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 Date de célébration des mémoires de l’esclavage

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mihou
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mihou


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03062005
MessageDate de célébration des mémoires de l’esclavage

Date de célébration des mémoires de l’esclavage : La lettre de Christiane Taubira

Date de célébration des mémoires de l’esclavage : La lettre de Christiane Taubira
19/05/200
source:afrikara.com
L’auteure de la loi du 10 mai 2001 criminalisant la traite négrière transatlantique et l’esclavage dans les colonies françaises, Christiane Taubira la députée de Guyane et ancienne candidate à l’élection présidentielle française donne un point de vue très attendu sur la date nationale de célébration des mémoires de l’esclavage.

Le fait est qu’une polémique interne intense, aussi inutile que contre-productive a enflé au sein des postulants et de certaines associations désireuses de faire prévaloir une date de commémoration de l’esclavage plutôt qu’une autre. Quelque fois au prix d’un autisme divisionniste passant à côté de l’essentiel, l’imposition au calendrier à la république d’une reconnaissance complète, institutionnelle et légalement visée d’un crime ayant constitué la France dans sa diversité ethnique contemporaine.

Les agitations des chefs de cour et des opportunistes nouvellement convertis aux vertus du «communautarisme», se réclamant d’une représentativité fictive auprès des médias nationaux, ont semé le doute dans bien des esprits. Le climat ambiant de délégitimation des justes revendications sur l’histoire négrière, coloniale, néocoloniale, alimenté des fables du racisme antiblanc ou du révisionnisme à prétention scientifique , achève de produire une confusion idéologique démobilisatrice.



L’intervention de Mme Christiane Taubira, au dessus d’une mêlée bien médiocre d’entrepreneurs en ethnismes communautaristes, s’imposait donc pour redonner à tous le cap qu’elle seule a su montrer d’une façon constante et sans arrière-pensées depuis plusieurs années…





Christiane TAUBIRA

Députée de Guyane



A tous et à chacun

Ici et sur l’autre rive



Ce 9 mai 2005



N/Réf. : CT/MM-5567

Objet : Date de célébration des mémoires de l’esclavage





Très chers Amis,



Au regard des nombreux courriers et messages que vous m’avez adressés, je vois et j’entends enfler une querelle qui n’a pas lieu d’être. La confusion semble se répandre, troublant bon nombre d’entre vous. Quoique je le regrette profondément, je me trouve dans l’obligation morale de vous soumettre, à défaut de réponse à vos questions, les éléments qui fondent mon point de vue sur le débat en cours.



Ce débat prend l’allure d’une dispute et c’est le pire qui puisse nous arriver en ce moment. La loi 2001-434 (couramment appelée loi Taubira-Delannon) a instauré un Comité de personnalités qualifiées (le CPME) chargé de faire des propositions relatives à divers aspects de son application. En deuxième lecture à l’Assemblée Nationale, nous avions adopté un amendement réservant au sein de ce Comité un collège pour les associations. Elles représentent ainsi un tiers du Comité. Le CPME a remis son rapport au Premier ministre le 12 avril écoulé. Il y propose, entre autres dispositions, que la date du 10 mai correspondant à l’adoption définitive de la loi, soit retenue pour célébrer les mémoires de l’esclavage et de leurs abolitions. Le rapport contient par ailleurs de nombreuses propositions concernant la modification des programmes et manuels scolaires, telle que le prévoit l’article deux de la loi. En l’occurrence, la date de célébration fait l’objet de vives discussions qui, malheureusement, prennent parfois une tournure d’affrontement.



Je vais vous exposer, un peu longuement par souci de précision, mais sans fioriture, mon avis sur la question. En septembre 2004, répondant par écrit au CPME qui procédait à des consultations, j’ai exprimé mon opposition de principe à la date du 27 avril. Ayant constaté que les Autorités françaises, toutes sensibilités politiques confondues, entretenaient avec l’histoire de la traite négrière et de l’esclavage un rapport exclusivement basé sur l’abolition, j’ai considéré qu’il ne fallait pas conforter ce lien, à un moment où nous avions créé les conditions pour avoir notre mot à dire. En conséquence, et malgré l’immense mérite de Victor Schoelcher rédacteur du décret d’abolition du 27 avril 1848, je souhaite rompre avec ce rapport qui glorifie un acte de la deuxième République française et ignore aussi bien l’horreur d’un système d’une extrême violence à laquelle la France a participé en occupant la deuxième place des puissances négrières, que la part déterminante des luttes, insurrections et résistances de toutes formes dans la destruction de l’économie esclavagiste. Hormis cette opposition de principe, argumentée, j’indiquais que je n’avais aucune préférence de date et je suggérais simplement une méthode transversale de réflexion. N’étant pas membre du Comité, je n’ai eu et n’ai aucune connaissance directe de ses travaux internes. J’ai été auditionnée par le Comité en mars 2005. J’ai, en substance, répété mon opposition de principe à la date du 27 avril, rappelé que je n’avais aucune préférence et insisté pour que le Comité examine le bien-fondé de la date du 23 mai. A aucun moment, je n’ai sous-estimé la difficulté de trouver une date qui satisfasse tout le monde, pour témoigner de cette histoire complexe et plurielle qui a englobé trois continents, s’est étendue sur quatre siècles et demi et fut émaillée de tant d’évènements majeurs. J’en ai conclu que le plus important résidait dans la signification de la date qui serait choisie et le contenu des célébrations à venir.



Je continue à penser que la date du 23 mai porte en elle une légitimité. Sans pour autant induire plus de consensus qu’une autre. Je sais bien que le plus grand obstacle demeure cet impossible consensus. Certains d’entre vous m’ont fait part de leur préférence pour d’autres dates, telles que le 8 janvier (évènement religieux), le 27 avril (décret Schoelcher), le 18 mai (adoption du drapeau de la République d’Haïti, première colonie libre), le 21 mai (date de promulgation de la loi), le 22 mai (insurrection à la Martinique), le 25 mai (sacrifice d’Ignace), le 28 mai (sacrifice de Delgrès), le 23 août (insurrection de Saint-Domingue-Haïti) en indiquant qu’en dépit de cette préférence, vous vous ralliez à la date proposée par le Comité. Le mois de mai est un mois qui nous est prolifique, même si nous savons que souvent, les évènements qui ont abouti en mai ont commencé en février.



La date du 10 mai ne me semble pas aberrante, si l’on entend l’argumentation du Comité sur son souci de retenir une date contemporaine plutôt qu’une date du passé, et de prendre en considération la dimension universelle de la définition du « crime contre l’humanité ». Si l’on consent à voir dans l’adoption de la loi l’aboutissement de luttes (même lorsqu’elles ne furent pas articulées entre elles) et l’expression de la parole solennelle de la République française, cette date se trouve à la croisée de la mobilisation civile et d’un acte institutionnel.



Dès lors que, même sans nous procurer la plus grande satisfaction, cette date n’écorche rien de ce qui nous est cher et ne nous renvoie pas, une fois de plus, dans les coulisses passives d’une Histoire qui se ferait pour nous sans nous, je donne acte au Comité de cette proposition et n’y trouve plus rien à redire. Il y a un temps pour le débat, un temps pour la décision, un temps pour l’action.



Est-ce à dire que la date du 23 mai en serait invalidée ? La Martinique continuera à célébrer cette mémoire le 22 mai en hommage à sa grande insurrection, la Guadeloupe le 27 mai pour les mêmes raisons, la Réunion le 20 décembre et la Guyane le 10 juin, dates de la mise en application du décret d’abolition. Ces dates sont protégées par la loi de 2001. Il n’est pas inconcevable que le 23 mai soit en France une date de mobilisation.



L’essentiel est qu’il existe une date officielle à laquelle le Gouvernement, quel qu’il soit, contraint par la loi, invite la Nation française à se souvenir de cette longue période abominable, à s’incliner devant la mémoire de ses victimes et de ses héros, à mobiliser ce jour-là toutes les institutions de la République, qu’il s’agisse des ministères, des universités, des établissements scolaires, des bibliothèques et musées, des centres de recherche, des structures d’art vivant, des logistiques multiples qu’il lui est possible d’actionner. A charge pour nous d’ajouter à cette célébration officielle une dimension populaire, culturelle, artistique, festive ou même spirituelle, de le faire le même jour ou de choisir une autre date pour le faire. La date officielle n’étanche aucune liberté d’initiative. Mais elle donne injonction à la Nation de se souvenir et d’agir. Et c’est le CPME, structure institutionnelle, qui devra faire des propositions de contenu afin de fournir substance et consistance à cette date officielle. C’est ainsi que fonctionne une démocratie. Il reviendra à ce CPME d’entendre et d’harmoniser les offres d’action émanant d’associations. Il sera temps alors de faire son procès, s’il s’avérait incapable d’accomplir sa mission. Il devra être la caisse de résonance du dynamisme et de l’imagination des associations et personnalités (Universitaires, Artistes…) qu’il lui faudra consulter. Nous devrons nous donner les moyens d’exercer à son égard la plus ferme vigilance et dénoncer ses insuffisances éventuelles. Mais c’est au CPME que la loi octroie cette responsabilité, donc cette force face au Gouvernement. Il convient de ne pas le fragiliser. Car, même si nous parvenions à mettre en place un vrai pouvoir économique, à le mobiliser de façon constante et durable en rassemblant d’année en année les moyens, à même hauteur que les pouvoirs publics, pour donner à cette célébration l’épaisseur qu’il convient, nos actions, fussent-elles hautement civiques, demeureraient d’initiative privée. Elles ne s’imposeraient pas à la Nation, dont les institutions ont montré plusieurs fois leurs profondes réticences. L’enjeu n’est pas seulement de remporter une victoire symbolique. Il est d’inscrire dans la conscience collective française la légitimité de notre présence au monde, sur nos territoires et sur le territoire français, de notre part dans l’identité nationale, de notre appartenance à la communauté nationale, de notre exigence de la plus stricte égalité des droits et des chances. Sont en cause nos enfants dont l’univers familial et culturel est nié dans un grand silence scolaire, et par conséquent leur existence disqualifiée. Sont en cause nos adolescents suspectés de ne pas être d’ici, car avec ou sans passeport européen c’est, comme ceux qui viennent d’autres parties de l’ancien empire colonial français, sur leur apparence physique qu’ils sont soumis aux contrôles, aux humiliations, aux coups, aux abus de toutes sortes comme l’ont rappelé récemment quelques évènements dramatiques. Sont en cause nos artistes en toutes disciplines dont le talent, monumental, est relégué aux circonstances qu’ils sont obligés de créer eux-mêmes à force d’obstination et d’autosubsistance. Que vaut la maîtrise de tant de métiers du spectacle par un immense comédien comme Greg Germain ? Que vaut la ténacité d’Euzhan Palcy, astreinte finalement à exercer aux Etats-Unis, tandis que les années s’écoulent inexorablement ? Que vaut la puissance qui émane de Jacques Martial si les occasions lui sont si rarement offertes de donner sa mesure et de l’amplifier ? Que vaut le génie musical d’Alain Jean-Marie, la profusion créatrice de Mario Canonge, la ferveur lyrique de Joby Bernabé, l’extraordinaire habileté d’Henri Guédon, quand nous devons recevoir si rarement et si parcimonieusement un peu du bonheur qu’ils fabriquent ? Que valent l’excellence de Firmine Richard, la virtuosité d’Eric Bonheur et de Romain, la douceur enveloppante de Sylviane Cedia, la flûte enchantée de Max Scylla et l’éclat vocal de Josy Mass, la persévérance mélodieuse d’Emmanuel Lucenay, la luxuriance du verbe de Marijosé Alie, la poésie de Chris Combette, la mélancolie d’Edith Lefel, l’ardeur de Kali, la fertile fantaisie de Xavier Orville, la clairvoyance philosophique d’Yves Leborgne, le panache et le courage de Félix Eboué, la force morale de Mortenol, l’inépuisable énergie des bénévoles irréductibles comme Luc Saint-Eloy et d’autres militants culturels ? Que vaut ce foisonnement de prouesses si leurs exemples relèvent de l’exception alors que nous avons tant besoin de modèles ? Et ce n’est là qu’une petite poignée de ceux qui ont ou auraient réussi leur vie dans ces métiers et ces engagements choisis. A quel prix ! Avec quelles privations, quelles pesanteurs et quelles inerties contre leur créativité et leur épanouissement ! Quel chemin s’ouvre pour nos artistes en fleur et pour ceux qui bourgeonnent déjà ? Comme leurs aînés, seront-ils condamnés à être magnifiques et sacrifiés ? Alors qu’il nous faut changer d’échelle et passer de l’exploit individuel au succès collectif. Je ne veux pas avoir à m’infliger les reproches que le poète se faisait à lui-même : « de n’avoir rien fait, détruit, bâti, osé pour l’évasion organisée en masse de l’infériorité, c’est en vain que je cherche le creux d’une épaule où cacher mon visage, ma honte de la réalité » (1).



Que reste-t-il des voies royales ouvertes par nos illustres aînés qui surent imposer leur cri et leur superbe à un monde abasourdi de découvrir notre contribution aux civilisations d’avant et à celles d’après ? Nos enfants auront à parcourir le même chemin si nous n’avançons pas.
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