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 Esclavage : Bordeaux refuse de noircir son image

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mihou
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07062005
MessageEsclavage : Bordeaux refuse de noircir son image

Esclavage : Bordeaux refuse de noircir son image

La ville du vin peine à assumer son passé de deuxième port négrier de France.
Esclavage : Bordeaux refuse de noircir son image

Par Michaël HAJDENBERG
mardi 24 mai 2005



Bordeaux correspondance

alors que le 10 mai pourrait devenir officiellement en 2006 la Journée nationale de la mémoire de l’esclavage, Bordeaux continue de se désintéresser de son histoire. Quelques associations, de rares historiens ont beau se démener, la municipalité temporise, réfléchit. Près de cent quatre-vingt-dix ans après l’interdiction de la traite des Noirs, le mémorial tant attendu n’est toujours pas construit.

Projet. Vendredi dernier, pourtant, un comité de parrainage, présidé par l’écrivain Patrick Chamoiseau, a présenté à la presse un projet de mémorial. Parmi la trentaine de personnalités du comité figurent notamment Alain Rousset, le président (PS) du conseil régional, et Noël Mamère, le maire (Verts) de Bègles. Une architecte a proposé un lieu sur les quais. Déjà, le 10 mai, Karfa Diallo, président de l’association Diverscités et principale cheville ouvrière de ce projet, avait plaidé cette cause devant le maire (UMP) de Bordeaux, Hughes Martin, en lui remettant un cahier de doléances et une pétition.

Le combat ne date pas d’hier. Les revendications apparaissent au milieu des années 90, avec la parution en 1995 du livre de l’historien Eric Saugera, Bordeaux port négrier. L’ouvrage de référence dénombre plus de 500 expéditions négrières en partance de Bordeaux entre 1729 et 1826 (date du dernier convoi pratiqué dans l’illégalité) ayant conduit à la déportation d’environ 150 000 Africains. C’est certes beaucoup moins que Nantes (environ 450 000 Africains sont passés par le port de Loire-Atlantique), mais cela suffit à faire de la capitale de la Gironde le deuxième port négrier de France.

«Pourtant, avant que je commence mon travail, en 1985, rien n’avait été fait, s’étonne Eric Saugera. Je n’ai trouvé en tout et pour tout qu’un mémoire de maîtrise sur cette question.» L’historienne Hélène Sarrazin raconte : «Quand il a écrit son livre, on s’est demandé, au musée de l’Aquitaine : mais de quoi il se mêle celui-là ? Et d’où vient-il avec ce nom ?» De Nantes, et c’est tout sauf un hasard. «Car, pour un Bordelais, écrire sur le sujet, c’était le meilleur moyen de se griller avec la haute société de la ville», explique Eric Saugera.

Nantes a assumé son passé en 1992. L’Assemblée nationale a reconnu la traite et l’esclavage comme des crimes contre l’humanité en 2001. Mais Bordeaux ne bouge toujours pas. Depuis 1995, deux livres seulement ont été écrits sur le sujet, et une thèse, par une... Australienne.

«Somnolence». Les intellectuels noirs de la ville parlent de «refoulement». Mar Fall, un sociologue venu du Sénégal il y a trente et un ans, évoque une «culpabilité enfouie». Raphaël Lucas, lui aussi universitaire, d’un «lieu d’amnésie et de somnolence». Pour couvrir ce silence, Karfa Diallo, étudiant en droit d’origine berbéro-sénégalaise, a donc créé Diverscités. Depuis neuf ans, l’association organise une marche du souvenir chaque année, avec plus ou moins de réussite. Elle a aussi demandé à la mairie de débaptiser les rues portant les noms de familles ayant participé de près ou de loin à la traite des Noirs avant de se raviser et d’exiger la pose d’une plaque explicative aux côtés des plaques d’origine, de façon à ne pas effacer le passé. L’association s’insurge par ailleurs «des mascarons avec des têtes de négroïdes sur certaines façades de la ville». Un type d’action qui ne fait pas l’unanimité, même parmi les militants de la mémoire. Eric Saugera estime ainsi que cela ne sert à rien de vouloir «stigmatiser des noms, des familles, trop souvent dans l’à-peu-près historique. Jusqu’en 1815, la traite était légale. On ne peut pas juger aujourd’hui tous ceux qui y ont participé de près ou de loin».

Rumeurs. Pour que Bordeaux apprenne à se souvenir, un mémorial paraît donc la solution la plus adaptée. D’autant que le manque de connaissances alimente les rumeurs. Une légende assure que des descendants d’esclaves habiteraient encore Bordeaux. Une autre qu’ils étaient entassés sous la place de la Bourse. Pour éviter ces approximations, le saxophoniste de jazz Jean-Jacques Quesada a monté plusieurs projets avec son association Soho Music. Il intervient notamment dans les établissements scolaires et mêle l’art, l’histoire, la sociologie ou la philosophie. Il a réussi à monter l’an dernier un débat en visioconférence entre des lycéens de Bordeaux, de la Martinique, du Gabon et de New York. Mais l’association manque de financements et «la mairie traîne un peu les pieds». Un désintérêt d’autant plus regrettable que, selon Mar Fall, «le degré de connaissance des élèves est souvent proche de zéro».

Alors pourquoi tant de réticences ? La réponse est unanime : «Question d’image.» La ville du vin ne doit pas ternir sa réputation. Contrairement à une idée reçue, parmi les rares familles de descendants, beaucoup semblent prêtes à ouvrir leurs archives, ou l’ont même déjà fait. «Mais les autorités ont peur que cela puisse braquer Bordelais et population immigrées», estime Raphaël Lucas. «Il y a des fantasmes sur les demandes d’éventuelles réparations, qui ne sont pourtant pas du tout à l’ordre du jour», pense Karfa Diallo. «Ils ne veulent pas rouvrir de vieilles plaies. C’est la même chose qu’avec Papon», ajoute Raphaël Lucas.

«Signaux forts. L’anthropologue Christine Chivallon replace le cas de Bordeaux dans un contexte national : «On fait comme si abolition et République allaient de pair, comme si la traite relevait de l’Ancien Régime. L’orientation générale du récit républicain vise donc à confirmer la vision sociale d’une égalité conquise et acquise.»

A la mairie, on estime avoir déjà donné des «signaux forts» au cours des dernières années : une salle du musée de l’Aquitaine est à présent consacrée à la question. Une rue a été baptisée du nom de Victor Schoelcher (ministre français à l’origine de l’abolition) et un square Toussaint-Louverture (révolutionnaire haïtien ayant mené à la libération des esclaves) sera bientôt inauguré. Les deux hommes ne bénéficiaient jusqu’à très récemment que de noms d’impasse. Mais, au goût des associations, cela reste encore bien peu. Hugues Martin affirme sans sourciller que «la meilleure chose à faire, c’est d’accueillir avec humanité les populations africaines». Il met aussi en avant le conseil à l’intégration des étrangers mis en place par la ville, «comme si cela avait un quelconque rapport», s’étonne Mar Fall. Il réfléchit certes à un mémorial, et dit attendre les propositions de Jacques Toubon, chargé par le gouvernement de réfléchir à la question. Pour Hugues Martin, ce mémorial sera consacré à l’histoire du port de Bordeaux, «depuis les constructions maritimes jusqu’aux bassins à flots. Et, à côté de ces heures glorieuses, il pourrait y avoir un endroit, pourquoi pas, sur les heures plus sombres». Et d’ajouter : «Nous avons la conscience tranquille et nous n’avons de leçons à recevoir de personne. Nous n’allons donc pas nous précipiter et prendre le temps d’y réfléchir.»

http://www.liberation.fr/page.php?Article=298579
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