quelques faits,
parmi les plus frappants, illustrant le
redémarrage des luttes
syndicales de ces derniers mois.

Encouragés par l’exemple de Ford (dont l’usine
est située dans la région
de Saint-Pétersbourg), les salariés de la Poste
ont sauté le pas.
Mi-mars, ils ont créé un nouveau syndicat, la
partie la plus militante
des salariés quittant les rangs de la
confédération traditionnelle FNRP
(Fédération des syndicats indépendants de Russie,
héritière de
l’ancienne confédération soviétique).
L’auto-organisation n’a pas tardé
à porter ses fruits : le 3 avril, 30 camionneurs
de la Poste ont refusé
d’acheminer le courrier, obligeant par leur grève
spontanée le
directeur-adjoint régional de la Poste à venir
lui-même parlementer pour
obtenir la reprise du travail. Les salariés ont
tenu deux heures, qu’ils
présentent comme une grève d’avertissement. Pour
le 9 avril, les
syndicalistes, avec l’aide du Comité d’actions
solidaires de la région
de Saint-Pétersbourg, préparent un piquet de
grève devant la direction
régionale de la Poste. Les revendications
touchent non seulement au
salaire, mais également aux conditions de
travail, à la reconnaissance
du syndicat, et même à l’amélioration du service
postal pour la
population.
Dans la même région (à Vsevolojsk, la localité où
se trouve l’usine
Ford), les salariés de la fabrique d’emballage de
thé « Nevski Porogi »
se sont organisés eux aussi en syndicat
alternatif, également dans la
foulée de la grève chez Ford. La différence est
qu’auparavant - depuis
les 6 ans que fonctionne l’usine – n’existait
aucune structure
syndicale, ce qui permettait au patronat d’agir à
sa guise. La goutte
d’eau qui a fait déborder le vase est partie de
la promesse, non tenue,
du directeur de doubler la rémunération des
journées de travail
coïncidant avec les fêtes de fin d’année 2006.
Aux protestations des
ouvriers, le directeur aurait répondu avoir «
changé d’avis », ce qui a
mis le feu aux poudres. Début avril, les salariés
menacent de se mettre
en grève s’ils n’obtiennent pas satisfaction de
leurs revendications, au
premier rang desquelles – double rémunération du
travail effectué
pendant les fêtes, mise à disposition d’un local
pour le syndicat,
admission dans l’entreprise d’un inspecteur du
travail indépendant,
révision du règlement intérieur, amélioration des
conditions de travail
et hausse du salaire, en particulier pour les
travailleurs immigrés,
très nombreux dans l’usine. Pour le moment la
direction ignore les
revendications portées par le syndicat. Pire, les
dirigeants du syndicat
subissent menaces et discriminations. Au
lendemain de la création du
syndicat, le directeur les a convoqués dans son
bureau et leur a ordonné
de démissionner. Grâce à la solidarité syndicale
qui s’est tout de suite
organisée, les syndicalistes tiennent bon et
menacent d’entrer en grève.
Boris Khomiak, adjoint au président du syndicat,
confirme la volonté des
salariés « de ne pas céder et d’aller jusqu’au
bout pour obtenir
satisfaction des revendications ».

D’autres régions sont touchées. A Perm (Oural),
le 4 avril une nouvelle
organisation syndicale a été fondée par les
salariés de la gare routière
municipale, qui a adhéré à la Confédération
syndicale indépendante «
Zachita truda » (Défense du Travail). Presque la
totalité des salariés
(429 sur 490) ont ensemble quitté le syndicat
FNPR. Le déclic a été
provoqué par le projet de « restructuration » de
l’entreprise
municipale, qui fait craindre aux salariés des
licenciements massifs. La
présidente du nouveau syndicat, Natalia
Tchernikova, annonce que le
syndicat s’apprête à se battre pour le maintien
de l’emploi et la
négociation d’un nouvel accord collectif
permettant aux salariés de
contrôler la « restructuration ».
A Tolliati (région de Samara), dans l’usine
General Motors-AvtoVAZ, le 23
mars, à l’issue d’une lutte de plusieurs mois,
ponctuée par des actions
de solidarité de toutes sortes et par des démêlés
judiciaires à
rebondissements, la présidente du syndicat
indépendant Ilsiar
Charafutdina, est réintégrée à son poste, le
tribunal du district ayant
reconnu illégal son licenciement (datant du 17
novembre 2006). La
direction de la multinationale est condamnée à
payer des indemnités
représentant la totalité du salaire pendant la
période de chômage subie.
La nouvelle est saluée comme une victoire par
tout le mouvement syndical
alternatif.

A Moscou, le 26 mars, la veille du piquet de
grève préparé par le
syndicat de l’usine de cigarettes Gallaher
Liggett-Ducat (affilié à la
FNPR et membre de l’Union syndicale
internationale des travailleurs de
la branche alimentaire IUF), la direction a fini
par céder et a
satisfait les principales revendications des
salariés. En particulier,
ont été réintégrés à leur poste deux
syndicalistes illégalement
licenciés au lendemain de la conférence syndicale
de février, à l’issue
de laquelle avait été décidé de revendiquer la
hausse du salaire et
d’intensifier le travail syndical de contrôle du
respect des normes de
l’accord collectif.
A Moscou également, des bruits font écho d’une
tentative de création d’un
syndicat à Renault Avtoprom, alors que la
direction russe de la
multinationale française fait la chasse au
moindre rebelle.

Dans la région du pétrole de Khanty-Mansiysk
(Sibérie occidentale,
Grand-Nord russe), où les salariés des grands
groupes pétroliers se
mobilisent depuis déjà des mois, un arrêt du
travail spontané est
intervenu le 27 mars dans l’un des ateliers de la
compagnie «
Surgutneftegaz ». Les ouvriers n’ont repris le
travail qu’après avoir
subi les vociférations et menaces du chef
d’atelier. Rappelons que le
président du syndicat indépendant « Profsvoboda »
de la compagnie,
Alexandre Zakharkin, qui accuse la direction de
traiter les ouvriers
comme des « esclaves », se bat depuis des mois
pour faire reconnaître
l’illégalité de son licenciement.

A Iaroslavl (au Nord de Moscou) dans l’usine de
bière « Iarpivo »
appartenant au groupe « Baltika », début mars a
été créée une cellule
syndicale indépendante affiliée au syndicat des
travailleurs de la vente
et des services. Les salariés ont décidé de
quitter en masse le syndicat
FNPR pour « absence d’activité ». La mobilisation
a été provoquée par
une série de licenciements économiquement non
fondés et par
l’intensification drastique des cadences. Là
encore, il s’agit de
salariés relativement bien payés à l’échelle
russe, et d’une société
très rentable. La répression s’est tout de suite
abattue sur les «
meneurs », transférés sur des postes moins payés
et éloignés du
collectif principal...

La liste pourrait encore être prolongée. Retenons
que le mécontentement
monte à la base, surtout dans les grandes
sociétés russes rentables ou
multinationales où les salaires sont certes plus
élevés que la moyenne,
mais les conditions de travail empirent sous la
pression de l’élévation
des cadences, de l’augmentation des exigences de
productivité et de la
course au profit. Les salariés de ces entreprises
sont plus jeunes que
la moyenne, moins sensibles aux sirènes du
syndicalisme traditionnel de
« partenariat » de la FNPR. Nouvelle génération,
nouveaux rapports de
travail, nouveaux syndicats. Le monde salarié
russe entrerait-il dans
l’ère des luttes syndicales ?

par Carine Clément, Commission International
d’Attac France, sociologue,
directeur de l’Institut de l’Action Collective
(http://www.ikd.ru)
membre du Comité de travail du réseau Union des
Conseils de Coordination
de Russie - SKS)

______________________________
mihou
Re: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)
Message Mar 19 Juin - 12:34 par mihou
7.- MALGRE LES MOUCHARDS ET LES GENDARMES... LA
COMMUNE D’OAXACA N’EST
PAS MORTE !
______________________________

Retour sur les évènements de 2006
Le Mexique, nous répète-t-on à l’envie, serait
devenu un pays
démocratique, engagé sur la voie des Réformes...

Engagé dans les réformes voulues par le
néo-libéralisme, c’est exact. Le
Mexique s’est montré dévoué au FMI, a signé les
accords de libre-échange
de l’ALENA ( ce qui a plongé le pays dans la
dépendance alimentaire pour
25 % du maïs consommé et entraîné une hausse de
738 % du prix de la
tortilla depuis 94), a signé aussi ceux de
l’ASPAN (alliance pour la
sécurité et la prospérité de l’Amérique du Nord
dont un des objectifs
est la lutte contre le terrorisme), et le plan
Puebla Panama, véritable
entreprise de conquête de l’Amérique centrale,
visant à livrer aux
multinationales les ressources naturelles de la
région, à en faire un
paradis pour riches touristes tout en expulsant
de leurs terres des
milliers de paysans indigènes. Pas assez vite au
goût de l’OCDE qui
recommandait encore en novembre au Mexique
d’avancer vers la voie de
l’élimination de la propriété communale de la
terre source de distorsion
du marché . Aujourd’hui, toujours sur les
recommandations de l’OCDE, ce
sont les retraites des fonctionnaires de l’état
qui sont remises en
cause et doivent être alignées sur celles
imposées au secteur privé (ça
vous rappelle quelque chose ?...) et confiées à
des fonds de pension
d’abord publics puis privés au bout de trois ans
.

Un pays démocratique ? C’est vite dit !
Le PRI, Parti Révolutionnaire Institutionnel (sic
!), étant resté au
pouvoir pendant plus de 70 ans, beaucoup se sont
réjouis du retour à
l’alternance lorsque, en 2000, le pouvoir est
passé aux mains du PAN,
Parti d’Action Nationale... parti de la droite
dure, cléricale et
conservatrice... quel progrès !
Mais rien de changé dans le fond en ce qui
concerne les méthodes de
gouvernement : élections truquées : Felipe
Calderón a été élu le 2
juillet au moyen d’une fraude manifeste, cela a
été également le cas en
2004 du gouverneur de l’état d’Oaxaca, Ulises
Ruiz Ortiz ; corruption à
tous les niveaux en particulier au niveau local
où les caciques assoient
leur pouvoir en s’achetant des hommes de main
pour les sales besognes ;
répression féroce contre les mouvements sociaux
confiée à la fois à la
PFP (police fédérale préventive) et aux groupes
para militaires ; grands
médias pour distiller la pensée unique du système
libéral, présenter les
luttes sociales comme soumises aux vandales et
aux hors la loi et, à
l’occasion, lancer des appels à la dénonciation
et au lynchage de leurs
dirigeants !
Le rapport 2007 que vient de faire paraître
Amnesty International en dit
long : il y est signalé que les réformes
nécessaires à une meilleure
protection des droits humains n’ont toujours pas
été adoptées (et cela
alors que le Mexique a pris la présidence du
nouveau conseil des droits
de l’homme de l’ONU !), qu’il y a eu de multiples
cas de tortures,
d’arrestations arbitraires, de personnes détenues
au secret sur la base
d’éléments forgés de toutes pièces et que 10
journalistes ont été
assassinés.
Et les syndicats « officiels » ? Associés au
pouvoir en place depuis des
dizaines d’années, des syndicats « charros » .
Dirigés par des bureaucrates dont certains ont
réussi à amasser des
fortunes personnelles douteuses (c’est le cas
d’Elba Esther Gordillo, la
secrétaire de la SNTE le syndicat des
travailleurs de l’éducation), ils
sont dans le compromis permanent et l’acceptation
du système. Il est
d’ailleurs éclairant de savoir qu’il est prévu,
pour la réforme des
retraites, de confier la gestion des fonds de
pension publics pendant la
période transitoire de 3 ans, aux responsables
des principaux syndicats
des travailleurs de l’état.

Le peuple mexicain ne croit-il qu’en la solution
des urnes ? Le black out
médiatique
Nos grands médias et maîtres à penser acceptent à
l’occasion qu’on
s’indigne de la construction du mur à la
frontière états-unienne... mais
nous informer des luttes sociales de l’autre côté
de l’océan... ça non !
ça gâche le tableau. Etait-ce parce que nous
étions nous aussi en
période électorale ? On nous a informé du
résultat des élections
présidentielles, des soupçons de fraude, mais
rien sur le taux
d’abstention de plus de 40 % et en nette
augmentation ! Rien non plus ou
presque sur les importants mouvements sociaux et
leur violente
répression dans les mois qui ont précédé et suivi
les élections.

Le 20 avril 2006, la police de l’état de
Michoacan, aidé de la PFP,
déloge les mineurs de l’entreprise sidérurgique
Sicartsa à Lazaro
Cardenas, en grève depuis le 2 avril. Deux
d’entre eux sont tués, il y a
54 blessés (dont 21 par armes à feu).
Le 3 mai 2006, à Texcoco, 8 vendeurs de fleurs,
membres du Front des
villages pour la défense de la terre,
s’installent illégalement sur la
place du marché ; on leur envoie les forces de
police. Les habitants de
la ville voisine, San Salvador de Atenco, se
mobilisent alors
immédiatement et bloquent l’autoroute. Fox,
encore au pouvoir, n’a pas
oublié que des milliers de paysans avaient défilé
dans Mexico en 2001 et
l’avaient obligé à abandonner son projet
d’aéroport international parce
qu’il entraînait l’expropriation de 4500 hectares
de terres. La
répression qui s’abat le 4 mai sur Atenco est
disproportionnée : 4000
policiers envahissent la ville, torturent,
emprisonnent et violent une
trentaine de femmes . Deux manifestants sont
tués.
Oaxaca... la révolte qu’on voudrait nous faire
ignorer

Oaxaca, c’est où ? nous demandait-on lorsque nous
distribuions des tracts
pour dénoncer la répression.

Oaxaca, façon guide du routard...
C’est un des 32 états qui composent le Mexique, à
550 km au sud de
Mexico, à côté du Chiapas. C’est la plus forte
proportion d’indigènes
(1,6 million pour une population totale de 3,4
millions) qui vivaient
déjà là des millénaires avant non seulement
l’arrivée des Espagnols mais
aussi des Aztèques. Il y a les Zapotèques, les
Mixtèques, les Mixes, les
Triquis, et d’autres encore puisqu’on dénombre 16
langues. On y vient
pour découvrir les charmes de la sierra où les
habitants ont su garder
leur mode de vie ancestral, ses magnifiques
plages pour surfeurs, sa
capitale du même nom, la ville de jade, aux
maisons coloniales à pierres
vertes. L’état d’Oaxaca est aussi la zone la plus
riche du Mexique en
biodiversité (plantes rares, différents types de
maïs), dont le sous-sol
recèle de l’or, de l’argent, du fer de bonne
qualité... Il y a aussi de
l’eau en abondance et même du vent !

Oaxaca, façon rapport d’Amnesty International
C’est un des états les plus pauvres du Mexique,
où près de 460 des 570
municipalités ne disposent pas des services de
base comme l’eau,
l’assainissement, l’électricité, des routes...
Les paysans pratiquent
une agriculture de subsistance incapable de
rivaliser avec les produits
nord américains qui inondent le marché. Beaucoup
ne vivent qu’avec 5 à 6
pesos par jour (de 0,6 à 0,9 euros !). Ils sont
de plus en plus nombreux
à tenter de passer clandestinement la frontière,
à rejoindre la ville
pour y exercer de petits métiers, à s’embaucher
comme journaliers ou à
aller travailler dans les maquiladoras. Quant au
maïs, contaminé par les
OGM, il souffre de malformations diverses... et
le vent est en cours de
privatisation par deux entreprises espagnoles !
mihou
Re: COURRIEL D'INFORMATION ATTAC (n°571)
Message Mar 19 Juin - 12:35 par mihou
Oaxaca la rebelle
Tout commence le 22 mai par la grève des
enseignants qui revendiquent des
augmentations de salaires pour compenser une vie
devenue plus chère en
raison du tourisme. Ils font partie de la section
22 du SNTE, section
qui a rejoint la CNTE ( coordination nationale
des travailleurs de
l’éducation) par refus de la bureaucratie et de
la compromission. Ils
occupent le Zocalo, la place centrale. La seule
réponse du gouverneur le
14 juin c’est l’envoi de 3000 policiers avec gaz
lacrymogènes, chiens et
hélicoptères. Les enseignants, après un premier
repli, les repoussent et
réoccupent la place.
C’est à partir de ce moment que le mouvement va
se radicaliser et
s’étendre aux habitants des quartiers populaires
et aux étudiants : tous
se retrouvent autour du mot d’ordre « dehors Ruiz
! ». Ulises Ruiz Ortiz
est un des pires gouverneurs que le Mexique ait
eu. Il a détourné des
millions de pesos pour ses campagnes électorales,
il vient d’être
épinglé par la cour des comptes pour
malversations. L’incendie du palais
de justice le 25 novembre est tombé à pic : tous
les dossiers comptables
de l’année 2006 ont été dévorés par le feu ! On
lui doit aussi le
saccage du patrimoine de la ville, le béton
remplaçant la pierre verte.
Il déteste les indigènes, les instituteurs, les
jeunes, les
homosexuels... Il n’hésite pas à recruter parmi
les truands et en deux
ans il a fait assassiner 35 militants sociaux.

Pendant pratiquement 5 mois Oaxaca va vivre dans
une situation de quasi
insurrection. Le mouvement se réclame de la
résistance pacifique mais il
en vient à se montrer plus offensif dans ses
revendications et son
organisation et prend conscience que les
affrontements physiques sont
incontournables.

Ils ne se sont pas contentés d’organiser des
mégamarches qui réuniront
jusqu’à 300 000 participants (de juin à novembre
il y en a eu au moins
une par semaine !). Ils ont occupé le
centre-ville et les postes clés
(palais de justice, parlement local...) forçant
le gouvernement Ruiz à
se replier dans une quasi clandestinité. Ils ont
bloqué l’accès aux
banques, à l’aéroport, aux grands hôtels de luxe.
Ils ont mis en place
plusieurs centaines de barricades d’auto défense
qui sont devenues aussi
des lieux de la vie collective, on y venait en
voisins, en familles. Ils
ont occupé les radios et chaîne de télé. Ce sont
les femmes qui en ont
pris l’initiative début août... il n’y avait pas
d’autre moyen pour se
faire entendre ! Radio Universidad devient la
voix de la Commune
d’Oaxaca.

Et surtout ils se sont dotés dès le 20 juin, lors
d’une réunion de 340
organisations, associations, syndicats, de cet
extraordinaire outil qu’a
été l’APPO : assemblée populaire des peuples
d’Oaxaca. C’est l’APPO qui
a permis que se réalise enfin l’alliance entre
les mouvements indigènes
et les forces d’opposition au capitalisme,
l’alliance entre la ville et
la campagne, entre les enseignants et les
habitants des quartiers
pauvres et cela en toute indépendance à l’égard
des partis. Le congrès
de novembre a confirmé cette volonté d’une
organisation issue de la base
qui applique les principes de la démocratie
participative (tout se
décide en assemblée au consensus) et met ses 230
délégués élus tous sur
un pied d’égalité. L’APPO a fonctionné comme
nouveau pouvoir en se
dotant de ses propres « gardiens de l’ordre »,
les topiles, et en
mettant en place 23 commissions faisant office de
gouvernement parallèle
: presse, barricades, propagande, sécurité
sociale, santé publique,
développement communautaire...

La répression a été à la mesure de la crainte que
la révolte d’Oaxaca a
inspirée

Elle a pris deux visages :
Celui, officiel, d’une véritable invasion
militaire : 3000 policiers
envoyés par Ruiz pour déloger les enseignants le
14 juin, 4000 hommes de
la PFP envoyés à partir du 29 octobre, équipés de
véhicules blindés,
d’hélicoptères de l’armée, utilisant des gaz au
poivre très irritants et
des canons à eau dans laquelle, subtil supplice,
il a été rajouté du
piment.
Celui de la guerre sale dite aussi de basse
intensité, pratique
traditionnelle de la classe dirigeante :
policiers en civil infiltrés
dans les manifestations, groupes de casseurs,
tueurs à gage, groupes
para militaires.
Des dizaines et des dizaines de personnes ont été
arrêtées
arbitrairement. Celles qui sont maintenues en
détention sont envoyées
dans des prisons lointaines hors de l’état
d’Oaxaca. On n’hésite pas à
porter contre elles de fausses accusations (comme
le trafic de drogue).
Ruiz a été désavoué par une bonne partie de la
classe politique, mais il
a tiré habilement profit de l’embarras dans
lequel les suspicions de
fraude ont plongé le PAN et a obtenu ainsi l’aide
du gouvernement
fédéral. Et puis, n’a-t-il pas déclaré lors du
7ème séminaire des
dirigeants chrétiens, le 17 novembre, que « seul
Dieu fait et défait les
gouverneurs » !!!
La commission civile internationale d’observation
des droits humains a
rendu un rapport accablant : elle y fait état de
26 morts, de tortures
systématiques et signale qu’il ne s’agit pas de
cas isolés ni de simples
excès mais bien « d’une stratégie gouvernementale
pour paralyser par la
peur non pas les formations politiques existantes
mais précisément ces
processus et mouvements de la société ». Le
rapport complet est
consultable sur : http://cciodh.pangea.org

. « mais il reste à Oaxaca l’esprit des insurgés
»

Aujourd’hui, l’ordre est revenu à Oaxaca, nous
dit-on, et les touristes
peuvent à nouveau s’y promener tranquillement.
Nous savons, nous, que la
colère gronde toujours là-bas et que la Commune
d’Oaxaca n’a pas perdu
ses capacités de résistance :
Le 1er janvier la communauté Triqui, qui fait
partie de l’APPO, a formé
une municipalité autonome à San Juan Copala
réaffirmant ainsi le droit
des peuples indigènes à s’autogouverner. Le 31
janvier des milliers de
personnes ont manifesté, suite à l’augmentation
du prix de la tortilla,
pour réclamer la souveraineté alimentaire et des
augmentations de
salaires. Dans plusieurs communes les habitants
ont aidé les
instituteurs à déloger les priistes (partisans du
PRI) qui avaient la
prétention de remplacer les grévistes. Lesquels
enseignants ont compris
qu’ils avaient été manipulés par un de leurs
porte-parole, Enrique Rueda
Pacheco, pour les pousser à reprendre le travail
en octobre et ils l’ont
exclu de la CNTE .
En février : l’APPO décide de ne pas participer
aux élections locales,
celles du parlement de l’Etat d’Oaxaca, pour
rester fidèle à sa volonté
de construire une autre forme de vie politique en
dehors des
institutions officielles. Le 14 Ruiz doit
renoncer à présider une
cérémonie officielle, une barricade l’en a
empêché !
En mars : il y a encore des manifestations :
celle organisée par la
coordination des femmes d’Oaxaca… et le lendemain
celle pour réclamer la
libération des personnes arrêtées la veille !
Lors du forum national et
international pour la défense des droits de
l’homme qui s’est réuni à
Oaxaca, un tribunal populaire de morale publique
s’est constitué pour
juger des actes d’URO puisque, a-t-il été
précisé, il n’existe aucun
autre moyen légal et efficace de le faire.

Dans tout le Mexique, la bataille contre la
réforme des retraites se
poursuit, menée par un front de syndicats
indépendants, avec en tête la
CNTE et le syndicat mexicain des électriciens :
ils ont prévu d’
organiser un référendum national sur la question
des retraites. Le 23
mai des profs ont encerclé la bourse de Mexico,
empêchant ainsi la tenue
de réunions dont celle de l’AMIB, association
mexicaine des
intermédiaires boursiers (pour des parasites, on
ne pouvait trouver
mieux !) On peut s’attendre à ce que nos
éditorialistes préférés hurlent
encore à la prise d’otages : après les élèves et
les touristes, les
boursicoteurs !

La « commune d’Oaxaca » entre la Commune de Paris
et la Communauté
indigène

Il est toujours délicat de comparer deux
évènements qui ont eu lieu à des
époques différentes mais la référence à la
Commune de Paris se conçoit :
dans les deux cas
le caractère ressenti comme illégitime de l’état
sert de fondement à la
mise en place d’un pouvoir populaire
insurrectionnel. Le centre ville
est occupé, des barricades sont construites, les
pouvoirs bourgeois sont
obligés de se réfugier ailleurs. La population
pauvre est sur les
barricades et dans tous les coups durs. Mais à
Oaxaca on s’est contenté
de réclamer la destitution du gouverneur sans
vraiment penser à combler
la vacance du pouvoir et la classe ouvrière n’est
pas intervenue en tant
que telle : ce sont les enseignants et le monde
indigène qui ont été à
l’avant-garde du mouvement .

La « commune » s’explique aussi en référence aux
pratiques communautaires
indigènes d’auto organisation qui ont fortement
imprégné l’APPO .

Des évènements qu’il ne faut ni surévaluer, ni
sous-estimer

Pour nous qui militons pour un autre monde, il ne
s’agit pas de prendre
nos désirs pour des réalités : le mouvement est
resté isolé malgré le
soutien de certaines catégories de travailleurs,
comme les électriciens
et celui des Zapatistes. Le sous-commandant
Marcos a bien compris que
l’APPO engageait ce qu’il souhaitait depuis des
années : l’alliance
entre les forces indigènes et les forces
anticapitalistes. Les
manifestations de solidarité n’ont pas débouché
sur une grève générale
seule en mesure de paralyser le pays. La
répression a privé le mouvement
de militants déterminés.
Les leaders d’opposition traditionnels,
politiques ou syndicaux,
continuent à peser de tout leur poids : il
apparaît nettement qu’ils ont
à plusieurs reprises joué le rôle de frein du
mouvement, le poussant
vers la négociation et le jeu politique
institutionnel que sont les
élections .

Mais il ne faudrait pas pour autant minimiser la
portée de ce mouvement,
ce que souhaiteraient évidemment nos adversaires.
Même si cela est resté
embryonnaire il y a eu à Oaxaca la prise de
conscience qu’il fallait
unir les différentes résistances, qu’il n’y avait
pas d’avant-garde auto
proclamée et surtout qu’il fallait se poser la
question du pouvoir : la
création de l’APPO est une tentative de mettre en
place un véritable
pouvoir populaire en dehors des institutions
traditionnelles.

Quelle solidarité ?

Pétitions, rassemblements devant l’ambassade du
Mexique, don financier
pour aider à payer les cautions exigées pour la
libération des détenus
d’Oaxaca et d’Atenco (3 de leurs porte-parole
viennent d’être condamnés
à 67,5 années de prison).
On peut informer par nos propres moyens,
consulter : le comité de
solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte :
[Email], le réseau
d’information et de solidarité avec l’Amérique
latine (RISAL) :
www.risal.collectifs.net ; Le festival des
résistances et des
alternatives : http://lefrap.free.fr/

Et puis, n’oublions pas que tout combat que nous
menons ici renforce et
encourage ceux de là-bas !

par Nadine Floury, membre d’Attac France

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coorditrad@attac.org est l’adresse du secrétariat
de l’équipe des
traducteurs internationaux qui nous font
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