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 libre opinion et Histoire

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mihou
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mihou


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30082006
Messagelibre opinion et Histoire

Le fin mot de l'histoire: Alea jacta est (Le sort en est jeté!) -- Jules César

Pierre Rousseau
Historien et archiviste

Édition du lundi 28 juillet 2003

L'histoire, la grande, retient souvent quelques phrases qui traversent le temps mais dont le contexte s'efface des mémoires. Le Devoir publie, tous les lundis de l'été, des textes qui rappellent où, quand, comment, pourquoi des paroles qui deviendront célèbres ont été prononcées.


En 58 avant Jésus-Christ, Jules César devient proconsul de la Gaule cisalpine, région située en deçà des Alpes, dans le nord de l'Italie actuelle. Cette charge lui permet d'exercer, dans les limites de cette province romaine, les pouvoirs civils, judiciaires et, bien sûr, militaires. La gloire militaire étant à l'époque un excellent moyen d'accéder aux plus hautes charges de l'État, César profite de l'occasion qui lui est offerte pour entreprendre la conquête de toute la Gaule. Une victoire sur les Gaulois lui permettrait d'accroître son prestige et peut-être même de surpasser celui de Pompée qui, quelques années auparavant, a conquis l'Orient. César se lance donc à l'assaut de cette Gaule libre que Rome n'a pas encore soumise. C'est le début de la célèbre «guerre des Gaules». Elle durera près de dix ans.

Au cours des premières années, tout va bien pour César. Et comme prévu, son prestige et sa gloire ne cessent de croître auprès du peuple de Rome. Mais durant l'hiver 54-53, il connaît de sérieuses difficultés alors que des troupes romaines sont anéanties dans le nord-ouest de la Gaule. Encouragés par de tels succès, de nombreux peuples gaulois s'unissent et se révoltent contre l'envahisseur romain. À la tête de ce soulèvement se trouve le chef du peuple arverne, le jeune Vercingétorix. Espérant conjurer le mauvais sort, César décide de passer à l'offensive. Il se porte alors sous les murs de la capitale arverne, Gergovie. Après de rudes combats, il est contraint de battre en retraite. C'est le pire échec de toute sa carrière. Mais les dieux ne sont pas très loin et vont bientôt lui accorder à nouveau leur soutien. Vercingétorix, en effet, estime que la victoire est incomplète et décide de poursuivre César. Il le rejoint et charge l'armée romaine avec sa cavalerie. L'attaque échoue et les Gaulois doivent se replier et s'enfermer dans Alésia. César assiège aussitôt la ville. Après un peu plus de six semaines de siège, Vercingétorix et ses guerriers, isolés et n'ayant plus de vivre, tentent quelques courageuses sorties. Elles tournent toutes à l'échec. Vaincus, les Gaulois capitulent. Vercingétorix restera six ans prisonnier à Rome avant d'être mis à mort. Il avait environ 26 ans.

À la fin de l'an 52 avant Jésus-Christ, la Gaule, mis à part quelques révoltes sporadiques d'irréductibles Gaulois, est conquise. De cette campagne, longue et difficile, César revient avec une énorme puissance. Il dispose d'un butin considérable mais, surtout, il se retrouve à la tête de plusieurs légions réputées invincibles et dont les hommes sont dévoués corps et âme à leur chef. Mais au cours de cette même année, Rome connaît de nombreux troubles. Des partis s'opposent activement et la ville est le théâtre d'émeutes et de bagarres quotidiennes. Le Sénat, dans l'espoir de mettre un terme à tous ces débordements de violence, accorde les pleins pouvoirs à Pompée, qui se retrouve seul aux commandes de l'État.

Mais à la tête de ses troupes, l'ambitieux César représente une menace pour l'État et, par le fait même, pour Pompée. Ce dernier prend donc l'initiative et presse le Sénat de sommer César d'abandonner son commandement et de licencier son armée. Rentrer à Rome sans la protection et l'appui de ses fidèles soldats, c'est, pour César, se livrer pieds et poings liés à ses adversaires. Il décide donc de transgresser les ordres. Dans la nuit du 11 au 12 janvier 49, César s'adresse à ses légionnaires : «Jusqu'à ce moment, nous pouvons encore revenir en arrière. Mais une fois passé ce pont, tout devra être réglé par les armes... Allons où nous appellent les signes des dieux et l'injustice de nos ennemis.» Puis, tout juste avant de faire le pas décisif, il lance : «Le sort en est jeté (Alea jacta est).» À la tête de sa XIIIe légion, César franchit alors le Rubicon, ce petit fleuve qui marque la frontière entre la province gauloise et le territoire métropolitain.

La République romaine avait prévu cette situation où un chef militaire à la tête d'une armée victorieuse se retrouverait aux frontières du pays. Pour apaiser la convoitise d'un chef trop avide de pouvoir, le Sénat avait voté une loi interdisant à tout général romain de franchir, à la tête de ses troupes et sans en avoir reçu l'ordre, la frontière séparant sa province du territoire métropolitain. Par le geste qu'il vient de faire, César s'est donc rendu hors la loi. Mais il a pris sa décision et marche résolument sur Rome. Il lui faudra quatre années pour venir à bout des armées pompéiennes et ainsi se hisser au sommet de l'État romain. Dans sa longue marche vers le pouvoir, César s'empare d'abord de l'Italie. Ceci lui permet, à la fin de 49, de rentrer à Rome en conquérant et, l'année suivante, de se faire octroyer le consulat, c'est-à-dire l'autorité suprême, qu'il doit toutefois assumer en association avec un autre magistrat. Tout cela lui permet également de renouer avec la légalité. Pompée, qui a fui Rome avant l'arrivée de César, n'est plus alors qu'un usurpateur. C'est donc tout à fait légitimement que César se dispose à en finir avec son rival. Ainsi, dans le petit matin d'une journée d'été de l'an 48, deux armées romaines se font face dans la plaine de Pharsale, en Thessalie (Grèce). À midi, tout est terminé. Les troupes de Pompée n'ont pas fait le poids devant les vieux légionnaires de César rescapés de tant de guerres. Pompée s'enfuit alors en Égypte où il est assassiné par les agents du roi Ptolémée XIV, époux et frère de Cléopâtre.

Débarrassé de son rival, César doit maintenant réduire le parti pompéien, qui tente de se regrouper. C'est d'abord une victoire à Thapsus en Afrique. Puis enfin la bataille victorieuse et décisive contre les deux fils de Pompée à Munda, en Espagne. En 45 avant Jésus-Christ, César peut regagner l'Italie en triomphateur.

Détenant désormais la force des armes, la richesse et l'appui du peuple, César est bel et bien le maître incontesté de Rome.

Le fin mot de l'histoire: «Je n'ai rien d'autre à offrir que du sang, de la peine, des larmes et de la sueur» -- Winston Churchill

Pierre Rousseau
Historien et archiviste


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libre opinion et Histoire :: Commentaires

mihou
Re: libre opinion et Histoire
Message Mer 30 Aoû - 1:31 par mihou
Édition du lundi 21 juillet 2003

L'histoire, la grande, retient souvent quelques phrases qui traversent le temps mais dont le contexte s'efface des mémoires. Le Devoir publie, tous les lundis de l'été, des textes qui rappellent où, quand, comment, pourquoi des paroles qui deviendront célèbres ont été prononcées.


Le krach boursier qui se produit à Wall Street à la fin du mois d'octobre 1929 déclenche une grave crise économique aux États-Unis, bien sûr, mais également un peu partout dans le monde. Dès le début des années 30, la situation est particulièrement désastreuse en Allemagne dont l'économie dépend largement des États-Unis. Ainsi, en 1931, plus de six millions de travailleurs allemands se retrouvent sans emploi. Il s'agit là d'une situation rêvée pour tout dictateur en quête de pouvoir.

Le mouvement national-socialiste voit sa popularité croître de façon magistrale. Alors qu'en 1928, le parti nazi ne recueillait que 2,6 % des intentions de vote, il obtient aux élections de juillet 1932 un peu plus de 37 % des voix. Les nationaux-socialistes représentent désormais une force politique dont il faut tenir compte.

Convaincus de pouvoir facilement contrôler et dominer Hitler, les milieux conservateurs réussissent à le faire nommer au poste de chancelier. Dix-huit mois plus tard, en août 1934, Adolf Hitler a réussi à transformer l'Allemagne en dictature et à en devenir le chef suprême.

Au cours de ces quelques mois, il a, entre autres, détruit tous les partis politiques sauf le sien, anéanti les syndicats, incarcéré de nombreux opposants au régime et déclenché les persécutions contre les Juifs. Après avoir mis l'Allemagne à sa main, Hitler se tourne vers le reste de l'Europe.

En mars 1936, les troupes allemandes réoccupent la Rhénanie. Démilitarisée suite à la Première Guerre mondiale, cette région de l'ouest de l'Allemagne formait jusque-là une zone tampon entre ce pays et la France. Encouragé par le peu de résistance opposée à son action par les deux puissances européennes que sont la France et l'Angleterre, Hitler se tourne résolument vers son «espace vital». Deux ans plus tard, soit le 15 mars 1938, le rattachement de l'Autriche à l'Allemagne (Anschluss) est proclamé. En septembre de la même année, la Tchécoslovaquie est démembrée et la région des Sudètes, où habitent une population d'origine allemande, est elle aussi annexée au Reich. Au début de l'année suivante, toute la Tchécoslovaquie tombe sous la domination nazie. Enfin, le 1er septembre 1939, les troupes hitlériennes envahissent la Pologne.

Cette fois, la France et l'Angleterre ne peuvent plus tergiverser et laisser faire en espérant, encore une fois, qu'il s'agit-là de la dernière exigence du dictateur nazi. Le 3 septembre, les deux pays déclarent la guerre à l'Allemagne. Pendant quelques mois, chacun s'observe. Puis le 10 mai 1940, Hitler met fin à cette «drôle de guerre» en lançant ses armées contre les Pays-Bas, la Belgique et la France.

Le même jour, à cause, notamment, de l'échec de sa politique d'apaisement qui visait à éviter la guerre à tout prix et qui permit par le fait même à Hitler d'agir à sa guise, Neville Chamberlain est contraint de démissionner. Winston Churchill le remplace aussitôt au poste de premier ministre britannique. Le pays a maintenant le sentiment d'être dirigé par un chef capable de tenir tête au dictateur allemand. Trois jours plus tard, le 13 mai, Churchill se présente devant la Chambre des communes pour y exposer l'action gouvernementale qu'il prévoit mettre en oeuvre. Alors que son discours s'achève, Churchill prononce ces paroles qui retentissent à travers toute l'assemblée : «Je n'ai rien d'autre à offrir que du sang, de la peine, des larmes et de la sueur.» Puis, il ajoute : «Nous avons devant nous une épreuve des plus douloureuses. Nous avons devant nous de nombreux et longs mois de combat et de souffrance.» Malheureusement, Churchill ne peut être plus près de la vérité.

À peine quelques semaines plus tard, la France capitule. L'Angleterre est désormais le seul pays européen encore capable d'opposer une quelconque résistance aux armées nazies. Hitler offre alors à l'Angleterre de signer un traité de paix. Churchill refuse. Cette fermeté face à l'adversité, dont fera preuve leur premier ministre, encouragera les Britanniques à garder courage tout au long de la bataille.

À la fin de l'été 1940, la bataille d'Angleterre s'engage. Le plan allemand prévoit le débarquement de troupes terrestres sur les côtes sud de l'île. Mais pour pouvoir transporter les hommes sur les côtes anglaises, il faut empêcher les attaques de l'aviation britannique. Il revient donc à la Luftwaffe allemande d'acquérir la maîtrise du ciel.

Au mois d'août, les combats aériens s'intensifient. L'aviation anglaise s'avère beaucoup plus coriace que prévu, si bien qu'en une seule journée elle fait subir à la Luftwaffe la perte de 75 appareils alors qu'elle n'en perd que 34. Dominée lors des combats aériens, l'aviation allemande change de tactique. Désormais, inlassablement, les pilotes de la Luftwaffe bombardent aéroports, usines d'avions et stations radar. Le calcul est bon. La Royal Air Force chancelle alors que plusieurs appareils sont détruits. De plus, toutes ces attaques épuisent les pilotes anglais qui sont placés en état d'alerte pratiquement 24 heures sur 24.

Puis, encore une fois, l'état-major allemand change de stratégie. Il s'agit maintenant de bombarder Londres et certains autres centres urbains dans l'espoir de briser la résistance britannique en terrorisant la population civile. Erreur fatale car non seulement la volonté de vaincre de la population croît avec les épreuves, mais l'aviation de chasse britannique profite de l'occasion pour refaire ses forces. Ayant retrouvé son mordant, elle brise une attaque massive de l'aviation allemande au cours de l'automne de 1940. Devant l'incapacité de vaincre l'aviation britannique, Hitler renonce à son projet d'invasion.

Les bombardements se poursuivront encore plusieurs mois. Toutefois, jamais les Anglais ne verront les armées allemandes envahir leur île. Ils avaient freiné l'irrésistible avance nazie.

Le fin mot de l'histoire: «Dieu vengera notre mort» -- Jacques de Molay

Pierre Rousseau
Historien et archiviste

Édition du lundi 18 août 2003

L'histoire, la grande, retient souvent quelques phrases qui traversent le temps mais dont le contexte s'efface des mémoires. Le Devoir publie, tous les lundis de l'été, des textes qui rappellent où, quand, comment, pourquoi des paroles qui deviendront célèbres ont été prononcées.


Au début du IVe siècle, les pèlerinages sont déjà nombreux vers cette Terre sainte si chère aux chrétiens. Jérusalem ne cesse d'attirer les pèlerins qui se recueillent en grand nombre sur l'emplacement du Golgotha et sur le tombeau du Christ.

Mais au cours des siècles suivants, les musulmans s'emparent des Lieux saints. Diverses ententes entre musulmans et chrétiens permettent toutefois aux pèlerins de continuer à parcourir ces longues routes qui mènent à Jérusalem. Mais, les invasions turques, vers le milieu du XIe siècle, rendent désormais pratiquement impossible tout pèlerinage.

En 1095, le pape Urbain II appelle alors les chrétiens à la reconquête de Jérusalem et à la libération du tombeau du Christ. C'est le début des Croisades. Le souhait du pape se réalise quatre ans plus tard, lorsque, le 15 juillet 1099, les croisés s'emparent de la Ville sainte après un siège de quarante jours. Mais si les croisés tiennent Jérusalem, il n'en est pas de même pour la plupart des chemins qui y mènent. Toujours sous contrôle musulman, ces routes demeurent dangereuses pour les voyageurs chrétiens.

Ainsi, en 1118, Hugues de Payns, un chevalier champenois pieux et valeureux, fonde avec quelques compagnons un ordre de moines-soldats afin d'assurer la défense des pèlerins. Ils prennent le nom de «Pauvres chevaliers du Christ». Leurs services étant dès le départ fort appréciés, le roi de Jérusalem, Baudoin II, leur cède, bientôt, l'emplacement de l'ancien Temple de Salomon. Les membres de l'ordre adoptent alors le nom de «Chevaliers du Temple» ou plus simplement Templiers.

Au cours des deux siècles que durent les Croisades, ces soldats du Christ, en plus de fournir une aide constante aux pèlerins, participent à de nombreuses batailles. Mais avec les années et parallèlement au combat qu'ils mènent en Terre sainte, les Templiers s'enrichissent énormément. Comme Cluny et Cîteaux avant eux et les ordres mendiants après, les ordres militaires, particulièrement les Templiers, connaissent l'engouement des fidèles et reçoivent ainsi de nombreuses donations. Par exemple, de grandes familles seigneuriales pourront léguer des domaines entiers avec tous les revenus qui leurs sont rattachés. La grande renommée de courage et de droiture qui sera pendant longtemps celle des Templiers fera en sorte de multiplier ces donations.

Tant que les Croisades se poursuivent et que les richesses du Temple sont utilisées à la protection des pèlerins et à la défense du Saint-Sépulcre, personne ne proteste d'autant plus que les Templiers paient de leur vie ces responsabilités envers les Lieux saints. Mais l'opinion change après la perte définitive de la Terre sainte. De retour en Europe, ils ne sont bientôt plus perçus que comme de riches propriétaires qui, de surcroît, sont exempts de nombreuses taxes que le peuple, lui, doit payer. Cette baisse de popularité ne suffit toutefois pas à justifier le sort tragique qui les attend. Les motivations du roi de France pèsent assurément beaucoup plus lourd.

Les motifs qui pousse Philippe le Bel à faire arrêter tous les Templiers de son royaume ne sont pas clairs. Craint-il la présence d'une armée dévouée au pape sur son territoire; envie-t-il la richesse du Temple, lui qui est toujours en quête de revenus; croit-il vraiment aux calomnies colportées contre les Templiers; veut-il, en s'attaquant à une institution qui relève directement du pape, tenter de démontrer à ce dernier que dans son royaume le roi de France est le maître.

Quelle que soit la raison, le 13 octobre 1307 tous les Templiers de France sont arrêtés. Ils sont accusés, entre autres, de renier Jésus-Christ et de cracher sur un crucifix lors de la cérémonie au cours de laquelle les nouveaux membres sont reçus. Sous la torture, la plupart des accusés admettent tout ce que leurs bourreaux veulent leur faire avouer. Ces aveux et la pression exercée par le roi et son entourage incitent finalement le pape Clément V à abolir l'ordre. Il ne reste plus qu'à faire comparaître ses dignitaires.

Le 18 mars 1314, sur le parvis de Notre-Dame de Paris, Jacques de Molay, Hugues de Pairaud, Geoffroy de Charnay et Geoffroy de Gonneville sont condamnés à la prison à vie. Mais retrouvant leur courage, Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay se lèvent aussitôt. Devant la foule stupéfaite, le maître proteste hautement et solennellement de leur innocence. L'ordre est saint et la règle du Temple est sainte, juste et catholique. Toutes les calomnies et les fautes qui leur sont imputées sont fausses. Ils n'ont commis qu'un seul crime, celui de se livrer à de faux témoignages dans l'espoir de sauver leur vie. Les deux dignitaires, pour être revenus sur leurs aveux, sont immédiatement condamnés à mort.

Le soir même, Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay montent sur le bûcher. Alors que les flammes les entourent, Jacques de Molay prononce ces paroles qui sont aussi ses dernières : «Dieu vengera notre mort.» Moins d'un an plus tard, le pape Clément V et le roi de France Philippe IV le Bel, tous deux responsables à leur façon de la fin du Temple, meurent à leur tour.

Il est possible, bien que fort peu probable, que Jacques de Molay, certain de l'injustice de cette condamnation et confiant en la justice de Dieu, ait prononcé, voyant la mort venir, ces quelques mots demeurés dans la mémoire des siècles.

Par contre, une chose est sûre, ces deux disparitions ont bouleversé la population, d'autant plus que les ultimes protestations et la mort courageuse de Jacques de Molay et de Geoffroy de Charnay l'avaient beaucoup émue.

À partir de cette réalité, il est tentant de conclure que les contemporains virent dans ces deux morts le signe de la vengeance de Dieu contre ceux qui avaient injustement fait périr ses dignes serviteurs.

Le fin mot de l'histoire: «I have a dream» («Je fais un rêve») -- Martin Luther King

Pierre Rousseau
Historien et architecte
mihou
Re: libre opinion et Histoire
Message Mer 30 Aoû - 1:31 par mihou
Édition du lundi 11 août 2003

L'histoire, la grande, retient souvent quelques phrases qui traversent le temps mais dont le contexte s'efface des mémoires. Le Devoir publie, tous les lundis de l'été, des textes qui rappellent où, quand, comment, pourquoi des paroles qui deviendront célèbres ont été prononcées.


En 1863, Abraham Lincoln abolit l'esclavage. Les anciens esclaves et leurs descendants devront toutefois lutter encore longtemps avant de pouvoir aspirer à l'égalité avec les Blancs. Dès la fin du XIXe siècle, en effet, tout est mis en oeuvre, notamment par le Ku Klux Klan, pour maintenir les Noirs dans une situation d'infériorité. Si bien, qu'au début du XXe siècle, un véritable régime d'apartheid prévaut dans les États du Sud

Des pancartes «Réservé aux Blancs» leur rappellent constamment qu'ils doivent s'asseoir à l'arrière des autobus, utiliser, dans les trains, des wagons qui leur sont spécialement attribués, manger derrière un rideau dans les wagons-restaurants afin que les Blancs n'aient pas à subir leur présence et entrer par une porte de côté, s'ils désirent aller au cinéma. Ces quelques exemples représentent bien peu à côté des tortures et des lynchages dont ils sont encore victimes au cours des années 1950.

C'est à cette époque que Martin Luther King devient une figure marquante du mouvement des droits civiques. Dans les années 1950, la ségrégation dans les autobus est particulièrement humiliante. Ainsi par exemple, les Noirs doivent payer leur billet à l'avant redescendre puis entrer par la porte arrière, rester debout même si un siège réservé aux Blancs est libre et supporter les insultes des chauffeurs blancs. La plupart du temps, ils acceptent ces vexations. Mais en 1955, à Montgomery, une passagère en a eu assez.

Le 1er décembre, Rosa Parks est assise lorsque le chauffeur lui ordonne de laisser sa place à un Blanc. Elle refuse. Elle est aussitôt arrêtée. Le soir même, la décision est prise d'entreprendre le boycott des autobus. Dès le premier jour, l'opération est un franc succès. Les autobus sont vides tandis que la ville regorge de taxis, de bicyclettes et de piétons. Cette même journée, Rosa Parks est condamnée à payer une amende de dix dollars pour avoir violé les lois locales de ségrégation.

Afin de coordonner encore mieux l'action, l'Association pour la Promotion des Noirs de Montgomery est fondée. Martin Luther King est élu président à l'unanimité. Le jeune mouvement des droits civiques vient de trouver son porte-parole.

Malgré le pacifisme du mouvement, plusieurs personnes sont arrêtées et de nombreux actes d'intimidations sont perpétrés par des Blancs. Malgré tout, le boycott ne fléchit pas. Acculée à la faillite, la compagnie d'autobus met fin aux mesures discriminatoires. En novembre 1956, la Cour suprême des États-Unis déclare inconstitutionnelles les lois imposant la ségrégation dans les transports. C'est une première victoire pour la doctrine de la non-violence prônée par Martin Luther King. Une vieille dame, qui comme plusieurs avait participé au boycott en se déplaçant à pied, déclara «mes pieds sont fatigués, mais mon âme est reposée».

L'année suivante, Martin Luther King participe à plusieurs manifestations et prononce de nombreux discours. Il insiste toujours sur la nécessité de pratiquer la non-violence. Et il a raison car cette forme de lutte contre la ségrégation permet de faire des progrès remarquables pour l'intégration dans les restaurants, les transports, les bibliothèques et tout autres lieux publics.

Mais au début des années 1960, il reste encore énormément à faire. Le mouvement des droits civiques se tourne alors vers la ville de Birmingham qui compte en 1963 les ségrégationnistes parmi les plus radicaux des États-Unis. Les leaders du mouvement savent que la partie sera extrêmement dure, mais ils sont également persuadés que s'ils gagnent à Birmingham, des pans entiers de ségrégation tomberont dès lors dans tout le pays.

Martin Luther King décide que la bataille qui s'engage ne portera que sur la déségrégation dans les magasins. Il sait qu'il est plus efficace de diriger tous les efforts vers une seule revendication à la fois. Des volontaires noirs entrent alors dans les magasins qui leur sont interdits. Puis des marches quotidiennes ont lieu sur l'hôtel de ville. Mais bientôt, l'ampleur du mouvement fait perdre patience aux policiers qui usent alors de violence contre les manifestants pacifistes. Mais Personne ne recule. Les autorités n'ont pas le choix et signent un accord donnant satisfaction aux revendications des Noirs. Tel que prévu, la victoire de Birmingham amène rapidement des milliers de villes du Sud à cesser toute ségrégation.

La même année, afin de célébrer le centième anniversaire de l'abolition de l'esclavage, le mouvement des droits civiques décide d'organiser une marche devant le monument d'Abraham Lincoln à Washington. Le 28 août, 250 000 personnes répondent à l'appel. C'est à cette occasion que Martin Luther King prononce son discours mémorable. Devant cette foule rassemblée par l'espoir de voir l'avènement d'un monde plus juste, il lance ces paroles magnifiques : «Je vous dis aujourd'hui, mes amis, que malgré les difficultés et les frustrations du moment, je fais quand même un rêve [...] Je fais le rêve que mes quatre petits enfants vivront un jour dans un pays où on ne les jugera pas à la couleur de peau mais à la valeur de leur caractère.» Tous sentent qu'ils vivent un moment unique.

L'année suivante, le président Lyndon Johnson signe la loi sur les droits civiques. Désormais, ceux qui sont égaux devant Dieu, le seront également dans les isoloirs, dans les écoles, dans les hôtels, dans les restaurants et dans tous les autres lieux au service du public. L'époque des pancartes «Réservé aux Blancs» est bel et bien révolue.

Martin Luther King luttera encore quatre années pour que continue de s'amenuiser l'écart qui, malgré la loi, existe toujours entre les Noirs et les Blancs. Mais ce combat pacifiste prendra fin le 4 avril 1968 lorsqu'il tombera sous les balles de son assassin. Il avait 39 ans.

Sur sa pierre tombale sont inscrits ces mots tirés d'un ancien chant d'esclaves et qu'il prononça à la toute fin de son célèbre discours du 28 août 1963 : «Enfin libre, enfin libre. Grâces en soient rendues au Seigneur tout-puissant, je suis enfin libre.»

Le fin mot de l'histoire: «Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens.» - Arnaud Amaury

Pierre Rousseau
Historien et archiviste
Édition du lundi 30 juin 2003

L'histoire, la grande, retient souvent quelques phrases qui traversent le temps mais dont le contexte s'efface des mémoires. Le Devoir publiera, tous les lundis de l'été, des textes qui rappellent où, quand, comment, pourquoi des paroles qui deviendront célèbres ont été prononcées.


La décadence morale qui frappe l'Occident autour de l'an mil encourage l'apparition de mouvements religieux réformateurs. De la même manière, la déchéance du clergé, dont les moeurs sont loin d'être exemplaires, augmente l'ampleur des critiques contre l'Église et favorise un retour à la pureté religieuse des premiers chrétiens. Ainsi, le détachement envers les richesses matérielles et l'imitation du Christ que prônent les hérétiques attirent à eux une partie de la population.

Pour combattre la popularité des mouvements hérétiques, l'Église propose une oeuvre de restauration spirituelle qui, à la fin du XIe siècle, se traduira par la réforme grégorienne, qui luttera notamment contre le relâchement des moeurs du clergé et contre l'achat et la vente de choses spirituelles telles que les sacrements.

Malgré les succès de cette réforme, dont le pape Grégoire VII est l'un des principaux artisans (d'où le nom de réforme grégorienne), les hérésies continuent de se développer et sont présentes dès le début du XIIe siècle dans un certain nombre de régions. Si bien qu'une cinquantaine d'années plus tard, le catharisme est déjà solidement implanté dans le Languedoc.

La doctrine cathare, contrairement au catholicisme selon lequel Dieu est le créateur de toutes choses, impute au diable la création du monde matériel. Rejetant ainsi tout ce qui vient du monde visible, les cathares professent que Jésus n'a eu qu'une apparence humaine. Puisqu'il ne s'est pas incarné, Jésus ne peut être présent lors de l'eucharistie, c'est-à-dire que le pain et le vin ne se transforment pas en corps et en sang. La transsubstantiation, si chère au catholicisme, est ainsi niée.

Il est bien évident que l'Église catholique ne peut accepter la propagation d'une telle doctrine, qui ne fait que corrompre et éloigner du vrai salut l'âme des fidèles. Mais il lui est impossible de vaincre par la seule prédication une doctrine soutenue et protégée par les élites locales. Comme la persuasion ne suffit pas, il faut trouver autre chose. Ce sera la croisade contre les Albigeois, nom donné aux cathares du sud de la France.

Au début de juillet 1209, les croisés quittent Lyon en direction du sud. La première grande cité à s'ériger devant eux est Béziers. Le 21 juillet, l'armée croisée dispose ses tentes en vue d'un siège. Dans l'espoir de négocier, l'évêque de la ville rejoint le camp ennemi. Il revient avec la proposition suivante : Béziers sera épargnée si les catholiques consentent à livrer leurs concitoyens reconnus pour leurs croyances hérétiques. Le marché est rejeté avec indignation. En plus d'un soutien total envers ses concitoyens cathares, il faut voir dans ce refus de la population catholique la ferme volonté de préserver les libertés de sa ville. Les habitants de Béziers sont bien conscients qu'il s'agit de conserver leur indépendance face aux grands seigneurs du nord. Les croisés doivent bien comprendre que les catholiques du sud feront passer leurs intérêts nationaux avant tous les autres. Dès le départ, cette guerre religieuse prend un caractère de résistance nationale qu'elle gardera jusqu'au bout.

Le lendemain, 22 juillet, une tranquillité relative règne dans les deux camps. Les croisés ne sont pas prêts à attaquer et les assiégés, bien à l'abri derrière leurs murailles, ne semblent guère effrayés. Mais soudain se produit un étrange événement que les chroniqueurs catholiques qualifieront plus tard de faveur de la divine providence. Quelques assiégés effectuent une sortie afin de ridiculiser l'ennemi. Trop sûrs d'eux-mêmes, ils en viennent aux coups avec quelques adversaires installés près des murailles. Voyant cela, un des chefs croisés crie le signal de l'attaque. La force de la charge oblige les habitants de Béziers à fuir.

C'est alors que le drame se joue. Les croisés arrivent aux portes de la ville en même temps que les fuyards et réussissent à y pénétrer, suivis de peu par toute l'armée alertée par le bruit de l'échauffourée. C'est à ce moment, alors qu'ils envahissent la ville, que des croisés demandent à Arnaud Amaury, légat du pape, comment distinguer les hérétiques des catholiques. Sa réponse est expéditive et sans appel : «Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens.» Partout dans la ville règnent alors tueries et massacres. Des milliers de personnes périssent. Après quelques heures, la riche ville de Béziers n'est plus qu'une ville pillée, ruinée et jonchée de cadavres. Inspirés par une telle victoire, les croisés poursuivront la lutte dans tout le Languedoc.

Il est malheureusement impossible d'affirmer qu'Arnaud Amaury a bel et bien prononcé cette parole devenue célèbre. Elle traduit bien, par contre, l'état d'esprit de ces croisés qui combattirent l'hérésie cathare. Ainsi, pour les grands seigneurs du nord, il était convenu de passer par l'épée tous ceux qui leur résisteraient. Arnaud Amaury, de son côté, sut également se montrer digne d'une telle déclaration lorsqu'il écrivit au pape Innocent III : «Les nôtres, n'épargnant ni le sang, ni le sexe, ni l'âge, ont fait périr par l'épée environ 20 000 personnes et, après un énorme massacre des ennemis, toute la cité a été pillée et brûlée. La vengeance divine a fait merveille.»

Malgré sa violence, la croisade contre les Albigeois (1209-1229) sera, du point de vue religieux, un échec. Le catharisme se maintiendra, en effet, encore longtemps dans le midi de la France. Il faudra attendre la prise de la fameuse forteresse de Montségur en 1244, où périront sur le bûcher plus de 200 hérétiques, pour que le mouvement cathare décline de plus en plus jusqu'à sa disparition totale au début du XIVe siècle.

Le grand gagnant de cette croisade sera finalement le royaume de France qui, par le traité de Meaux-Paris signé en 1229, mettra en place le mécanisme infaillible qui mènera au rattachement du Languedoc à la couronne française.
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