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 A groupe social dominé, mémoire dominée

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mihou
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mihou


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Localisation : Washington D.C.
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18042006
MessageA groupe social dominé, mémoire dominée

A groupe social dominé, mémoire dominée, à communauté marginalisée, histoire marginalisée
07/04/2006

Enfermés en dehors des pôles stratégiques à partir desquels se trament diffusion médiatique, socialisation par l’école et reconnaissance institutionnelle, Africains et Afro-Caribéens continueront d’être entretenus dans le travail de mémoire d’autrui inculqué comme la leur. Une mémoire dominée n’est pas seulement une mémoire enfouie, elle est une mémoire nécessairement substituée et remplacée par la mémoire dominante, les références du passé étant constitutives du penser et de l’agir social présent. Il s’agit là d’un comble puisque Africains et Caribéens vont être socialisés dans une histoire et une mémoire dominantes dont dérivent des conduites et des valeurs d’auto-flagellation, à contresens de leur historicité. Dressés dans le travail mémoriel européen et occidental, nombre de Négro-africains n’auront jamais assez de larmes et de sincère émotion pour les drames de l’humanité, le génocide arménien, l’holocauste, l’extermination des « Indiens », l’évocation de la traite esclavagiste ne leur passera pas par l’esprit ; quand bien même la traite atlantique serait évoquée le sujet autocensuré se garderait de parler de Crime contre l’Humanité, se soupçonnant par avance d’ethnocentrisme et s’en prévenant.

A l’homologie entre l’espace des positions sociales et le champ hiérarchisé des mémoires selon le principe « à groupe social dominé, mémoire dominée, à communauté marginalisée, histoire marginalisée », s’ajoute une caractéristique de positionnement de l’histoire des peuples d’origine africaine dans l’histoire connue et reconnue de l’humanité : la mémoire de l’histoire négro-africaine est une mémoire vaincue, car les sociétés africaines ont été défaites dans leurs derniers affrontements avec les sociétés occidentales. Leur mémoire, marquée des stigmates de ces affrontements est également vaincue, c’est-à-dire humiliée, effacée, nettoyée, désarmée, émasculée. La traite atlantique, ses crimes et déportations, la colonisation, ses chosifications et déstructurations, le racisme érigé en système politique, le néo-colonialisme et ses pseudo indépendances, les domaines, territoires des Caraïbes et leurs autonomies formelles, matérialisent défaites et humiliations. L’histoire imposée du vainqueur, la mémoire dictatoriale qu’il fabrique en sont les suites logiques. Cette colonisation occidentale des champs de la mémoire, des événements, thèses, thèmes, instruments d’analyse, schèmes de pensée se traduit par l’occultation, la folklorisation d’événements historiques concurrents. C’est le sort réservé aux grands empires africains de l’époque précoloniale... C’est aussi le sort réservé aux résistances africaines, nègres face aux réifications réitérées.

Une mémoire vaincue, vaporisée est nécessairement révisée. L’objet de l’histoire écrite par le vainqueur échappe aux Négro-africains, dans sa définition et ses contours. Le sujet invariant est occidental, prométhéen, magnanime, glorifié, excusé, compréhensible... La mémoire du vaincu produite par le vainqueur ne peut ne pas être manipulée, révisée en somme, lorsque l’histoire du plus fort est celle d’une rare muflerie, d’un « ensauvagement » (5). Une telle histoire est indicible aux nations des Droits de l’Homme, terres de libertés, modèles de démocratie... Comment le plus grand nombre concilierait-il l’idée qu’une civilisation aussi avancée, aux préceptes moraux et religieux admis élevés soit si froidement génocidaire ? Et si ce plus grand nombre avait l’idée d’en savoir plus, jusqu’où remonterait-il après les routes de Nantes, Bordeaux, Le Havre, La Rochelle, etc. ? Cette inutile menace qui planerait sur les bases d’une civilisation judéo-chrétienne tellement fière d’elle et autobiographe de sa générosité autorise sans états d’âme quelques raccourcis, falsifications, omissions, disculpations. Par ailleurs, quoique dominés et confinés à des tâches subalternes à la marge des sociétés hégémoniques, les peuples négro-africains vaincus donnent quand ils le peuvent leur version de l’histoire. Une lutte de représentation, de signification, d’interprétation oppose ainsi les victimes et leurs représentants - C.-A. Diop, Ki-Zerbo, Sertima, Williams, Rodney... - aux forces dominantes qui aspirent au monopole de la parole. L’antagonisme est inévitable dans la mesure où pour une même histoire événementielle, les vécus sont exactement aux antipodes les uns des autres. La mémoire de la traite esclavagiste et des servitudes infligées par l’Occident apparaît donc aconsensuelle, ceci d’autant plus qu’à ce jour l’agresseur est le vainqueur, et que, producteur-dictateur de sens, il a le bon droit pour lui...

Les trois caractéristiques de la mémoire négro-africaine, de son histoire traumatique, dominée, vaincue, révisée, impliquent un devoir de résistance, une culture alerte de veille, veille contre la banalisation de l’inique, veille contre les thèses lénifiantes, veille contre les persuasions clandestines, veille contre les révisionnismes de toutes couleurs. Ces révisionnismes endoctrinent à visage couvert les esprits peu avertis parmi lesquels nombre de victimes et descendants d’esclaves. Ils leur extorquent leur pardon et s’emploient à mouler leur indifférence et à affaiblir leur garde. Ainsi des pans entiers de l’histoire des souffrances africaines sont-ils banalisés dans les manuels d’enseignement, ainsi les termes utilisés pour qualifier ces chocs traumatisants sont-ils savamment choisis, au point qu’un décryptage permanent des lectures contemporaines de l’histoire soit impérieux.

C’est cet impératif de contestation d’un travail de mémoire dévoyé qui appelle à une déconstruction des logiques qui historiquement ont produit et renouvelé l’esclavage des Négro-Africains.







Extrait de : Ze Belinga, Production et occidentalité de prédations négrières, in Maîtres Blancs, Esclaves noirs, ouvrage collectif sous la direction de Aggée C. Lomo MYAZHIOM avec les contributions de : Christiane TAUBIRA, Henri BANGOU, Auguste ARMET, Yoporeka SOMET, Kofi Adu MANYAH, Aimé CESAIRE, Buata MALELA, Martial ZE BELINGA, Louis SALA-MOLINS, ... Homnisphères, 2006.


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