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 Etats-Unis - Haïti, par Noam Chomsky 1

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mihou
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mihou


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Localisation : Washington D.C.
Date d'inscription : 28/05/2005

Etats-Unis - Haïti, par Noam Chomsky 1 Empty
30032006
MessageEtats-Unis - Haïti, par Noam Chomsky 1

Alors que la démocratie était, de ce fait, rétablie, la Banque mondiale annonça que « l’Etat restauré doit se concentrer sur une stratégie économique centrée sur l’énergie et l’initiative de la Société civile, plus particulièrement le secteur privé, national comme étranger. » Cela a le mérite d’être honnête : la Société civile haïtienne comprend une minuscule élite privilégiée et des sociétés américaines, mais pas la grande majorité de la population, les paysans et les habitants des taudis qui avaient commis le grave crime de s’organiser pour élire leur président. Les fonctionnaires de la Banque mondiale expliquèrent que le programme néolibéral bénéficierait à la « classe d’affaires plus ouverte, éclairée » et aux investisseurs étrangers, tout en nous assurant qu’il « ne va pas faire de mal aux pauvres comme dans d’autres pays » sujets à l’ajustement structurel, parce que les pauvres haïtiens manquaient déjà de la protection minimale d’une bonne politique économique, telle que les subventions pour les produits de base. Le ministre d’Aristide en charge du développement rural et des réformes agraires ne fut pas avisé des projets à imposer sur cette société majoritairement paysanne pour la faire retourner par les « bons souhaits de l’Amérique » sur les rails desquels elle avait dévié brièvement après l’élection regrettablement démocratique de 1990.

Les affaires ont ensuite poursuivi leur cours prévisible. En 1995, un rapport de l’USAID expliquait que le « commerce par les exportations et la politique d’investissements » que Washington imposait allait « inexorablement faire pression sur les riziculteurs nationaux » qui seraient obligés de se tourner vers l’agro-exportation, avec des bénéfices accessoires pour l’agrobusiness et les investisseurs américains. En dépit de leur extrême pauvreté, ces riziculteurs sont plutôt efficaces mais ne pourraient pas du tout rivaliser avec l’agrobusiness américain, même si ce dernier ne tirait pas 40 % de ses profits des subventions gouvernementales, brusquement augmentées avec les Reaganiens [Bush II] de retour au pouvoir, qui continuent d’offrir une rhétorique éclairée sur les miracles du marché. On lit maintenant qu’Haïti ne peut pas se nourrir, autre signe d’un « Etat en faillite. »

Quelques petites industries pouvaient encore fonctionner, comme par exemple, la production de morceaux de poulet. Mais les conglomérats américains ont un énorme excédent de dark meat [la chair des cuisses de la volaille utilisées comme nourriture] et exigèrent donc le droit de le déverser en Haïti. Ils essayèrent de faire la même chose au Canada et au Mexique, mais là le dumping illégal pouvait être interdit. Pas en Haïti, obligé de se soumettre aux principes de marché efficaces du gouvernement américain et des sociétés qu’il sert.

On pourrait remarquer que le proconsul du Pentagone en Irak, Paul Bremer, avait donné l’ordre d’y établir un programme tout à fait identique, avec les mêmes bénéficiaires en tête. On appelle cela aussi « améliorer la démocratie ». En fait, ce dossier, hautement révélateur et important, date du 18ème siècle. Des programmes identiques avaient eu un énorme rôle à jouer dans la création du Tiers Monde actuel. Pendant ce temps, les puissants ignorèrent les règles, sauf quand ils pouvaient en tirer profit, et réussirent à devenir de riches sociétés développées. De façon spectaculaire, les Etats-Unis, qui ont montré la voix du protectionnisme moderne, plus particulièrement depuis la Deuxième guerre mondiale, se sont appuyés impérativement sur le secteur public dynamique pour l’innovation et le développement, socialisant ainsi le risque et les coûts.

La punition contre Haïti devint plus sévère sous Bush II - il existe des différences à l’intérieur du champ restreint de la cruauté et de la cupidité. L’aide fut supprimée et les institutions financières subirent la pression pour faire de même, sous des prétextes trop saugrenus pour mériter discussion. Le livre de Paul Farmer, Uses of Haiti, et quelques commentaires de la presse actuelle, notamment ceux de Jeffrey Sachs (Financial Times) et Tracy Kidder (New York Times), les étudient en profondeur.

Si l’on met les détails de côté, ce qui s’est passé depuis est étrangement identique au renversement du premier gouvernement démocratique haïtien de 1991. Le gouvernement d’Aristide, une fois encore, a été ébranlé par les planificateurs américains, qui avaient compris, sous Clinton, que l’on peut triompher de la menace de la démocratie si la souveraineté économique est éliminée, tout comme ils avaient sans doute compris que le développement économique serait aussi une faible lueur d’espoir dans de telles conditions, une des leçons les mieux confirmées de l’histoire économique. Les planificateurs de Bush II sont encore plus dévoués à saper la démocratie et l’indépendance, et méprisent Aristide et les organisations populaires qui l’ont amené au pouvoir peut-être encore plus que leurs prédécesseurs. Les forces qui ont reconquis le pays sont principalement des héritières des terroristes militaires et paramilitaires installées par les Etats-Unis.

Les personnes résolues à détourner l’attention du rôle des Etats-Unis feront valoir que la situation est plus complexe - comme c’est toujours vrai - et qu’Aristide était lui aussi coupable de nombreux crimes. C’est vrai, mais s’il avait été un saint, la situation aurait évolué d’une façon peu différente, comme c’était évident en 1994, quand le seul véritable espoir était qu’une révolution démocratique aux Etats-Unis rende possible le changement de politique dans une direction plus civilisée.

Ce qui se passe en ce moment est épouvantable, peut-être irréparable ; et toutes les parties ont de nombreuses responsabilités à court terme. Mais la bonne façon de procéder pour les Etats-Unis et la France est très claire. Ils devraient commencer par payer d’énormes réparations à Haïti (la France est peut-être encore plus hypocrite et scandaleuse que les Etats-Unis à cet égard). Néanmoins, cela demande de construire des sociétés démocratiques qui fonctionnent et dans lesquelles, au minimum, les gens ont la chance de savoir ce qui se passe. Les commentaires sur Haïti, l’Irak et les autres « sociétés en faillite » sont plutôt vrais parce qu’ils soulignent l’importance de surmonter le « déficit démocratique » qui réduit considérablement l’importance des élections. Néanmoins, le corollaire évident n’est pas établi : la leçon s’applique par excellence à un pays où « la politique est l’ombre jetée sur la société par les grandes entreprises » selon les paroles de John Dewey, le philosophe social américain le plus important, qui décrit son propre pays à une époque où le fléau était loin de s’être répandu comme aujourd’hui.

Pour ceux qui se sentent concernés par la démocratie et les droits humains, les tâches élémentaires chez eux sont aussi suffisamment claires. Elles ont été accomplies auparavant, sans le moindre succès, et dans des conditions difficilement comparables ailleurs, comme les bidonvilles et les collines de Haïti. Nous ne sommes pas obligés d’accepter, volontairement, de vivre dans un Etat en faillite qui souffre d’un énorme déficit démocratique.

- Source www.zmag.org

- Traduction : Cendrine Marrouat cendymarrouat@shaw.ca.ns
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