L’immigration choisie ne sert pas le co-développement
Anne-Marie Mouradian
(Photo RFI)
Le commissaire européen au Développement s’est montré fort critique cette semaine envers le ministre français de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, et son programme d’immigration à la carte. « Les pays en développement ont besoin de leurs techniciens, de leurs médecins et de leurs infirmières. Personne ne me fera croire que la politique d’accueil à la carte en fonction de nos intérêts, à nous pays riches, sert le développement », a martelé Louis Michel à l’occasion de sa rencontre, jeudi à Bruxelles, avec le président de la région des Canaries.
Adan Martin Menis était venu demander l’aide de l’Europe en insistant sur le drame des enfants africains de 10, 12 ans, de plus en plus nombreux à tenter la traversée jusqu’à l’archipel espagnol. Ils étaient 400 lors de la dernière vague migratoire. Et depuis l’entrée en vigueur de la loi sur les mineurs, l’Espagne est tenue de les loger, de les nourrir et de les scolariser.
Le gouvernement des Canaries demande à l’Union européenne de renforcer ses programmes de développement dans les pays d’origine des jeunes migrants pour les retenir sur place. Bruxelles est d’accord pour cofinancer des projets de formation professionnelle et d’accompagnement vers une première activité au Mali, en Mauritanie, au Sénégal et au Cap Vert. Les ressources financières disponibles seront identifiées avant la fin de ce mois.
La Commission européenne prévoit pour septembre une rencontre avec l’Espagne, la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l'Ouest) et l’Union africaine pour lancer une première série de projets pilotes, tout en rappelant qu’il n’y a pas de solution miracle et que l’effet escompté ne se fera sentir qu’à moyen terme.
Dans le même temps, l’Union européenne met ses délégations en Afrique de l’Ouest au service de la diplomatie espagnole pour intensifier le dialogue avec les pays d’immigration. Car rien ne sert, insiste Bruxelles, de demander aux pays africains de reprendre leurs émigrés clandestins si on ne les aide pas à trouver des solutions pratiques pour les retenir sur place. Tout en espérant que la grande conférence Europe-Afrique qui sera consacrée à l’immigration, début juillet à Rabat - la première du genre au niveau politique - ne se limitera pas à une grand messe.
par Anne-Marie Mouradian
http://www.rfi.fr/actufr/articles/078/article_44305.asp
[10/06/2006]