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 l’Economie de la traite des esclaves 1

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mihou
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mihou


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02062005
Messagel’Economie de la traite des esclaves 1

Chap. II. L’esclavage : Un système capitaliste abouti

Le produit. Dès sa capture, l’esclave devenait une marchandise dont le " conditionnement " avait une répercussion non négligeable sur le prix de vente. Tous les 3 à 4 jours, les Africains entassés au fond des bateaux négriers étaient remontés sur le pont par petits groupes, afin de détendre leurs membres ankylosés à cause de leur disposition, allongée, accroupie ou assise pour un meilleur gain de places, dans l’obscurité et l’étroitesse des cales. On les obligeait alors à danser, au rythme du fouet, pour raffermir leurs muscles. Ils recevaient 2 fois par jour un bol de soupe de fève et une ration d’eau. Les soins médicaux étaient abondants, et il y avait toujours un médecin à bord, qui avec des recettes de grand-mère, était chargé d’enrayer les épidémies de dysenterie qui sévissaient à bord des vaisseaux négriers.

Les esclaves trop malades étaient jetés par-dessus bord avec ceux déjà morts, à la fois parce qu’ils étaient " invendables " et parce qu’ils risquaient de contaminer les autres captifs. En 1781, le capitaine du bateau négrier anglais le Zong, qui ramenait des captifs d’Afrique de l’Ouest vers la Jamaïque, jeta à la mer 131 esclaves malades et affaiblis par une épidémie, en seulement 3 jours. Le médecin des bateaux négriers avait également pour rôle de masquer les brutalités des hommes d’équipage sur la " marchandise ". Un mélange d’huile de palme et de cendre noire servait à dissimuler les plaies causées par les coups de fouet et les entraves en fer, que les esclaves portaient quasiment en permanence aux chevilles, aux poignets et souvent autour du coup. Connaissant les exigences des Colons, et afin de s’assurer les meilleurs bénéfices, les armateurs veillaient à débarquer aux Amériques la marchandise la plus " présentable " possible.

“ Danse des Nègres ” sur le pont d’un bateau négrier français, début du 19ième siècle.

De l’autre côté de l’Atlantique, les attendait un réseau commercial bien organisé. Les Négriers européens revendaient principalement leurs captifs à des " grossistes ", propriétaires de dépôts où les esclaves étaient brièvement nettoyés, nourris et acclimatés, avant d’être revendus à des particuliers, lors d’enchères publiques où privées. En 1803, un commerçant de Liverpool du nom de Thomas Leyland, propriétaire de 6 bateaux négriers, dont l’Entreprise, qui lui ramena des côtes africaines une cargaison de 392 esclaves, qui avaient survécu à la traversée, les revendit entre 25£ et 60£ la " tête ", et en obtint 6 428£, ce qui pour l’époque était une véritable fortune.

A Rio de janeiro, la rua de Valongo était le plus grand marché d’esclaves du pays. On y trouvait des magasins et surtout des Casas de leilões ( littéralement : maisons de braderie) destinés à l’exposition, à la vente et l’achat d’esclaves africains fraîchement déportés. Les " braderies " d’esclaves étaient annoncées au grand public par des affiches spéciales ou alors des petites annonces dans les journaux. Les marchands d’esclaves de petite envergure, recouraient généralement au porte à porte avec leur petit "lot" de captifs, qu’ils proposaient aux habitants de la ville. Mais il existait des systèmes de vente bien plus sauvages, comme les ventes " à la curée ", qu’un chirurgien britannique de la Jamaïque décrit en ces termes :

Esclaves malades et affaiblis jetés à la mer; gravure du 18è siècle

« Au jour fixé, on a débarqué les nègres pour les emmener dans une grande cour appartenant aux consignataires du navire. A l’heure dite on a ouvert brusquement les portes de la cour, une quantité considérable d’acheteurs s’est précipitée à l’intérieur, avec une férocité de brutes. <… > Certains prenaient immédiatement autant de nègres qu’ils pouvaient tenir de leurs mains. D’autres avaient noué des mouchoirs de couleur et entouraient de cette chaîne improvisée autant d’esclaves que possible. On peut difficilement décrire la confusion que produit cette méthode de vente »
Ces modes de commercialisation existaient dans toutes les colonies des Antilles et des Amériques. Si le phénomène de le traite a perduré presque aussi longtemps que celui de l’esclavage, c’est essentiellement en raison de la mortalité élevée des esclaves et leur très faible taux de natalité. L’alimentation constante du marché de l’esclave par des apports extérieurs, visait à compenser ces hécatombes. Au 18ième siècle, pour la seule île de Saint-Domingue, les administrateurs coloniaux évaluaient la mortalité annuelle des Noirs à 30 000. L’analyse d’un certain Fénelon, homme d’église et grand philosophe des Lumières, gouverneur de la Martinique en 1764, permet de comprendre le phénomène :

« Un de mes étonnement a toujours été que la population de cette espèce n’ait pas produit, depuis que les colonies sont fondées, non pas de quoi se passer absolument des envois de la côte d’Afrique, mais au moins de quoi former un fond, dont la reproduction continuelle n’exposerait pas à être toujours à la merci de ces envois. <…> Mauvaise nourriture, excès de travail imposé même aux Négresses enceintes, maladie très fréquente des Négrillons et des Négrittes. On ne fait aucune attention même à leur « éducation animale » : on les voit en particulier exposés tout le jour dans les champs au soleil brûlant. »

Certains pays, comme le Brésil, considéraient au contraire que la traite était plus rentable que la reproduction " naturelle " des esclaves, qui exigeait d’attendre que l’esclave atteigne au moins 10 ans pour être vraiment exploitable. De plus, l’arrivée permanente de captifs africains permettait de maintenir le prix de l’esclave au plus bas. Ce qui faisait qu’il coûtait moins cher à acheter qu’à " élever "
Achat d’esclaves dans un barracone, marché d’esclaves, Havane, Cuba, 1837.

Le prix d’un esclave était fixé selon 2 critères essentielles : Le sexe et l’âge. D’autres considérations, d’ordre esthétique et moral surtout, jouaient également un rôle selon la tâche à laquelle l’esclave était destiné (les " beaux " esclaves étaient préférés pour les services domestiques), la classe sociale des acheteurs ( les Mulâtres étaient surtout des esclaves "décoratifs", donc les meilleurs indicateurs de la position sociale) ou le cadre de la société coloniale (les femmes étaient proportionnellement plus nombreuses en milieu urbain). Les hommes étaient bien entendu plus " cotés " que les femmes, car c’était eux qu’on préférait pour les plantations, entreprises coloniales les plus rentables. A âge égal, un homme pouvait valoir le double du prix d’une femme. Entre 1863 et 1882, sur le marché de Rio de Janeiro, 70% des esclaves de sexe masculin atteignaient la valeur de 2 contos de réis contre seulement 30% d’esclaves de sexe féminin. La tranche d’âge la plus demandée était celle des 20-30 ans, puis celles des 15-20 ans. Les marchands d’esclaves trichaient très souvent sur l’âge de leurs " marchandises ", pour les rajeunir au maximum.

Mais les acheteurs se faisaient leur propre opinion en " examinant " minutieusement et physiquement les esclaves mis en vente. Sur les inventaires d’esclaves des Antilles anglaises ( Inventory of Blacks) ou les actes de vente et d’achat d’esclaves du Brésil ( Escrituras de compra e venda de escravos), les appréciations des acheteurs, tout particulièrement les planteurs, accompagnent souvent leurs estimations. Dans un inventaire de femmes esclaves d’une plantation anglaise du 18ième siècle, les 2 esclaves les plus chères Cooba et Kathy ( 100 £ chacune) sont décrites comme : « de bonnes Négresses de plantation, qui se reproduisent vite ». Les esclaves les moins " rentables" de l’inventaire (25£, 35£, et 40£), souffrent de « rhumatismes » ou de « déformations ».

Une page de petites annonces de vente et location d’esclaves, Jornal do commercio, Rio de Janeiro, Brésil, seconde moitié du 19ième siècle.

Les consommateurs. Les plus gros acheteurs d’esclaves étaient bien entendu les planteurs, qui pouvaient posséder entre 100 et 300 esclaves travaillant sur des hectares de plantations. Mais l’esclavage était une pratique qui s’étendait à toutes les couches et les catégories sociales. Les prêtres, les religieuses, les artisans, les particuliers, les femmes, les enfants, tout homme blanc était en droit de posséder un esclave. Même les plus pauvres, se faisaient un devoir d’en acheter au moins un, qui était très souvent leur seul source de revenu. L’armée, la marine, les travaux publiques, les hôpitaux, les églises, etc., achetaient ou louaient également un grand nombre de captifs. Les esclaves étaient commercialisés sous tous les modes : vente, location. Ils servaient à régler toutes les formes de transactions de la vie courante. Ils pouvaient être l’objet d’un prêt, d’un acompte, d’un gage, d’un cadeau, d’une créance, d’une hypothèque, d’un héritage, d’une saisie judiciaire, etc. Ils constituaient l’investissement et la valeur économiques les plus sûrs de cette époque.

Les sociétés coloniales, qu’elles soient anglaises, françaises, espagnoles, portugaises ou hollandaises, ont été jusqu’au bout de la logique esclavagiste. Elles n’ont épargné à leurs captifs aucune forme d’exploitation, d’asservissement, quelque soit leur âge et leur genre. L’esclave servait à tout. Du service militaire à la prostitution, de l’allaitement des enfants blancs au ramassage des excréments, l’instrumentalisation de l’esclave a atteint des degrés de perversité et de complexité qui pourraient paraître surréalistes de nos jours.

Mais à l’époque, l’esclave était la réponse à tous les besoins, donc à tous les désirs et caprices humains. Les enfants en bas âge étaient achetés, sans leurs mères le plus souvent, pour servir de camarades de jeux, où plus précisément de jouets, aux enfants des familles blanches. Des enfants auxquels leurs parents achetaient de petits fouets spécialement conçus pour " s’entraîner " à châtier leurs futurs esclaves. La tradition patriarcale de la plupart des sociétés coloniales, voulaient que les femmes esclaves servent au dépucelage des jeunes garçons des familles de maîtres, et les petites négresses vierges de moins de douze ans étaient sensées guérir les hommes de la syphilis et leur "purger le sang".

Culture de la canne à sucre, Antilles anglaises, 1840

Une page de petites annonces de vente et location d’esclaves, Jornal do commercio, Rio de Janeiro, Brésil, seconde moitié du 19ième siècle.
Quelques extraits de petites annonces prises au hasard dans les quotidiens paraissant dans la ville de Rio de Janeiro : le Jornal do Commercio et le Diario do Rio de Janeiro dans le seconde moitié du 19ième siècle
« On loue un esclave, parfait travailleur de plantation ; rue de la Miséricorde, n°86, 2ième étage »
« On loue une Noire bonne nourrice, très douce avec les enfants, elle sait faire tous les travaux domestiques, pour 25$ ; rue de lavradio, 186 »
« On vend dans une maison particulière, deux esclaves de très bon caractère, dont une mulâtresse qui sait bien laver, cuisiner et amidonner, elle sait faire les achats ainsi que tout les travaux domestiques. L’autre, Noire, sait laver, cuisiner et amidonner, elle a une fille de 9 à 10 ans très mignonne ; Campo de acclamação n°9A. »
« On loue une Négresse pour allaiter des bébés, elle a beaucoup de bon lait, elle a accouché il y a seulement trois semaines d’une première grossesse. »
« On vend une mulâtresse claire avec un enfant qui marche déjà ou sans lui. Elle sait tailler les vêtement des dames, amidonner, laver, faire des points et cuisiner. (Diario do Rio de Janeiro 27 janvier 1853)
« On vend, pour payer une dette, deux Noirs, bons travailleurs, un cordonnier et l’autre maçon, il rapporte chacun 1$600 de revenus journalier, on peut leur faire confiance, ils sont de bonne conduite et en bonne santé ; rue de lavradio n°6A »
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